L’article qui suit a été envoyé par Mr André Fresnoy. Il était accompagné d’un commentaire inspiré par la situation actuelle de la France dans le domaine politique et spirituelle. Avec son accord, Lutèce a décidé de le publier, mais en supprimant les commentaires puisque ceux-ci, exprimant des opinions personnelles, n’ont pas leur place sur un site consacré à des faits historiques anciens.
Lutèce tient néanmoins à remercier chaleureusement Mr Fresnoy pour cet article de qualité.
De la prédilection divine pour la France.
Alors que certains courants de pensée (politiques ou religieux) tendent à minimiser, ou à passer sous silence le choix divin dont a bénéficié la France, il semble indispensable de rappeler à une population déboussolée, déracinée et pour son plus grand malheur déchristianisée, ce que l’Église traditionaliste veut signifier par ces mots prédilection divine pour la France.
Par la voix des papes, l’Église s’est prononcée sur cette question. Les citations abondent, il est donc aisé de prouver ce fait. Laissons parler tout d’abord le pape Saint Grégoire le Grand :
« c’est par Clovis et les merveilleuses circonstances de son sacre que le roi de France acquit ce caractère de vicaire de Dieu, sergent du Christ, qui, dit Saint Grégoire le Grand, « le plaçait autant au-dessus des autres monarques que les autres monarques étaient eux-mêmes au-dessus des particuliers» (St Grégoire le Grand Epist. Lib. VI, Caput VI) » (cité dans : La Mission Posthume de la Bienheureuse Jeanne d’Arc, Mgr Delassus, Ed Saint-Remi 1998, p. 137)
Saint Pie X déclarait pour sa part, le 19 décembre 1907, à l'Archevêque de Reims, Monseigneur Luçon, nouvellement promu Cardinal, (Bulletin du Diocèse de Reims, 28 déc. 1907, p. 621) :
« Reims conserve la source baptismale d'où est sortie toute la France Chrétienne, et elle est justement appelée pour cela le Diadème du Royaume. C'était une heure ténébreuse pour l'Église de Jésus-Christ. Elle était d'un côté combattue par les Ariens, de l'autre assaillie par les Barbares ; elle n'avait plus d'autre refuge que la prière pour invoquer l'heure de Dieu. Et l'heure de Dieu sonna à Reims, en la fête de Noël 496. Le baptême de Clovis marqua la naissance d'une grande nation : la tribu de Juda de l'ère nouvelle, qui prospéra toujours tant qu'elle fut fidèle à l'orthodoxie, tant qu'elle maintint l'alliance du Sacerdoce et du Pouvoir public, tant qu'elle se montra non en paroles, mais en actes, la Fille aînée de l'Église. »
Le Pape Grégoire IX écrira à Saint Louis :
« De même qu'autrefois la tribu de Juda reçut d'En Haut une bénédiction toute spéciale parmi les autres fils du patriarche Jacob, de même le royaume de France est au-dessus de tous les autres peuples, couronné par Dieu Lui-même de prérogatives extraordinaires. La tribu de Juda était la figure anticipée du Royaume de France.
« Aussi nous est-il manifeste que le Rédempteur a choisi le béni royaume de France comme l'exécuteur spécial de Ses divines volontés ; Il le porte suspendu autour de Ses reins, en guise de carquois, Il en tire ordinairement Ses flèches d'élection quand, avec l'arc, de Son bras tout puissant, Il veut défendre la liberté de l'Église et de la Foi, broyer l'impiété et protéger la justice...
"Ainsi, Il choisit la France, de préférence à toutes les autres nations[1] de la terre, pour la protection de la foi catholique et pour la défense de la liberté religieuse[2] ; pour ce motif, la France est le royaume de Dieu même, les ennemis de la France sont les ennemis du Christ[3]." Ces seules citations suffiraient à clore le débat, mais bien d’autres papes ont parlé dans ce sens.
Le pape Anastase II :
« Lettre adressée à Clovis : « Illustre et glorieux Fils, soyez sa (de l'Église) gloire, soyez pour elle une colonne de fer ! »
« Nous louons Dieu, qui Vous a retiré de la puissance des ténèbres, pour faire d'un si grand Prince le défenseur de son Église et opposer votre gloire aux attaques des pervers. Continuez donc cher et glorieux Fils, afin que le Dieu tout-puissant entoure votre sérénité et votre royaume de sa protection et commande à ses anges de vous protéger dans toutes vos voies et vous donne la victoire sur tous vos ennemis » (Anast. II, ép. II ad Clod. tom. VI, Conc. col. 1282 cité par Bossuet : Politique tirée de l'Écriture Sainte, tome I, livre VII, page 529, éd. Delestre Boulage 1822, et par Zeller, « Les Francs Mérovingiens : Clovis et ses fils », p. 38. ») Ib., page 21.
Le pape saint Hormisdas (514-523) :
Lettre à Saint Rémi lorsqu'il l'institua en ces termes Légat pour toute la France : « Nous donnons tous nos pouvoirs pour tout le Royaume de notre cher Fils spirituel Clovis que par la grâce de Dieu vous avez converti avec toute Sa Nation, par un apostolat et des miracles dignes du temps des Apôtres. » Migne, t. 125, p. 1168. Hincmar : Vita Sancti Reniigii, cap. LIV, Baronius, Annales Ecclesiastici – Tome VI, p. 635. » (Ib., p. 25.)
De tous les peuples nouveaux qui s'étaient établis sur les ruines de l'empire romain, les francs furent longtemps seuls à professer la croyance orthodoxe ; et cet élément surnaturel lui valut les hautes destinées qui lui ont assuré une gloire et une influence sans égales. C'est assurément pour nous, Français, un honneur dont nous devons être saintement fiers, de trouver dans les écrits d'un Docteur de l'Église ces paroles adressées, dès le VIème siècle, à un prince de notre nation : « Comme la dignité royale s'élève au-dessus des autres hommes, ainsi domine sur tous les royaumes des peuples la prééminence de votre royaume. Être roi comme tant d'autres n'est pas chose rare ; mais être roi catholique, alors que les autres sont indignes de l'être, c'est assez de grandeur. »
Honneur à saint Rémi qui mérita d'être pour les Francs l'instrument des faveurs du ciel ! On sait comment, selon l'expression du saint Pape Hormisdas, « Remi convertit la nation et baptisa Clovis au milieu de prodiges rappelant les temps du premier apostolat. » La prière de Clotilde, le labeur de Geneviève, les pénitences des moines peuplant les forêts gauloises, eurent sans nul doute leur très grande part dans une conversion qui devait tant bénéficier au peuple de France ; il convient de rappeler que cette conversion fut aussi préparée par tous ces grands évêques du Vème siècle, Germain d'Auxerre, Loup de Troyes, Aignan d'Orléans, Hilaire d'Arles, Mamert et Avit de Vienne, Sidoine Apollinaire, et tant d'autres qui, dans ce siècle si tourmenté, maintinrent l'Église en la lumière et forcèrent le respect des Barbares.
Contemporain et survivant de la plupart d'entre eux, leur émule en éloquence, en noblesse, en sainteté : Rémi, sembla les personnifier tous en cette nuit de Noël qu'avaient appelée tant d'aspirations, de supplications, de souffrances. Au baptistère de Sainte-Marie de Reims, naissait à Dieu notre nation ; comme autrefois au Jourdain la colombe était vue sur les eaux, honorant non plus le baptême du Fils unique du Père, mais celui de la fille aînée de son Église : largesse du ciel, elle apportait l'ampoule sainte contenant le chrême dont l'onction devait faire de nos rois dans la suite des âges les plus dignes entre les rois de la terre.
Depuis, dans la glorieuse cité de Reims, en l’Église de Saint-Remi, caput Franciæ, tête de la France, comme la nommaient nos aïeux, entre son incomparable Notre-Dame et la vénérable basilique, Remi gardait à ses pieds l'ampoule du sacre ; jusqu'à ces jours d'octobre 1793 où, fut proclamée la nouvelle que les "siècles d'obscurantisme" avaient pris fin, tandis que l'on brisait la Sainte Ampoule et qu'on jetait dans une fosse commune les restes de l'Apôtre des Francs[4].
Oui, Dieu a choisi la France et Saint Pie X nous engagea à en être fiers, le 13 décembre 1908 lorsqu’il dit à l'Évêque d'Orléans, lors de la lecture du Décret de béatification de Jeanne d'Arc (Actes de saint Pie X, tome V, pp.204-205) : « Vous direz aux Français qu'ils fassent leur trésor des testaments de saint Rémi, de Charlemagne et de saint Louis, qui se résument dans ces mots si souvent répétés par l'héroïne d'Orléans : Vive le christ qui est roi de France ! À ce titre seulement la France est grande parmi les nations. À cette clause Dieu la protégera et la fera libre et glorieuse à cette condition, on pourra lui appliquer ce qui dans les livres saints est dit d'Israël : que personne ne s'est rencontré qui insultât ce peuple, sinon quand il s'est éloigné de Dieu... »
Ce Saint Pape fit même une prophétie, qui, il faut l’espérer se réalisera : Allocution VI Ringrazzio, lors de l'imposition de la barrette aux Cardinaux de Cabrières, Billot, Dubillard et Amette, le 29 novembre 1911 : « Que vous dirai-je à vous maintenant, chers fils de France, qui gémissez sous le poids de la persécution ? Le peuple qui a fait alliance avec Dieu aux fonds baptismaux de Reims se convertira et retournera à sa première vocation [... ] Les fautes ne resteront pas impunies mais elle ne périra jamais, la fille de tant de mérites, de tant de soupirs et de tant de larmes. « Un jour viendra, et nous espérons qu'il n'est pas très éloigné, où la France, comme Saül sur le chemin de Damas, sera enveloppée d'une lumière céleste et entendra une voix qui lui répétera : « Ma fille, pourquoi me persécutes-tu ? » Et sur sa réponse : « Qui es-tu Seigneur ? » La voix répliquera : « Je suis Jésus que tu persécutes. Il t'est dur de regimber contre l'aiguillon, parce que dans ton obstination, tu te ruines toi-même ». Et, Elle, tremblante et étonnée, dira : « Seigneur, que voulez-Vous que je fasse ? » Et lui : « Lève-toi, lave-toi des souillures qui t'ont défigurée, réveille dans ton sein les sentiments assoupis et le pacte de notre alliance, et va, fille aînée de l'Église, nation prédestinée, vase d'élection, va porter, comme par le passé, mon nom devant tous les peuples et devant les rois de la terre. » »
André Fresnoy
[1] Le pape Saint Pie X utilise bien le mot nation, pour traduire Grégoire IX, cela ne semble pas le déranger ; il s’agit simplement du mot nation synonyme de peuple, "gens" ou "natio" en latin, qui n’a rien à voir avec le nationalisme qui consiste à mettre le pouvoir temporel au-dessus du pouvoir spirituel, véritable inversion. Toute la Sainte Écriture parle des Nations, de la Genèse au Nouveau Testament. Les Nations sont voulues par Dieu, et le mot "nation" date du 12ème siècle selon le Grand Robert, tandis que le mot nationalisme date de 1798, il a été inventé par les lucifériens, dont Weishaupt était le chef de file. La Chronique d’Alexandrie, p. 12, compte 72 peuples ou nations dans l’univers, correspondant aux 72 langues du monde, Abbé Maistre, Histoire de chacun des 72 disciples, p. 9, éd. Saint-Rémi.
[2] La vraie liberté religieuse due à la seule vraie religion.
[3] Saint Pie X cita cette lettre de Grégoire IX à saint Louis dans son discours du 13 décembre 1908 lors de la béatification de Jeanne d'Arc.
[4] Retrouvés cependant par la suite, et authentiquement reconnus, ils font l'objet de la vénération des pèlerins.