Dès les premiers siècles de notre ère, il est fait état d'un tissu réputé porter l'empreinte physique du Christ. Il apparaît à Édesse (l'actuel Urfa en Turquie), où la tradition précise qu'il aurait été apporté, dès les premiers siècles, par Thaddée, un disciple de Jésus, dans ce royaume dont l'histoire atteste qu'il se convertit au christianisme au plus tard au IIè siècle (donc très rapidement). Cette image d'Édesse, mentionnée par d'innombrable document d'époque, est un tissu où se serait miraculeusement imprimé le visage du Christ; elle est dite archeiropoïétique, c'est à dire non faite de main d'homme. Probablement à cause d'un retour du paganisme, il n'est plus question de l'image durant quelques siècles; elle réapparaît dans les chroniques, pour n'en plus sortir, au début du VIè siècle.
Or, à peu près à cette époque, l'imagerie du Christ dans l'art change radicalement : le jeune homme imberbe et bouclé laisse la place à un homme barbu, de type sémite, à la longue chevelure. On a relevé plus d'une quinzaine de traits qui reviennent constamment, sur les reproductions de l'image d'Édesse comme sur les Christ pantocrator[1] qui prolifèrent en orient : ils se retrouvent tous sur le linceul de Turin. Parmi les plus troublants : une mèche à deux branches sur le front, qui correspond à une tache de sang sur le linceul en forme de 3 inversé; deux marques sur le front, l'une en forme de U, surmontant une plus petite en V, qui ne peuvent s'expliquer que par leur présence sur le suaire; le nez fort, les pommettes saillantes et les yeux globuleux, la barbe bifide (séparée en deux). Sans l'influence du suaire, comment expliquer par exemple que sur une monnaie de l'empereur Justinien II, qui régna sur Byzance de 685 à 695, figure un Christ au visage tuméfié ?
En 944, l'image d'Édesse est conquise et transférée à Constantinople. Mais en 1204, lors du sac de la ville, elle disparaît sans laisser de traces. Durant ces trois siècles, l'image est de plus en plus souvent évoquée comme représentant le corps du Christ, et non plus seulement son visage. Si, auparavant, on n'a souvent mentionné que celui-ci, ce peut être parce que le tissu était plié de façon à ne laisser apparaître que le visage, de fait la partie la plus marquante, ce que suggère le mot tetradiplon (doublé en quatre) qui lui est parfois appliqué. Mais dès 769, le pape Etienne III en parle comme un linge où l'on peut voir «non seulement [le] visage [du Christ] mais aussi la stature de son corps».
Le linge disparaît pendant plus d'un siècle. Mais en 1355, le croisé Geoffroy de Carny organise la première ostension[2] à Lirey, en Champagne. Geoffroy n'a jamais expliqué comment il était entré en possession du linceul. On peut noter comme possible indice le fait que celui-ci a épousé une descendante d'Othon de La Roche, chef croisé qui a participé au sac de Constantinople.
En 1898, débutent les recherchent scientifiques. Secondo Pia, photographiant le suaire pour la première fois, découvre avec stupeur que le négatif de ses photos donne une image beaucoup plus nette : l'image présente sur le tissu a toutes les caractéristiques d'un négatif, et c'est donc sur les négatifs qu'elle apparaît en positif, la silhouette indistincte y prenant l'apparence d'un véritable portrait, d'un réalisme saisissant.
Des recherches sont effectuées concernant la conformité de l'image du suaire (terme religieux du linceul) au récit de la Passion.
Il en résulte que l'image est celle d'un homme d'environ 1,80 mètre, âgé de trente à quarante ans.
Il a été frappé au visage et flagellé à la romaine, de plus de cent coups de fouet lesté de boules de plomb, et a eu le cartilage du nez cassé.
Sa tête a été recouverte d'épines, on dénombre, sur le linge, une cinquantaine de blessures autour de la tête faisant penser à un casque d'épines.
La coulée de sang de la veine frontale, en forme de 3 inversé, a pu être arrêtée par un cercle de jonc semblable à celui de la sainte couronne d'épines, rachetée en 1238 par Saint Louis, et conservée aujourd'hui à la cathédrale Notre Dame de Paris. Le supplice de la couronne d'épines n'a jamais évoqué en dehors des Évangiles.
Il a porté un objet pesant sur ses épaules, (en général, le condamné ne portait que le patibulum - la partie horizontale de la croix qui devait peser près de 45 kg, la partie verticale - le stipes, était souvent planté à demeure sur le lieu du supplice) les blessures dues au portement du patibulum sont visibles sur l'épaule droite et l'omoplate, elle sont postérieures à celles de la flagellation (qui apparaissent dessous)
Il est tombé plusieurs fois à terre : le tissu garde des traces d'une poussière (mais aussi de pollens) typique du Proche-Orient.
Il est mort de crucifixion, et les clous n'ont pas été plantés dans les paumes des mains comme on le représentait au Moyen-Âge, mais dans les poignets (le carpe précisément), ce que des études modernes ont révélé comme la seule méthode praticable. Ces études ont également prouvé qu'un homme crucifié a les pouces qui se rétracte, c'est le cas de l'homme du linceul (voir photographie).
Au niveau des pieds, un seul clou semble avoir été fixé dans le carpe pour les deux pieds, le gauche au-dessus du droit.
Son sang comporte un excès de bilirubine, comme il est normal en cas de grande souffrance. Les angles des coulées de sang sur les bras montrent que le supplicié a alterné les positions hautes et basses pour chercher sa respiration et éviter l'asphyxie.
Il a reçu un coup de lance du côté d'où ont jailli «du sang et de l'eau» (du sérum) comme en rend témoignage l'Évangile de Jean. L'homme du linceul a une plaie de 4,5 cm, correspondant à la pointe d'une lance romaine. Elle est restée béante, signe que l'homme était déjà mort quand la blessure lui a été infligée. Cette blessure a été portée non au cœur, mais à droite, là où les légionnaires romains étaient entraînés à frapper.
Le corps de Jésus de Nazareth, n'a pas été lavé car mort un vendredi soir, la toilette mortuaire devait attendre la fin du sabbat. Le corps du linceul n'a pas été lavé non plus, et comme celui de Jésus, il a reposé moins de quarante heures dans ce linge.
LES TECHNIQUES ET CONNAISSANCES ACTUELLES DE LA SCIENCE NE PERMETTENT PAS DE COMPRENDRE COMMENT LE CORPS DE L'HOMME DU SAINT SUAIRE DE TURIN A ÉTÉ RETIRÉ. LE SUPPLICIÉ EST SORTI DU LINCEUL SANS ARRACHER AUCUN CAILLOT DE SANG.
L'EMPREINTE "IMPRIMÉE" SUR LE LINGE N'EST PAS UNE PEINTURE. ELLE N'A JAMAIS PU ÊTRE REPRODUITE. SA FORMATION N'A PAS PU ÊTRE EXPLIQUÉE. Tout ce passe comme si le corps avait projeté son image par rayonnement sur le linge.
Le Saint Suaire, fin et léger, est un tissu cher et honorifique, en totale contradiction avec le supplice "infamant" de la croix dont la pratique habituelle était de jeter les crucifiés à la fosse commune. L'évangile précise toutefois que c'est Joseph d'Arimathie «un homme riche» (Mt 27,57) qui «acheta un linceul» (Mc 15,46)
Il est impossible que le Saint Suaire soit un faux médiéval, comme certains l'ont hâtivement déduit à la suite des analyses au carbone 14. Cette méthode de datation n'est pas infaillible, l'un de ses principaux artisans a d'ailleurs mis en garde contre la contamination possible par simple fumée de cigarette, alors que le suaire a subi plusieurs incendies et que les échantillons ont été prélevés dans une zone souvent manipulée lors des ostensions. Les analyses, que toutes personnes sérieuses reconnaissent aujourd'hui comme erronées, dataient le linceul du XIVè siècle alors qu'un manuscrit du XIIè siècle, le Codex Pray, parle très clairement du suaire et du corps supplicié du Christ, avec des détails qui ne peuvent être révélés que par l'examen du tissu.
Le groupe sanguin de l'Homme du linceul est très probablement AB, comme c'est le cas du sang prélevé sur la Tunique d'Argenteuil. Mais ceci est une autre histoire.
[1] Représentation artistique du Christ dans son corps glorieux par opposition aux représentations plus humaines du Christ souffrant la passion sur le crucifix, ou celle de l'enfant Jésus.
[2] Exposition des reliques à la dévotion des fidèles
A voir : http://linceuldeturin.info
A lire :
Arnaud UPINSKY - Le Grand Témoin sur
Radio Notre Dame 100.7 - lundi 3 mai 2010
Emission animée par : Louis Daufresne, Aymeric Pourbaix
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