Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
14 avril 2012 6 14 /04 /avril /2012 12:21

               Vercingétorix

 

     Chapitre XI - Le passage des Cévennes par César.

 

5. César arrête Lucter dans le sud.

 

En arrivant dans la vallée du Rhône, César avait appris les dangers qui menaçaient ses légions et sa province.

Le devoir auquel il pensa tout d’abord fut de se mettre le plus tôt possible à la tête de son armée. Mais comment faire ? La rappeler à lui pour protéger la Province ? elle aurait en route de terribles combats à livrer. La rejoindre dans ses quartiers d’hiver ? il lui fallait, du Confluent à Beaune, traverser le pays des Éduens, et malgré leur calme apparent, il les croyait prêts à se saisir de lui pour peu qu’il leur inspirât moins de crainte que Vercingétorix.

César trouva rapidement un troisième parti, qui était de menacer tous ses ennemis à la fois, de manière à les arrêter tous en même temps : Lucter, en s’opposant à lui ; Vercingétorix, en le ramenant en arrière ; les bandes qui bloquaient les légions, en laissant faire l’impassibilité des légats. Puisque les Gaulois attaquaient sur trois points, il répondrait à leur triple attaque. Quant aux Éduens, si César avait fait peur aux Arvernes, ils le laisseraient passer. — Pour oser et réussir un tel projet, il fallait une étonnante confiance en sa Fortune et une rare célérité de mouvements : mais c’étaient les plus grandes qualités de César.

Sa décision prise, laissant là les routes habituelles du Nord, il courut à Narbonne et y organisa la défense de la Province. Des détachements furent postés à Toulouse, à la frontière de la plaine ; d’autres, à la frontière de la montagne, chez les Rutènes, sujets de Rome, des vallées du Tarn et de l’Agout ; d’autres enfin, dans le haut pays arécomique, entre Béziers et Uzès, le long des sentiers qui descendaient des Cévennes ; plus loin encore, chez les Helviens du Vivarais, au pied de la principale route qui débouchait des monts d’Auvergne, il concentra une grande partie des troupes qu’il venait de lever dans la Province et en Italie ; enfin, à Vienne, à l’extrémité septentrionale de la frontière romaine, en face la trouée du Forez, il groupa un fort parti de cavaliers de recrue. — Au centre de cette région dont il venait de garnir le pourtour, il plaça d’autres défenses, une escadrille dans les eaux de l’Aude, des hommes autour de Narbonne ; et, à Narbonne même, il raffermit les cœurs des citoyens romains : la vieille colonie devait, par ses murailles et par le courage de ses habitants, mériter le titre que Cicéron lui avait donné, de boulevard de Rome contre la Barbarie.

Lucter arriva sur ses entrefaites. Quand il vit le rideau de garnisons derrière lequel Narbonne était assise, il jugea qu’il lui était aussi impossible de manœuvrer entre elles qu’il l’avait été à Hannibal en face de Rome et à travers les colonies du Latium, et il se relira, écarté plutôt que battu.

César était encore à Narbonne quand il apprit cette retraite. Débarrassé de Lucter, il se retourna contre Vercingétorix. Celui-là, il l’avait arrêté en face. Pour arriver plus vite à celui-ci, il fallait qu’il le prît à revers. Il ne le pouvait qu’en franchissant les Cévennes. Dans cette intention, il avait déjà envoyé le gros de ses troupes nouvelles sur l’Ardèche. Il les rejoignit (milieu de février).

 

6. Il franchit les Cévennes ; recul de Vercingétorix.

 

La principale route qui pénétrait dans les Cévennes partait d’Aps chez les Helviens et remontait l’Ardèche jusqu’au pont de Labaume. Franchir la montagne au mois de février semblait un acte de démence. Aucun Gaulois ne pensait qu’un chef de bon sens pût risquer101.jpg dans cette tentative sa vie et celle des siens ; César lui-même, dans ses moments de prudence, et même en plein été, déclarait que les routes des Cévennes étaient trop dures pour une armée. Le chemin qu’il allait prendre, et qui était le moins mauvais de tous, n’était pratiqué que pendant la belle saison, par les marchands qui du Rhône se rendaient en Velay et en Auvergne : c’était une route traditionnelle de portages entre les deux versants. Mais l’hiver, la muraille des Cévennes, cette échine relevée qui séparait les peuples, n’ouvrait même pas une brèche pour un piéton seul, et César s’en approchait avec une nombreuse escorte. En ce moment leurs roches pendantes et leurs longs plateaux disparaissaient sous les flocons, et sur les sentiers des hommes s’élevaient six pieds de neige. Enfin, pour qui vient du Midi, l’escarpement de la montagne est parfois si abrupt qu’on dirait la courtine d’un rempart. Les Gaulois avaient raison de regarder les Cévennes comme une enceinte naturelle : il était aussi difficile de les gravir que d’escalader au pas de course les flancs de Gergovie.

César remonta l’Ardèche et la Fontaulière à la tête d’une petite armée de cavaliers et de fantassins ; il avait près de lui D. Brutus, un des officiers qui lui étaient les plus chers et auxquels il se fiait le plus. Au delà de Montpezat, l’escalade du col du Pal commença : sept cent mètres de hauteur à monter au-dessus de la vallée. Il fallut s’ouvrir le passage à100.jpg travers la neige, les soldats creusèrent, à six pieds de profondeur, le long boyau de route blanche par où l’escorte de César put défiler ; et ce fut pour eux une nouvelle et terrible fatigue. Enfin, on parvint sur le plateau triste et désert qui, à treize cents mètres de hauteur, sépare les deux versants : à quelques milles au Nord, les soldats aperçurent déjà les eaux glacées de la Loire. Car, si cette route était rude, elle était fort courte, et, la montée terminée, on parvenait presque immédiatement aux bords du fleuve gaulois.

La Loire atteinte, on touchait aux terres arvernes. De ce côté, et tout de suite après le plateau, s’étendaient d’assez larges vallées, riches en pâturages, fertiles en blés, où étaient éparses de vastes habitations : c’est le bassin du Puy, domaine des Vellaves, qui étaient alors étroitement unis aux Arvernes. César envoya en avant sa cavalerie, avec ordre d’aller, de piller et de détruire le plus loin possible. Les Gaulois étaient trop surpris et trop dispersés pour pouvoir résister, et d’ailleurs, il n’y avait là surtout que des femmes et des enfants, les hommes capables de combattre étant au Nord avec Vercingétorix.

L’expédition de César aurait pu lui nuire plus qu’à son ennemi. Que Vercingétorix ne bougeât pas, le laissât venir à lui, se hasarder dans les défilés du Velay, le proconsul eût été aisément traqué avec ses quelques milliers d’hommes, recrues encore peu faites à la fatigue ; et, s’il avait persisté dans sa marche, il se serait brisé contre Gergovie.

Mais César, en envahissant ainsi les terres vellaves et arvernes, voulait frapper, non pas le chef, mais ses compagnons. Il prévoyait l’effroi subit qui les saisirait en pensant à leurs fermes incendiées et à leurs bestiaux enlevés ; il escomptait leurs angoisses de propriétaires, et non pas les inquiétudes militaires de Vercingétorix.

Ce qu’il avait pensé arriva. Dès que les Arvernes apprirent que César gravissait les Cévennes, ils entourèrent leur roi, le supplièrent de ne point abandonner leurs terres au pillage : puisque c’étaient eux seuls que l’on attaquait, qu’ils allassent au moins se défendre. Vercingétorix eut la faiblesse de céder : peut-être sa royauté était-elle trop récente pour lui permettre de résister aux siens. Il donna l’ordre à ses troupes de faire volte-face vers la montagne.

César ne voulait pas autre chose. Il devina plutôt qu’il n’apprit le retour de son adversaire au moment où il pénétrait lui-même sur les terres arvernes. Dès lors il n’était plus question pour lui de s’aventurer davantage vers le Nord. Il n’avait pas assez d’hommes pour essayer de combattre. Mais afin de dissimuler son départ aux Gaulois, il laissa Brutus et la petite armée dans le Velay, avec ordre aux cavaliers de continuer et d’étendre les ravages ; pour rassurer ceux qu’il abandonnait en pays ennemi, il leur annonça qu’il allait chercher des renforts et reviendrait au plus tard dans trois jours. Puis, tournant rapidement vers l’Est, par la vallée de la Loire et la tranchée du Gier, il arriva à Vienne, à la très grande surprise de la cavalerie qu’il y avait envoyée quelque temps auparavant. Il n’était resté que deux jours sur le territoire arverne.

 

7. César rejoint son armée.

 

De Narbonne à Vienne par Le Puy, ce n’eût été qu’un léger détour, sans l’incroyable fatigue surérogatoire. Mais ce détour avait suffi pour arrêter Vercingétorix dans sa marche vers le Nord, donner du répit aux légions de Sens, faire hésiter les traîtres du pays éduen. César pouvait passer maintenant.

La troisième partie de la campagne n’était donc plus qu’un jeu d’éperons. César ne s’arrêta à Vienne que pour prendre la tête de sa cavalerie : et alors, nuit et jour, le long du Rhône et de la Saône, galopèrent le proconsul et ses hommes. Si quelque embuscade avait été disposée, sur sa route, par les Éduens, César était passé avant qu’on eût appris sa venue. Enfin, au delà de la grande forêt de Cîteaux, il se trouva chez ses fidèles Lingons ; quelques milles encore à parcourir, et il rejoignit ses deux légions les plus proches. César et son armée étaient sauvés (fin février).

Ainsi, en moins de quinze jours, Jules César avait, depuis Narbonne jusqu’à Dijon, parcouru un vaste demi-cercle sur le flanc de la Gaule insurgée : il avait obligé ses adversaires, tantôt à reculer devant lui, tantôt à venir à lui en s’éloignant des légions ; tout en les faisant mouvoir à sa guise, il avait par deux fois, en vue du Mont Mézenc et du Mont Pilât, maîtrisé l’hiver et dompté les montagnes inviolables. Un tel succès était à la fois moral et stratégique, et il l’avait remporté presque sans effusion de sang.

Aussi les anciens, dans cette épopée militaire qui vient de commencer, n’admirèrent rien de plus que la formidable chevauchée à travers les Cévennes : les autres victoires de César seront l’œuvre du hasard des rencontres et de la force des hommes ; celle-ci fut le triomphe, sans combat, de l’intelligence et de la volonté.

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0
3 avril 2012 2 03 /04 /avril /2012 01:24

                                                              Vercingétorix

 

      Chapitre XI - Le passage des Cévennes par César.

 

1. Les forces romaines en février 52.

 

L’armée romaine occupait alors, à l’Est de la Gaule, la région circonscrite par Dijon, Sens, Reims et Toul. Deux légions étaient campées aux frontières des Trévires, peut-être chez les Rèmes ; deux autres chez les Lingons, à Langres ou à Dijon ; le principal effectif de troupes était à Sens, où hivernaient six légions : les magasins, les dépôts, sans doute aussi tous les otages de la Gaule, devaient s’y trouver réunis.

 

2. Forces de Vercingétorix ; quelle tactique lui était possible.

 

Cette ville était devenue le quartier général de l’armée ; elle était à proximité des terres à blé de la Beauce, centre des opérations de ravitaillement. Si les légions devaient revenir en Italie, elles pouvaient de là, en quelques étapes d’une route facile, gagner la Saône et les voies du Midi ; s’il fallait refaire campagne, elles étaient assez près des ennemis de l’Est, les seuls auxquels pensât encore César. Enfin, tout autour de Sens, sauf à l’Ouest, où étaient les Carnutes, elles s’appuyaient sur des peuples étroitement amis, les Rèmes, les Lingons, les Éduens : ces deux dernières nations gardaient les chemins de la Province, ceux par lesquels l’armée communiquait avec Rome et avec son chef.

 

3. Son plan de guerre. Retour de César.

 

De ces dix légions, six, la VIIe, la VIIIe, la IXe, la Xe, la XIe et la XIIe, avaient fait, sous les ordres de César, toutes les campagnes gauloises depuis 58 : les quatre premières, recrutées dans l’Italie proprement dite, étaient déjà anciennes quand la guerre avait commencé ; le proconsul avait levé les deux autres dans la Gaule Cisalpine au moment de s’engager dans la lutte. Les quatre autres étaient de formation plus récente, mais également d’origine italienne : c’étaient la XIIIe, la XIVe, la XVe et la Ire, qui dataient, celle-là de 57, et les trois dernières de 53. L’effectif normal de chaque légion est évalué à six mille hommes : mais il est fort douteux, même en tenant compte de l’appoint périodique des recrues annuelles, qu’il ait jamais été maintenu à ce chiffre ; une légion devait sans doute renfermer plus de quatre mille hommes, mais atteignait rarement cinq mille. — En revanche, la qualité de ces hommes était supérieure : c’étaient des soldats admirables que ceux des quatre vieilles légions (VIIe-Xe), rompus à toutes les manœuvres intelligentes et à toutes les prouesses physiques, tour à tour infatigables à la marche,Marcus-P agiles à l’escalade, terrassiers, charpentiers, machinistes, soldats de jet et d’arme blanche, viseurs impeccables, solides dans le corps à corps, le bras et le jarret d’un irrésistible ressort ; ceux de la Xe surtout, mâles robustes venus des Apennins et de l’Italie centrale, faisaient de leur légion une masse formidable, au milieu de laquelle César pouvait se dire aussi en sûreté que derrière la plus forte des citadelles. Au-dessus, ou plutôt au premier rang de ces hommes, étaient leurs centurions, presque tous couverts de blessures, vieux officiers sortis du rang, demeurés rudes, vaniteux et populaires, mais toujours hardiment compromis au chaud des batailles : tels que Lucius Fabius et Marcus Pétronius, tous deux de la VIIIe.

 

4. Premières opérations autour de Sens, dans le Berry, et vers le Sud.

 

Drappès réussit à intercepter, autour de Sens, les convois de vivres et de bagages. Les légions ne bougèrent pas, les légats se laissèrent plus ou moins bloquer, et, quand les Éduens leur apprirent le danger des Bituriges, ils se bornèrent à donner le conseil d’aller les secourir.

Vercingétorix avait descendu la rive gauche de l’Allier ; au delà des bois de Souvigny (en face de Moulins), il pénétra sur le territoire des Bituriges. Ceux-ci appelèrent à leur secours les Éduens leurs patrons : les Éduens, après avoir pris l’avis des légats, leur envoyèrent un corps de cavalerie et d’infanterie. Mais, arrivé sur la Loire, frontière commune des deux peuples, le détachement n’osa franchir le fleuve et rejoindre les Bituriges, qui étaient sur la rive gauche : Vercingétorix s’approchait, gagnait du terrain, plutôt en négociant qu’en combattant. D’étranges pourparlers furent peut-être engagés entre les trois armées : on fit croire aux Éduens que, s’ils passaient la Loire, ils seraient trahis par les Bituriges et pris entre eux et les Arvernes : ce qui, après tout, était possible, comme aussi il est fort probable qu’ils se soient laissés acheter. Les Éduens rebroussèrent chemin au bout de peu de jours, et regagnèrent Bibracte ou leurs autres villes, sans avoir rien fait. Tout de suite après leur départ, les Bituriges fraternisèrent avec les Arvernes.

Ce fut la seconde victoire de Vercingétorix. Victoire morale : car les Bituriges étaient peut-être le plus vieux peuple de la Gaule ; dans les siècles passés dont les bardes chantaient encore la gloire, c’étaient eux, disait-on, qui, comme plus tard les Arvernes, avaient donné son roi à tout le nom celtique, et c’était sous la conduite de deux chefs bituriges, Bellovèse et Sigovèse, que les Gaulois avaient pour la première fois couru à la conquête du monde. Mais c’était aussi un avantage militaire considérable : les Bituriges étaient riches en terres et en bourgades ; leur principale ville, Avaricum (Bourges), passait pour la plus belle peut-être de toute la Gaule ; leur défection amputait la ligue éduenne ; leur soumission permettait aux Arvernes de donner la main aux Carnutes ; enfin, en quelques jours de marche dans des pays amis, par la Loire et le plateau de Montargis, Vercingétorix pouvait arriver en face de Sens et des légions. Pendant ce temps, qui sait si les Éduens, ébranlés par cette première déconvenue, ne songeraient pas à offrir des gages à la Gaule conjurée, en barrant la route à César sur les rives de la Saône ?

Au Sud, Lucter fit d’abord merveille. Il traversa rapidement, en dépit de l’hiver et de routes atroces, le Gévaudan et le Rouergue. Il y fut bien accueilli. Cabales et Rutènes étaient de vieux clients des Arvernes, tout prêts à suivre leurs patrons dans de nouvelles guerres ; ils accordèrent à Lucter les otages qu’il voulut, ils lui fournirent des renforts, appoint d’autant plus utile à la cause gauloise que les Rutènes étaient les meilleurs archers de la race. Toutes ces bandes continuèrent plus bas. Le roi des Nitiobroges, Teutomat, fil le même accueil à l’envoyé de Vercingétorix ; il oublia sans peine que son père avait reçu du sénat le titre d’ami du peuple romain ; il donna des hommes pour grossir la troupe. Et ce fut à la tête d’une véritable armée que, tournant vers l’Est, Lucter remonta la Garonne pour franchir la frontière romaine et pousser brusquement jusqu’à Toulouse et Narbonne. — Mais, devant lui, il trouva César.

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0
28 mars 2012 3 28 /03 /mars /2012 05:58

            Vercingétorix

 

     Chapitre X - L'empire Gaulois.

 

5. S’il y a eu des institutions fédérales.

 

La fédération de Gergovie comprenait une vingtaine de peuples unis pour faire la guerre en commun. C’était une ligue purement militaire. Aussi, chacune des nations conservait-elle, en dehors des lieux de guerre, sa pleine liberté. Vercingétorix n’est point intervenu dans les affaires particulières des peuples, pour modifier des coutumes ou contrôler le gouvernement. Il ne fut porté aucune atteinte à leur autonomie et à leur intégrité.

Même dans les camps, sur les flancs des villes assiégées, dans les marches militaires, les troupes de chaque nation se formaient à part, sous les ordres de son commandant national, roi, magistrat ou chef de guerre. Tout au plus Vercingétorix s’arrogea-t-il le droit de désigner les titulaires des commandements supérieurs : encore ne le fit-il que pour les corps d’armée qui se constituaient autour de lui ; dans la vallée de la Seine, ce sont les chefs des cités associées qui ont choisi eux-mêmes Camulogène pour général. Dans les contingents nationaux, chacune des tribus dont se composait le peuple avait ses enseignes propres. Les chefs de ces tribus ou les magistrats de ces peuples frappaient monnaie comme à l’ordinaire : il n’y a pas trace certaine de monnaies ni d’institutions fédérales. Le seul lien public des cités est l’obéissance à Vercingétorix.

Mais, dans les conditions présentes, l’union des peuples gaulois pouvait devenir autre chose qu’une conjuration militaire. Elle était le résultat d’un sentiment universel, du désir de la liberté de tous, d’un accord par amour de la Gaule, et une entente de ce genre ne va pas sans la mise en commun des traditions et des espérances. Un esprit collectif se dégagea d’aspirations semblables, il se forma des ferments d’une civilisation d’empire.

La ligue gauloise n’a laissé d’elle, en fait de souvenirs matériels, que les monnaies frappées par Vercingétorix et les autres chefs. On dut au reste en émettre beaucoup, et en peu de temps : l’or a joué un grand rôle dans toutes ces affaires, il fallait payer la plèbe pour s’assurer son courage, payer les grands pour s’acquérir leur fidélité. Les Gaulois ont été de tout temps d’actifs monnayeurs. Si peu explicites que soient ces monnaies, leurs images et leurs légendes, elles nous laissent vaguement entrevoir ce que pouvait devenir l’empire gaulois.

Il n’eût pas été obstinément fermé et hostile à la civilisation gréco-latine : on verra qu’il lui emprunta nombre de principes de la guerre savante, comme le machinisme dans la défense et l’attaque des places fortes, et le système de la castramétation quotidienne. Il eût accepté la suprématie intellectuelle des deux grands peuples voisins ; et même, entre la Grèce et Rome, comme Rome est devenue la plus proche et la plus utile, les Gaulois de maintenant préféraient son enseignement à celui des Hellènes : ils substituèrent, sur leurs monnaies, l’alphabet latin à l’alphabet grec, et c’est en lettres romaines que Vercingétorix fit graver son propre nom.

Nous possédons un peu plus d’une douzaine de pièces au nom de Vercingétorix. Il ne faut pas s’attendre à trouver en elles de ces monnaies de très bon aloi et de frappe élégante, semblables à celles qui ont fait la fortune de la Macédoine ou la gloire d’Athènes. S’il y en a qui sont en bel or jaune, d’autres renferment une proportion trop grande d’argent, et même, parfois, le métal est de qualité si médiocre qu’on a pu le prendre pour du cuivre. Si le poids moyen paraît avoir été de 7 grammes 45, il y a entre la plus lourde et la plus légère un écart de 30 centigrammes, ce qui est beaucoup. Les flans sont épais, les contours irréguliers ; on sent des pièces frappées à la hâte, sous la poussée de besoins urgents. Il y a cependant progrès, et progrès sensible, sur celles des générations qui ont suivi Luern et Bituit. Le dessin, si banal qu’il soit, a une netteté et une précision qui manquent aux types antérieurs ; les figures sont complètes, bien formées, et sobrement tracées dans un champ dégagé. Surtout, l’imitation des pièces grecques, tout en demeurant visible, n’est plus servile ni exclusive : l’esprit de la Gaule a aussi marqué son empreinte sur les monnaies de ce temps.

Sur les siennes, Vercingétorix a un type préféré : au droit, la tête imberbe d’un jeune dieu, dont un Apollon grec a fourni le modèle, mais où les Gaulois pouvaient voir l’image d’un de leurs grands dieux nationaux et peut-être même la figure idéalisée de leur nouveau chef ; au revers, non pas le Pégase exotique ou le bige classique des statères grecs, mais le cheval libre et galopant des plaines arvernes. Sur les monnaies d’autres chefs, apparaissent des symboles chers aux Gaulois, les images de ces animaux, de ces plantes ou de ces objets où ils avaient mis quelque chose de leur âme, et qui peuplaient les rêves de leur imagination ou les fables de leurs poètes. Ici, ce sont l’oiseau sacré quisanglier gaulois guide le cheval, et le lévrier, compagnon familier du coursier de bataille ; là, c’est la lyre qui célèbre les exploits ; et, surtout, c’est l’enseigne militaire au corps de sanglier ou le sanglier lui-même : le sanglier, l’adversaire traditionnel du chef gaulois, mais qui se réconcilie avec lui pour le précéder sur les sentiers de la guerre, et qui fournit aux tribus celtiques les espèces religieuses sous lesquelles elles vont combattre. L’homme et l’animal de la Gaule s’unissaient contre l’aigle, la louve et le soldat du peuple romain.

 

6. Espérances et ambitions d’un empire gaulois.

 

Cette lutte, les Gaulois confédérés ne l’entreprenaient pas seulement pour débarrasser de leurs ennemis les forêts et les campagnes de leur pays. Ils ne voulaient pas seulement rendre la liberté aux soixante peuples sur lesquels César, en 58 et 57, avait appesanti sa main. C’était l’union de toutes les cités de nom gaulois, entre le Rhin et les Pyrénées, qu’ils entrevoyaient dans une lointaine espérance. Leur conjuration devait avoir un lendemain de victoire. Elle inaugurait l’accord de toute la Gaule, elle faisait pressentir un empire ou un royaume de la Gaule : si César ne s’égare point, ces mots ont été prononcés par Vercingétorix ou par son entourage. Il a dû songer à une royauté des Gaules comme à une gloire possible. Certaines de ses opérations militaires, tout en étant très habiles contre les Romains, pouvaient devenir fort utiles à la formation de cet empire, comme la mainmise sur les Bituriges et les Éduens. Au loin, il ne perdait pas de vue qu’au sud des Cévennes et au pied des Alpes habitaient des Volques et des Allobroges, et que, s’ils obéissaient à Rome depuis soixante-dix ans, ils n’en étaient pas moins gaulois, et les anciens alliés des Arvernes au temps de Bituit. La pensée de les délivrer à leur tour a germé chez plus d’un conjuré : Gaulois de Toulouse, de Vienne ou de Gergovie, ne descendaient-ils pas tous d’un même dieu, n’étaient-ils pas parents ou frères ?

On ne comprendra jamais les ambitions et les rêves des chefs gaulois si l’on ne songe à cette parenté sainte que les druides leur avaient enseignée. Quand peuples celtiques veulent s’unir intimement, ils se disent consanguins ou frères : l’alliance politique que les Romains décoraient du nom d’amitié, les Gaulois l’appelaient fraternité, et c’était le signe public d’une commune filiation divine. — Cela, certes, n’empêchait point les haines et les luttes : les Gaulois flottèrent toujours entre la violence de leurs passions qui jetaient l’un contre l’autre, et la séduction de ce rève patriarcal qui les invitait à unir des mains fraternelles. C’était, en temps ordinaire, la race des frères ennemis ; mais, dans leurs moments d’enthousiasme, ils avaient sous leurs yeux, comme disait l’arverne Critogoat, la Gaule tout entière, foyer commun autour duquel circulaient des hommes de même sang.

Cette Gaule, ils ne l’ont pas vue seulement à travers l’espace, mais aussi à travers le temps. Comme corollaire à ce dogme de la fraternité gauloise s’était répandu celui de l’éternité et de la grandeur de la nation. Ils ont établi une solidarité puissante entre toutes les générations qui ont porté le nom gaulois, ils aimaient à parler de la gloire de leurs ancêtres, ils songeaient en combattant aux beaux exemples qu’ils laisseraient à la postérité de leur race. Les Celtes étaient disposés à se croire élus par la providence pour conquérir le monde : ces mêmes espérances de domination universelle que la force des choses a données au peuple romain, leur ont été suggérées par l’ardeur de leur tempérament et l’expansion de leur nature. Elles furent, chez eux, incroyablement tenaces. Plus d’un siècle après la perte définitive de la liberté, en 69 de notre ère, les druides, à la nouvelle que le Capitole brûlait, rappelaient la victoire de l’Allia, et prédisaient que l’empire des choses humaines était promis aux nations transalpines. Devant Avaricum emporté par César (ce qui fut la première des grandes défaites), Vercingétorix déclarait aux chefs qu’il allait réunir en une seule volonté la Gaule entière, et qu’à cette unanimité de la nation le monde lui-même ne pourrait résister. — À ce moment, la Gaule luttait péniblement pour ses places fortes, elle perdait l’une après l’autre les gloires de son passé, les légionnaires allaient gravir les pentes qui menaient à Gergovie, et elle parlait de s’unir pour conquérir la terre : prodige d’utopie d’une race qui vécut toujours dans les folles créations d’une imagination vagabonde ; émergeant à peine des flots de l’infini, elle se laissait encore ballotter par eux.

Mais, si Vercingétorix ne fut point exempt de ces rêveries, elles ne lui firent jamais oublier les réalités contingentes : au milieu des fantaisies de l’idéal gaulois, il s’appliquait à préparer la victoire avec la ferme précision d’une intelligence merveilleusement lucide.

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0
24 mars 2012 6 24 /03 /mars /2012 10:03

            Vercingétorix

 

Chapitre X - L'empire Gaulois.

 

3. Vercingétorix élu chef suprême.

 

Les chefs réunis délibérèrent sur le choix de l’homme qui devait exercer le commandement suprême. Il ne fut pas question de le diviser entre plusieurs. Et, s’il y eut une hésitation sur le nom du chef, elle ne fut que de courte durée. Vercingétorix était désigné d’avance. Il avait donné à la ligue sa première victoire en conquérant Gergovie ; il avait rassemblé les conjurés autour de lui ; il était le fils du dernier Gaulois qui eût commandé à toute la Gaule ; il était le roi de la seule nation qui eût été souveraine sur le nom celtique. Sa valeur personnelle rendait plus visible l’excellence de ses titres. D’elle-même, la Gaule se remit entre les mains du successeur de Bituit. La puissance suprême lui fut offerte du consentement de tous. Il l’accepta.

 

4. Nature de ses pouvoirs.

 

Le pouvoir de Vercingétorix était essentiellement militaire. Hors du pays arverne, il était le chef de guerre des Gaulois confédérés, et rien de plus. C’était l’autorité qu’avait exercée Bituit sur les champs de bataille ; c’était aussi celle que la tradition attribuait à Bellovèse et à Sigovèse, les neveux du roi biturige, lorsqu’ils quittèrent la Gaule à la tête de bandes d’émigrants et à la conquête de terres nouvelles. Elle ne fut peut-être pas sans rapport avec la dictature romaine pour la conduite d’une guerre.

Mais l’action de Vercingétorix était à la fois plus limitée et plus vaste que celle d’un dictateur militaire. Elle était d’abord tempérée par les rapports permanents avec les chefs supérieurs des cités confédérées : il n’était pas dans la nature des Gaulois d’obéir sans condition et sans discussion au général qu’ils avaient élu même à l’unanimité. Nul d’entre les nobles n’était habitué à cette sujétion précise, froide et administrative qu’exigeait de ses préfets l’imperator suprême des Romains. Leur individualité intempérante demeurait rebelle à tous les freins. Il fallait, avant les questions importantes, que Vercingétorix les réunît en conseil ; il fallait, après l’événement, qu’il rendît compte de ce qu’il avait fait. Quand les circonstances étaient critiques, le conseil des chefs de cités fut convoqué chaque jour. Les discussions étaient, on le devine, vives et orageuses, les discours longs et fréquents ; le roi dut céder sur des points où il avait visiblement raison. Une fois même, les accusations de trahison grondèrent ou jaillirent contre lui en pleine assemblée, et il dut prendre la parole, ruser et déclamer, pour se justifier et pour convaincre : de guerre lasse, ce jour-là, il jeta dans la délibération l’offre de laisser à un plus digne le commandement de l’armée gauloise.

Au delà même de rassemblée des chefs, la foule tumultueuse de leurs amis et de leurs clients recevait l’écho de leurs discussions ou leur renvoyait celui de ses propres colères : et ses sentiments submergeaient peut-être les délibérations réfléchies des conseils de guerre. On était sorti depuis trop peu de temps du régime de la tribu pour en avoir perdu la liberté d’allures. Alors Vercingétorix intervenait encore, et il n’avait pas toujours le dessous dans un engagement direct avec les passions d’une multitude. Je ne suis pas sûr qu’il ne préféra pas, parfois, substituer aux conciliabules mesquins d’un parlement militaire les décisions rapides d’une foule enthousiaste. Sans la convoquer sans doute, il la laissait venir et s’agiter, jusqu’au moment où, parlant à son tour, ses harangues vibrantes s’achevaient dans le double tonnerre des acclamations humaines et des armes bruyamment secouées. L’armée de Vercingétorix ressemble, à peu de chose près, à une armée féodale, où la troupe des chevaliers déborde sans cesse sur le conseil des chefs, et où la marche régulière du commandement est tour à tour entravée par les intrigues des barons jaloux, ou accélérée par la brusque poussée d’une émeute soldatesque. Vercingétorix n’arrivait à gouverner qu’en mêlant l’astuce et l’éloquence. L’art oratoire fut un des éléments de sa puissance.

Mais, comme les effets n’en sont toujours ni certains ni rapides, le roi des Arvernes n’hésitait pas, le cas échéant, à imposer sa volonté avec une impitoyable brutalité, que les coutumes romaines n’auraient point tolérée chez le dictateur. Il avait droit de vie et de mort sur ses subordonnés. Quand il ne commanda pas par la persuasion, il sut le faire par la crainte. Dès le jour où il prit le pouvoir, il s’assura des gages pour n’être point abandonné : il savait le peu que durait la volonté d’un Gaulois, avec quelle promptitude les résolutions étaient, chez sa race, prises et oubliées ; il lui fallait des garanties au consentement de la Gaule et à la fidélité de la conjuration. Suivant l’usage de ces nations, chacune des cités confédérées lui livra des otages, qu’il garda près de lui, sous sa main. Aussi bien n’en avait-on pas donné à César ?

Parmi les chefs réunis autour de lui, il y avait des rivaux, des jaloux, des timorés, qui n’attendaient que l’occasion de devenir des traîtres. Peut-être, dès le début des indiscrétions furent-elles commises, des perfidies furent-elles fomentées. Mais, en ce moment, toute hésitation était criminelle. Il fallait se hâter, commander très vite et très ferme : chaque jour rapprochait du printemps et du retour de César. Vercingétorix fit de son pouvoir, contre ses adversaires, un instrument de terreur. Il étala à leur intention toutes ces variétés de supplices que recherche l’imagination des peuples barbares. Les dieux gaulois, à la veille des grands combats et des périls nationaux, recevaient de leurs sujets de formidables holocaustes de victimes humaines, et ils préféraient, entre toutes les offrandes sanglantes, les supplices des criminels : Vercingétorix fit en leur honneursacrifice de royales hécatombes avec les ennemis de la liberté. Des bûchers s’allumèrent où furent sacrifiés les traîtres à la patrie et à la race ; les appareils de torture grincèrent contre les parjures et les déserteurs ; ceux qui étaient les moins coupables furent éborgnés ou essorillés, et, rendus à leurs cités ainsi mutilés, ils allèrent leur montrer la marque éternelle de la colère des dieux et de la puissance du nouveau chef qui vengeait la Gaule.

Vercingétorix exerçait toutes les fonctions administratives attachées à sa qualité de général suprême. Il désigna le contingent d’hommes et de chevaux que les alliés devaient lui amener, et le plus tôt possible. Il indiqua la quantité d’armes que chaque peuple avait à fabriquer, et le jour où la livraison serait faite. Et, dans tous les ordres qu’il donna, il sut montrer la précision et la rapidité d’un organisateur habile. César, qui avait le goût des choses bien conduites, l’admirait en cela, et il a décerné à Vercingétorix cet éloge lapidaire qu’eût recherché un imperator romain de vieille lignée : il fut aussi actif que sévère dans son commandement, summæ diligentiæ summam imperii severitatem addit.

Enfin, Vercingétorix eut le droit de négocier pour amener les neutres ou les retardataires à la cause de la liberté. Il commença ses pourparlers diplomatiques avec la même diligence que ses opérations militaires ; mais il semble que dans ce cas il ait manœuvré plus à sa guise, très discrètement, à l’insu du conseil des chefs. Il choisissait, pour porter ses messages, des hommes fort habiles, beaux parleurs, discuteurs retors, d’allures engageantes, courtiers intelligents d’amitiés politiques. Ils avaient ordre de multiplier les promesses et les présents. Un envoyé de Vercingétorix partait largement pourvu d’or, prêt à acheter la conscience des chefs ou la connivence de leurs clients ; il offrait sans doute aux ambitieux l’appui du roi contre leurs adversaires politiques. C’est ainsi que plus tard l’on acquit d’un seul coup, chez les Éduens, le vergobret et quelques chefs des principales familles : ce qui dut coûter très cher. Parmi les nobles des cités douteuses, ce fut parfois auprès des plus jeunes que l’or et les séductions trouvèrent le meilleur accueil : plus avides d’aventures et de gloire, pressés de commander, jaloux d’égaler leurs aïeux, les chefs adolescents forcèrent souvent la main, comme avait fait Vercingétorix lui-même, à l’aristocratie assise et retraitée qui s’habituait à César. La révolte de la Gaule ressembla par instants à une folie de jeunesse.

Tous ces éléments d’action et d’influence dont fut faite l’autorité de Vercingétorix, la diplomatie, la dureté du commandement, l’éloquence, la netteté de la décision, nous les connaissons par le livre de Jules César. Mais n’eut-il pas prise sur les hommes par d’autres moyens, que César passe sous silence ? N’a-t-il pas eu recours au principal ressort qui les faisait alors obéir, la crainte de la divinité ? Il est invraisemblable qu’un chef de l’Occident n’ait pas essayé de la complicité des dieux. Marius en Provence avait eu sa prophétesse, Sertorius en Espagne eut sa biche, Civilis en Germanie aura Velléda : soyons sûr que Vercingétorix a eu près de lui des agents qui le mettaient en rapport avec le ciel. Parmi ces paysans qui le suivaient, venus des forêts d’Auvergne et de Combrailles, il y en eut, j’en suis convaincu, auxquels il inspira un fanatisme sacré. Les Gaulois répugnaient moins encore que les Romains à faire un dieu de leurs rois ; ils seront les premiers en Occident à adorer la divinité d’un Auguste et d’une Livie ; le roi sénon Moritasg a été, semble-t-il, regardé comme un dieu, a eu ses dévots et son portique. Plus tard, après la mort de Néron, dans les landes de la Sologne bourbonnaise, le boïen Maricc soulèvera la plèbe rurale à l’exemple du fils de Celtill, et prendra les titres de champion de la liberté et de dieu, assertor Gallianim et deus, Vercingétorix, lui aussi, mérite le premier de ces titres ; je ne serais pas étonné que d’autres lui eussent donné le second.

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0
21 mars 2012 3 21 /03 /mars /2012 06:45

             Vercingétorix

 

     Chapitre X - L'empire Gaulois.

 

2. Quels peuples prirent part à la conjuration.

 

Voici les peuples et les chefs qui se firent représenter auprès de Vercingétorix.

Les Arvernes finirent sans doute par accepter sa royauté. Mais ce ne fut pas sans arrière-pensée chez quelques-uns. Parmi les chefs qui entourent Vercingétorix, Épathnact se ralliera assez vite à César et deviendra un très grand ami de Rome. En revanche, le roi des Arvernes a près de lui deux vaillants auxiliaires : son cousin Vercassivellaun, fils de la sœur de sa mère ; Critognat, un des hommes les plus nobles et les plus influents du pays, patriote ardent et écouté.

Les Carnutes ont pour chefs les deux conjurés de Génabum : Gonconnetodumn et Gutuatr. C’est celui-ci, surtout, qui fut regardé comme le boute-feu de la révolte. Jusqu’à son dernier jour, il inspirera aux Romains une haine inexpiable. Ils ne furent pas éloignés de lui attribuer tous leurs malheurs. Vercingétorix a été pour eux un adversaire, Guluatr, une sorte de génie malfaisant, exécuteur d’œuvres sanglantes. Peut-être était-il revêtu de quelque sacerdoce, qui en faisait l’homme des sacrifices humains.

Au sud-ouest des Arvernes, les Cadurques, leurs clients traditionnels du Quercy, avaientvercingetorix_statere.jpg envoyé leur chef favori Lucler : c’était peut-être l’homme le plus riche de sa nation, il avait dans sa clientèle une ville entière, Uxellodunum, aussi grande et presque aussi forte que Gergovie ; mais, surtout, c’était l’homme le plus entreprenant qu’on pût voir, le moins capable de désespérer, prêt à toutes les audaces d’actes et de projets, désigné pour les chevauchées les plus aventureuses. — Dans cette même région, d’autres voisins immédiats des Arvernes, les Lémoviques du Limousin, apportèrent à la ligue le contingent d’une race à peine moins robuste que celle d’Auvergne : la nation tout entière y adhéra, sous les ordres de Sédulius, à la fois son magistrat et son chef de guerre. — Chez les Pictons du Poitou, au contraire, il n’y eut pas unanimité : une partie seulement d’entre les tribus accepta le mouvement, une des villes principales, Lémonum (Poitiers), demeura fidèle aux Romains.

En revanche, tout le Nord-Ouest de la Gaule, sans exception, depuis la Loire jusqu’à la Seine, se rallia publiquement à l’insurrection : ce qui fut dû peut-être à l’influence qu’exerçaient les Carnutes dans ces contrées sauvages, belliqueuses et dévotes. Là étaient les Aulerques (Le Mans, Jublains, Évreux), avec leur vieux Camulogène, le robuste vétéran des guerres gauloises, l’un des généraux les plus expérimentés du pays celtique ; les Andes (Anjou), qui avaient pour chef militaire Dumnac, un opiniâtre et un entêté, à qui il sera impossible de demander grâce ; les Turons ou gens de la Touraine ; et enfin toutes les peuplades qui formaient la ligue armoricaine, marins et soldats des côtes de l’Océan breton et normand. Sur ces dernières, toute conspiration pouvait compter ; elles n’avaient cédé en 57 que devant les légionnaires ; elles avaient commencé dès l’année suivante la série des révoltes ; au temps de l’alerte d’Indutiomar, leurs armées s’étaient trouvées subitement prêtes à entrer en campagnes. Comme les Carnutes et comme les Belges, les peuples d’Armorique ne savaient point guérir de l’indépendance. Grâce à leur appui, la Gaule soulevée était maîtresse de la mer, et pouvait communiquer avec ses frères de la Bretagne insulaire.

Au Nord, les Sénons avaient d’autant plus adhéré au mouvement qu’ils l’avaient devancé. Un de leurs chefs, Drappès, avait fait sur leur territoire, presque sous les yeux de Labienus, la même besogne que Vercingétorix autour de Gergovie. Il s’était mis à la tête d’esclaves échappés et de vagabonds, il avait appelé autour de lui les exilés des cités, otages fugitifs qui s’étaient dérobés à la colère de César, et il avait ainsi rendu une armée au peuple sénon, malgré les exécutions de l’année précédente et la présence de six légions. C’était un homme de la même trempe que Lucter et Dumnac.

Enfin, dans le voisinage des Sénons, les Parisiens, leurs alliés et associés de jadis, encore incertains l’année précédente, firent cette fois cause commune avec eux. Cela avait une très grande importance pour l’avenir militaire de la confédération. Lutèce, leur principale ville, n’était qu’une bourgade isolée dans une petite île de la Seine, et ils étaient eux-mêmes une tribu de force médiocre. Mais ils formaient, au Nord, l’avant-garde de la Gaule proprement dite en face des peuples belges ; leur territoire, qui au Sud était limitrophe de ceux des Carnutes et des Sénons, touchait au Nord à ceux des Suessions et des Bellovaques, les plus vaillantes des nations septentrionales : le jour, déjà espéré des conjurés, où la Belgique se joindrait à eux, Lutèce deviendrait le point naturel de ralliement où les confédérés de ce pays s’uniraient à ceux de la ligue arverne ; c’était chez les Parisiens que la Seine était rejointe par les deux grandes voies de la Belgique, la Marne et l’Oise, et leur ville était à égale distance de l’Océan, le long duquel veillaient les Armoricains, et de la forêt de la Meuse, où errait encore Ambiorix.

Les nations conjurées représentaient seulement la moitié de la Gaule conquise par César : c’étaient presque toutes celles de l’Ouest et du Centre, et probablement celles qui avaient jadis soutenu le parti arverne. L’ancien parti éduen n’y était représenté que par les Sénons. Dans le Sud, les Santons restaient attachés, ainsi qu’une partie des Pictons, au peuple romain ; sauf les Cadurques, les peuples des montagnes, malgré d’anciens liens de clientèle avec les Arvernes, attendaient d’avoir la main forcée : le voisinage de la province romaine les effrayait. — Au Nord, on pouvait faire fond sur les Trévires et sur bien d’autres Belges, le jour où la présence des légions les inquiéterait moins, et où Commios l’Atrébate, guéri de sa blessure, pourrait satisfaire sa rancune contre Labienus et César. Mais il fallait compter avec la jalousie ou l’hostilité des Éduens et des Bituriges leurs alliés, dont les territoires s’étendaient depuis la Saône jusqu’à la Vienne et coupaient presque en deux tronçons les pays confédérés. — À l’Est enfin, si les Séquanes et les Helvètes étaient incertains, les Rèmes et les Lingons ne trahiraient jamais la foi promise à César : chez ces deux peuples, la haine de l’indépendance gauloise était passée à l’état de vertu.

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0
17 mars 2012 6 17 /03 /mars /2012 00:00

             Vercingétorix

 

     Chapitre X - L'empire Gaulois.

 

1. Jusqu’à quel point le soulèvement s’explique par un mouvement démocratique.

 

Vercingétorix et les Carnutes réalisaient donc le dessein que, dix ans auparavant, avaient conçu Orgétorix l’Helvète et Dumnorix l’Éduen, et auquel n’avaient cessé de songer, malgré les incertitudes du moment, les patriotes gaulois. Car, en dehors des hommes qui ne voyaient que l’intérêt de leur classe, comme Diviciac, de leur pouvoir, comme Cingétorix, de leur cité, comme les Rèmes, d’autres rêvaient d’une patrie collective, d’une grande Gaule, libre et fédérée, image peut-être de cette fraternité celtique dont parlaient les druides.

La gloire d’avoir soulevé la Gaule n’appartient en propre à aucune classe d’hommes, à aucun parti politique. Elle ne revient ni à l’aristocratie, ni à la démocratie.

Ces deux mots sont, à vrai dire, trop savants pour garder toujours leur raison d’être au delà des Alpes. À force d’avoir sous les yeux les misères politiques de la Grèce et de Rome, les anciens et les modernes ont trop souvent voulu que la Gaule leur ressemblât. Mais la Celtique de César différait trop de l’Hellade de Polybe pour se laisser absorbervercingetorix-livre.jpg par les mêmes amours-propres de parti. On ne peut appliquer à une nation pleine d’hommes, jeune et débordante, vivant d’action et de sentiments plus que de logique et de systèmes, les mêmes théories qu’à la Grèce, vieux peuple, pauvre en hommes et riche en idées, usé par cinq siècles de lois écrites et de scolastique politique. En réalité, les principes comptaient en Gaule beaucoup moins que les personnes.

Chaque nation n’y était pas divisée sans remède entre deux classes d’hommes et deux notions de gouvernement, l’aristocratie et la démocratie, la noblesse et la plèbe, les riches et les pauvres. Ces deux classes existaient sans doute, mais elles ne correspondaient pas toujours à deux formules différentes de la vie publique et des intérêts sociaux.

La plèbe des cités gauloises ressemblait moins à celle des Gracques et de Cléon qu’à celle des Tarquins et de Servius Tullius. Elle n’a pas d’organisme propre, elle n’existe pas comme ordre politique, elle est diffuse et amorphe, flottant entre les divers clans, morcelée entre les principaux chefs. Elle ne représente d’autre parti que celui de ses patrons. Si certains des nobles sont regardés comme des démagogues, c’est parce qu’ils gagnent ou achètent le plus de plébéiens possible ; mais ce n’est pas la démocratie qu’ils veulent établir, c’est leur autorité personnelle, et s’ils ont contre eux l’aristocratie, cela veut dire que les autres chefs s’opposent à la monarchie de l’un d’eux. Tout se ramène peut-être, en fin de compte, à des conflits de personnes ou de familles.

Le mouvement national de 52 n’est donc pas la revanche de la démocratie gauloise sur l’aristocratie sénatoriale, complice de César. Assurément, il y a eu un sentiment semblable chez quelques peuples, et notamment chez les Arvernes, où la victoire des patriotes mit fin au gouvernement de l’oligarchie, amie du proconsul : mais, même à Gergovie, Vercingétorix se regarda sans doute moins comme le champion de la plèbe que comme le vainqueur des familles rivales. Ailleurs, chez les Sénons et les Carnutes, c’était au contraire une coalition de chefs qui avaient brisé la suprématie de l’un d’eux, tyrannie locale bourgeon de la tyrannie de César.

Ne réduisons pas la révolte de la Gaule aux mesquines proportions d’une affaire de parti, comme a été celle de Capoue, lorsqu’un chef démocratique y appela Hannibal en humiliant le sénat local. César, qui n’eut aucun intérêt à embellir ses adversaires, ne leur fait parler que de patriotisme et de liberté. Laissons-leur les sentiments dont il leur a prêté le langage.

Toutefois, si l’on veut, pour expliquer cette révolte, chercher d’autres causes que de nobles ambitions, on pourra simplement dire qu’elle triompha par l’union des deux peuples les plus désignés pour jouer en Gaule un rôle universel, qui avaient le plus d’influence religieuse ou de gloire politique, qui étaient le cœur du territoire ou le centre des souvenirs, les Carnutes et les Arvernes.

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0
14 mars 2012 3 14 /03 /mars /2012 08:45

             Vercingétorix

 

      Chapitre IX - Le soulèvement de la Gaule.

 

7. Soulèvement. Vercingétorix, roi à Gergovie.

 

Le jour fixé, deux chefs carnutes, Guluatr et Conconnelodumn, hommes d’audace et d’aventure, les risque-tout de l’indépendance, pour parler comme César, donnent le signal, réunissent leurs hommes et entrent dans Génabum. Ils vont droit aux maisons où habitaient les citoyens romains, les égorgent sans trouver de résistance et font main basse sur leurs biens.  Cita, le chef de l’intendance de César, périt comme les autres. La révolte commençait en Gaule ainsi qu’elle débutait toujours dans les pays soumis à Rome : le premier sang versé était celui des trafiquants italiens, avant-coureurs de la servitude et ses premiers bénéficiaires.

Cela se fit au lever du soleil, un matin de janvier. Des crieurs, tout autour de Génabum, avaient été disposés à travers champs et forêts jusqu’aux extrémités de la Gaule. De relais en relais, la nouvelle gagna le même jour les cités voisines. Et telle était la rapidité et le nombre de ces étapes vocales qu’avant huit heures du soir, à 160 milles de là, Vercingétorix et  les hommes de l’Auvergne reçurent le signal : il traversa la Gaule avec la vitesse du vent, faisant cinq grandes lieues à l’heure. En quarante-huit heures, tous les  conjurés de la Gaule entière durent entendre le mot d’ordre de la liberté.

Vercingétorix était à Gergovie. Au premier cri venu de Génabum, il fit prendre les armes à son clan, qu’il n’eut pas de peine à entraîner pour la liberté. Mais un obstacle l’arrêta sur-le-champ. Gobannitio son oncle et les  autres chefs, tenus sans doute jusque-là à l’écart du complot, le désavouent dès qu’ils le connaissent. On court aux armes de part et d’autre. Vercingétorix et les siens sont les plus faibles, et jetés hors de Gergovie.

Mais ce ne fut, pour les amis de César, qu’un court répit. Dans la campagne, où la dureté de la saison  suspendait les travaux des champs, le fils de Celtill n’eut point de peine à grossir sa troupe de nombreux partisans. La plèbe rurale, les chemineaux de l’hiver, les  misérables fugitifs que des années de luttes politiques avaient éloignés de la ville, toutes ces ruines humaines de la misère et de la discorde, se réunirent à Vercingétorix. Au nom de la liberté de la Gaule, beaucoup de ces prolétaires s’insurgeaient sans doute par haine de l’aristocratie dominante qui les exploitait dans les chantiers et sur les terres.

En quelques jours, peut-être seulement en quelques heures, le fils de Celtill eut, derrière ses propres hommes, toute une armée, groupée par le souvenir de son père, le besoin de combattre, l’éloquence de sa parole, le prestige de sa cause : car il l’exhortait de s’armer pour la défense de la liberté de toute la Gaule, et il en était le chef et l’orateur. Alors il put rentrer sans peine à Gergovie ; et, à leur tour, Gobannitio et les autres chefs furent chassés de la ville et expulsés du pays.

Revenu en vainqueur dans la cité de son père, Vercingétorix fut acclamé comme roi par ceux qui s’étaient dévoués à sa fortune. Il accepta le titre, il prit le pouvoir. Ce n’était sans doute qu’une tyrannie tumultuaire, à peine plus qu’une démagogie militaire, et, beaucoup de nobles ses congénères ont dû hésiter à la reconnaître. Mais la noblesse quasi royale de sa lignée, la gloire, de son père Celtill, la sainte conjuration de la Gaule donnaient à cette royauté la consécration légitime aux yeux des hommes et des dieux. Pour la première fois depuis la défaite de Bituit, la monarchie arverne était reconstituée. C’était le premier triomphe de la Gaule révoltée.Gravure-l-appel-de-Vercingetorix.jpg

À la même date, à l’arrivée du signal carnute, les autres chefs confédérés avaient fait prendre les armes à leur peuple, égorgé les citoyens romains, appelé les milices au lieu ordinaire de concentration, mis en état les places fortes, accumulé l’or et l’argent dans les trésors et les armes dans les arsenaux. Une fièvre intense agita subitement la Gaule.

Une fois maître de Gergovie, Vercingétorix envoya des députés annoncer sa victoire à tous les chefs de la conspiration ; son message leur rappelait les stipulations de la grande assemblée, les adjurait de demeurer fidèles au serment prêté, les convoquait sur les terres arvernes. Sur-le-champ, les chefs gaulois se mirent en marche, à étapes forcées, pour se réunir à Vercingétorix et s’entendre avec lui sur les résolutions suprêmes. Il y avait à peine quinze jours qu’ils s’étaient séparés : deux semaines avaient suffi aux cités gauloises pour jurer d’être libres et pour le devenir (fin janvier 52).

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0
10 mars 2012 6 10 /03 /mars /2012 10:11

                                                        Vercingétorix

 

      Chapitre IX - Le soulèvement de la Gaule.

 

5. Progrès de la conjuration : intervention de Commios et de Vercingétorix.

 

Tels étaient les propos qui s’échangeaient dans les grandes réunions d’hommes, les jours de  marchés et les jours de fêtes. L’hiver, la population est moins dispersée dans les champs, les fêtes sont plus nombreuses, les familles se rapprochent davantage. Les chefs, parents, amis ou complices d’Acco et des meurtriers de Tasgei, profitaient de ces assemblées pour travailler leurs clients et la foule. Deux surtout parlèrent et agirent : Commios en Belgique et Vercingétorix dans la Gaule centrale.Commios

Commios l’Atrébate, roi chez les Morins, répudiait lui aussi cette amitié de César qui lui avait valu sa royauté. Il se faisait le chef du complot dans le Nord, où son nom était fort connu. C’était un homme intelligent, adroit, actif, quoique un peu trop agité pour l’œuvre qu’il s’agissait de mener à bonne fin. Ses démarches dans les cités voisines firent surprendre son secret par Labienus ; il se laissa attirer dans une embuscade, d’où il sortit grièvement blessé, réduit à l’impuissance, et la conjuration fut ajournée en Belgique.

Le légat de César paraît avoir été moins au courant de ce qui se passait entre la Seine et les montagnes du Centre. Vercingétorix allait et venait sans être inquiété, et sa parole ardente et fière réveillait l’amour de l’antique liberté.

Peu à peu l’entente se fit ou se renoua entre les principaux chefs. Des réunions plus  nombreuses, plus mystérieuses et plus décisives furent tenues dans les bois ou dans des retraites invisibles, et l’on y parla nettement des moyens de soulever la  Gaule. De sûrs messagers circulèrent rapidement entre toutes les cités du Centre et de l’Ouest, de Génabum à Gergovie, de Lutèce jusqu’en Armorique  (décembre 53).

 

6. Assemblée générale des conjurés.

 

Enfin, le rendez-vous général fut fixé dans une de ces forêts profondes où la Gaule conjurée pouvait délibérer sans autre crainte que celle de ses dieux. Tout contribua à donner à cette assemblée une poignante solennité. Les principales  nations étaient représentées par les plus nobles de leurs chefs ; les hommes, au fond de ces bois, se trouvaient plus près de la divinité ; on avait apporté les étendards militaires des tribus, signes aimés de leur gloire d’autrefois et symboles de leur génie éternel.

On se mit aisément d’accord sur les points essentiels. — Le  soulèvement devait avoir lieu sur-le-champ, en plein hiver, pendant que César, ignorant tout, était séparé de ses légions : en son absence, les légats n’oseraient point bouger, lui-même craindrait de revenir sans une armée pour escorte. Pourrait-il même quitter Ravenne, où il se trouvait en ce moment ? D’étranges nouvelles venaient d’arriver d’Italie : Clodius, l’ami de César, avait été tué (30 décembre 53) ; l’incendie ravageait le forum, la république était en danger ; le sénat armait des légions, sans doute contre le proconsul. Ces nouvelles, défigurées par la distance et l’exagération habituelle aux Gaulois, leur donnaient une excitation de plus, achevaient de les affermir dans leur décision. — César pourrait être pris entre deux adversaires, le sénat et la Gaule, il fallait, par un coup de main, lui couper la route des camps. La prise d’armes devait avoir lieu, à quelques heures près, le même jour dans toutes les cités conjurées.

Il fallut décider alors quelle nation et quels chefs auraient le périlleux honneur de donner le signal. On fit de belles promesses à ceux qui voudraient, au péril de leur vie, se dévouer à la liberté de la  Gaule. Les Arvernes ne pouvaient être appelés à ce rôle, puisque les chefs de la nation, Gobannitio et les autres, étaient hostiles au parti des patriotes. Les Carnutes, au contraire, étaient tout désignés pour le remplir : ils étaient, depuis deux ans, entraînés contre César sans retour possible ; leur territoire étant au centre de la Gaule, le signal qu’ils feraient arriverait en même temps à toutes les nations conjurées. Ils acceptèrent  d’eux-mêmes de commencer le combat, et de faire la première libation de sang romain.

Il est probable qu’on agita enfin la question du commandement suprême. Peut-être promit-on dès lors à Vercingétorix de rendre la suprématie au peuple arverne, s’il parvenait à le rendre à la cause de la liberté.

Les Carnutes avaient expérimenté par deux fois l’humeur inconstante de leurs compatriotes : ils demandèrent des garanties, pour n’être pas abandonnés dans cette aventure capitale. L’usage était en Gaule de laisser des otages entre les mains des chefs envers lesquels on s’engageait : mais à le faire maintenant, on eût risqué d’ébruiter le complot. Alors, et toujours sur la proposition des Carnutes, on remplaça le lien corporel des otages échangés par le lien religieux du serment collectif. — Les étendards sont approchés et réunis en faisceau, ce qui est le symbole de l’entente des tribus associées : les chefs les entourent, et, les mains étendues vers ces témoins des patries conjurées, ils prêtent serment de répondre au signal donné. — C’était la plus puissante des cérémonies, l’acte mystérieux et redoutable d’une fédération sacrée. Les chefs, désormais, n’appartenaient plus qu’à leurs dieux, gardiens de la cause et du serment.

Des remerciements  furent votés aux Carnutes. Le jour précis de la révolte fut fixé. On arrêta sans doute un système de signaux et de crieurs pour mettre ce jour-là Génabum en  communication rapide avec le reste de la Gaule. Puis on se sépara. Vercingétorix, à Gergovie, attendit le mot d’ordre.

Pendant ce temps. César, à Ravenne, suivait avec inquiétude les événements de Rome. C’était le fort de l’hiver. Les fleuves débordés avaient détruit les routes des plaines ; les sentiers des montagnes disparaissaient sous la neige ; les ruisseaux étaient pris par la glace ; les Alpes et les Cévennes étaient devenues impraticables, et leur double muraille fermait la Gaule à César (52, milieu de janvier).

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0
7 mars 2012 3 07 /03 /mars /2012 09:16

                Vercingétorix

 

     Chapitre IX - Le soulèvement de la Gaule.

 

3. Campagne de 53. Départ de César.

 

Mais, en mars 53, le signal fut encore donné trop tôt : aucune autre nation du Centre ne se trouva en mesure de suivre l’exemple des Éburons et des Trévires, des Sénons et des Carnutes.

César agit avec cette rapidité de décision qui est le trait distinctif de sa nature. Il ne laissa pas au mouvement le temps de s’étendre vers le Sud. L’assemblée de la Gaule à peine réunie, à Samarobrive, et l’absence des révoltés une fois constatée, il la déclare suspendue, la renvoie à Lutèce chez les Parisiens, et se dirige à grandes étapes vers le territoire des Sénons. La marche fut si prompte, qu’ils n’eurent même pas le temps de se réfugier dans leurs places fortes. Ils firent leur soumission, les Carnutes de même : les Éduens intercédèrent pour ceux-là, les Rèmes pour ceux-ci. César se fit livrer des otages par chacun des deux peuples, et les choisit parmi les plus compromis : mais il réserva toute autre décision. Il revint ensuite à Lutèce, et tint une assemblée, où il fixa le contingent de cavalerie que la Gaule devait lui fournir pour la prochaine campagne.

Alors, disent les Commentaires, la Gaule centrale étant pacifiée, César n’eut plus de pensée et de volonté que pour s’acharner contre les Trévires et les Éburons. Une guerre inexpiable commença. Labienus écrasa encore les Trévires, et ce qui restait de la nation fut donné à Cingétorix, l’ami du peuple romain. César traqua les Éburons comme des bêles fauves, et pour les anéantir plus sûrement, il sembla convier les Germains eux-mêmes à prendre part à la curée. Mais Ambiorix échappa, les Germains maltraitèrent moins les Éburons que les hommes de César, et ce fut avec un sentiment de dépit que celui-ci ramena ses légions à Durocortorum (Reims).

Là se réunit l’assemblée d’automne. Les événements de l’année n’avaient point disposé César à la clémence. Il consacra cette session à instruire l’affaire des Carnutes et des Sénons : il ne fut pas question de pardon et d’oubli. Acco, le chef des conjurés sénons, fut condamné à la peine capitale, et César prit soin qu’il fût exécuté à la manière romaine. D’autres otages s’étaient enfuis avant le jugement : ils furent condamnés à l’exil. Puis l’assemblée fut congédiée.

La campagne militaire et diplomatique de l’année 53 était achevée. Il n’y avait plus d’hommes en armes en deçà du Rhin, sauf Ambiorix et ses quatre compagnons : tout le monde avait obéi à la réunion d’automne. La Gaule entière était cette fois, écrivait César sur ses tablettes, tranquille et apaisée, Il désigna les campements d’hiver de ses dixCampement-romain légions : deux furent logées près des Trévires, sur l’Aisne, la Meuse ou la Moselle, surveillant la frontière de la Germanie et les retraites d’Ambiorix. Le gros de l’armée fut déplacé vers le Sud, dans le bassin de la Seine : six légions à Sens, deux autres plus bas encore, chez les Lingons du pays de Langres et de Dijon ; Gaius Fufius Cita, chevalier romain, fut envoyé à Génabum (Orléans), pour diriger l’approvisionnement des camps romains. Labienus, le plus capable et le plus élevé en grade des lieutenants de César, fut chargé de veiller au salut de l’armée, pendant l’absence du proconsul.

Sauf le corps qui avoisinait les Germains, les légions romaines se trouvaient sur la route directe qui menait du Nord en Italie, comme si César, après six années de campagnes, voulait déjà leur montrer le chemin du retour. Lui-même prit cette route, franchit les Alpes, arriva sur les bords du Pô.

L’hiver survenait, les forêts celtiques se dépouillèrent, et les Gaulois virent reparaître la verdure éternelle des guis aux rameaux des arbres dénudés (novembre 53).

 

4. Bilan de l’œuvre de César en Gaule ; motifs de mécontentement.

 

Presque chaque année, à l’entrée de l’hiver, Jules César avait annoncé de même la pacification de la Gaule. Mais jamais il n’y avait cru davantage, jamais il ne se trompa plus complètement.

À force de ne voit dans la Gaule que des cités jalouses et des partis ennemis, il s’était persuadé qu’elle était plus incapable que la Grèce même de s’entendre contre l’étranger ; il se fit illusion sur la force et la nature des sentiments des vaincus, sur la durée et l’étendue de leurs colères. Son attitude pendant l’hiver qui commence est d’une étrange imprudence. Il ne se doute de rien, son service d’espionnage, si bien fait l'année précédente, ne lui donne aucun renseignement essentiel. Ses légats demeurent immobiles et tranquilles dans leurs campements ; s’il lève des troupes en Cisalpine, c’est contre ses ennemis du sénat. De Langres ou de Dijon, où campent ses légions les plus proches, jusqu’à Lucques ou Ravenne, où il va s’installer, il y a 150, 200 lieues et davantage, plus d’une semaine de chevauchée rapide, et pas un détachement important pour garder les communications. Les dix légions elles-mêmes, ramassées entre les plaines de la Champagne et le plateau de Langres, ne commandent pas sur plus d’un dixième de la Gaule. Ce qui peut se passer en Auvergne, sur la Loire ou en Armorique, leur échappe complètement. César ne prévoit pas l’imminence d’un mouvement général ; il le juge impossible, matériellement et moralement.

Car c’est le propre des ambitions universelles de méconnaître la valeur du patriotisme, la force de l’esprit national. Napoléon se brisa à vouloir briser les peuples. César se perdit deux fois par mépris ou ignorance des sentiments d’une nation : lorsque, dictateur à Rome, il crut qu’il pouvait y être roi ; lorsque, proconsul dans la Gaule, il la crut soumise le jour où elle fut silencieuse.

À cette heure où il ignorait le plus ce qui se faisait en Gaule, les Gaulois dressaient le bilan de ce que César leur avait apporté. — L’aristocratie l’avait accueilli, et il lui avait imposé un roi chez les Carnutes, chez les Sénons et ailleurs. Les Éduens lui avaient donné l’alliance de la Gaule, et il avait pris la présidence de l’assemblée, et il avait grandi, contre eux, la puissance des Rèmes. Il s’était dit le sauveur des Séquanes, et il avait laissé les Rèmes encore leur dérober leur clientèle. Les plus grands chefs étaient morts, et non pas tous sur les champs de bataille : Acco, Indutiomar, Dumnorix, le plus populaire de tous. L’action néfaste de César avait détruit des sénats entiers, les uns massacrés, d’autres frappés de proscription. Les nobles traînaient à travers les campements leurs tristesses d’otages éternels. Cette superbe cavalerie qui était l’ornement de la Gaule s’était usée dans des chevauchées sans gloire en Bretagne et en Germanie. Pour ménager ses fantassins légionnaires. César exposait ses auxiliaires gaulois aux principaux dangers. Ses commis aux vivres drainaient les blés et les fourrages ; les marchands romains commençaient dans les grandes villes leur besogne d’accapareurs et d’usuriers. César était venu pour délivrer la Gaule : il y tenait ses assises à la Romaine. Il était venu pour chasser les Germains : et, dans l’été qui venait de finir, il leur avait presque ouvert la frontière pour satisfaire sa haine contre Ambiorix. Que de contradictions entre ses premières paroles et ses derniers actes !

Ceux qui énuméraient ainsi les actions de César rappelaient aussi le passé de la Gaule, cette liberté dont elle avait été si fière jusqu’à l’arrivée des Romains, celte gloire militaire dont le monde entier avait tremblé. Mourir pour mourir, il valait mieux que ce fût les armes à la main, contre l’ennemi national. Et puis, était-on sûr de ne point revivre après ce qu’on appelait la mort ?

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0
3 mars 2012 6 03 /03 /mars /2012 09:51

                                                          Vercingétorix

 

      Chapitre - Le soulèvement de la Gaule.

 

2. De intervention de la religion et des druides dans le soulèvement général.

 

Le nom des Carnutes doit attirer notre attention sur les druides. Ont-ils, eux aussi, dénoncé la guerre à César, ou se sont-ils tenus, eux et leurs dieux, dans la neutralité ? Quelle a été, depuis l’arrivée jusqu’au départ du proconsul, l’attitude de l’aristocratie religieuse en face du peuple romain ?

 À ces questions, nul ne pourra jamais répondre que par des conjectures. On ne trouvera pas la moindre allusion, dans les Commentaires de César, à un rôle joué par la religion dans la guerre de la Gaule ; et les autres historiens, plus ou moins influencés par lui, imitent sur ce point sa réserve.

Ce silence doit être voulu. César a vécu pendant quelques mois auprès du druide Diviciac ; il en a fait son confident et son conseiller dans des causes délicates : pas un instant il n’a mentionné sa qualité de prêtre. Il a prêté aux chefs gaulois de beaux et longs discours : il évite de leur faire prononcer les noms des dieux. Une seule fois, dans le cours des grandes révoltes, nous nous apercevons qu’ils pensaient à la divinité en combattant, et c’est en lisant le livre des Commentaires qui n’est point écrit par César.

Le proconsul a la ferme volonté de tenir les puissances religieuses à l’écart du récit de ses démêlés avec les hommes. A-t-il jugé, lui, sceptique par philosophie, qu’il était inutile de faire intervenir, pour expliquer des affaires sérieuses et positives, les fantômes créés par l’imagination craintive des peuples ? ou bien, politique prudent, a-t-il voulu insinuer aux Gaulois, en racontant ses victoires, que leurs dieux n’ont paru nulle part, et que, s’ils se trouvaient d’un côté, c’était de celui des Romains ? ne dit-il pas lui-même, et tout à fait incidemment, que ces dieux ressemblaient à ceux de Rome, leur Teutatès n’étant que Mercure ? Quoi qu’il en soit, tous les insurgés dont parle César, Ambiorix, Indutiomar, Vercingétorix lui-même et surtout, et les soldats aussi bien que les chefs, n’apparaissent dans les Commentaires que comme des hommes qui commandent ou qui obéissent, et rien de plus, ignorants de la prière et de la foi, étrangers à toute crainte religieuse et à toute espérance vers le ciel. César ne leur a laissé que l’allure militaire, et le moins possible de couleur locale. Il a laïcisé à outrance l’esprit et l’histoire de la Gaule.

César a par là, sinon dénaturé, du moins dénudé cette histoire. Nul ne croira que la Gaule n’ait pas appelé prêtres et dieux à son secours. Ces hommes, que leur adversaire regarde comme voués aux superstitions, ont dû terriblement jouer de leurs croyances dans ces journées décisives de leur vie ; ces dieux, dont la multitude grouillait sur les montagnes, le long des sources et dans les bois, ont dû s’agiter sur le passage de tant d’hommes en armes ; le sang des victimes humaines a dû couler pour solenniser les serments des conjurations suprêmes et attirer sur les étendards gaulois la faveur des puissances souveraines. Il est impossible que les druides, leurs prophètes et leurs bardes soient devenus subitement muets à l’arrivée des Romains : les prêtres et les desservants de la religion gauloise avaient la parole facile et l’humeur loquace. Voilà des hommes dont César nous dit, textuellement : Ils décident presque de toutes les causes privées et publiques ; ils peuvent interdire les sacrifices aux particuliers et aux nations mêmes qui n’acceptent pas leurs sentences : il n’y a en Gaule que deux classes qui soient considérées, les druides et les chevaliers ; et c’est par les prêtres que les magistrats peuvent être installés. Croira-t-on que, jusque-là arbitres et juges suprêmes, les druides aient brusquement abdiqué leur puissance ? Je ne m’imagine pas la subite abstention de tout un sacerdoce au milieu des conflits politiques et des luttes nationales.

Si la logique des faits n’a point subi trop de démentis dans la guerre des Gaules, s’il est permis de deviner la conduite des hommes d’après leur origine et leur caractère, voici ce qu’on pourrait supposer de l’histoire des druides depuis l’arrivée des Romains.

 À aucun moment, je doute qu’ils aient été unanimes pour ou contre Jules César. Le sacerdoce partagea les querelles et les partis pris de la noblesse, à laquelle il était allié. Malgré leurs assemblées générales et leur chef unique, les prêtres étaient divisés entre eux ; les armes seules décidaient parfois du choix du grand pontife. Éduens et Séquanes, chaque parti devait tenir à ce qu’il fût homme de son goût, comme Athéniens ou Spartiates cherchaient à faire parler leur langue à la sibylle d’Apollon.

Au début, les prêtres, ainsi que les nobles, sont en majorité du côté de César. C’est un druide que Diviciac, le traître le plus intelligent et le plus utile que le proconsul ait rencontré chez les Gaulois ; et je soupçonne que le druidisme était particulièrement influent chez les Éduens, amis presque séculaires du peuple romain.

Insensiblement, les prêtres, eux aussi, s’éloignèrent du proconsul. Il n’est plus question de Diviciac après 57. L’impérialisme militaire de César s’accommodait mal d’une théocratie officieuse. Ce fut, de tous les Romains, celui que les scrupules religieux ont le moins arrêté. Les dieux gaulois ne troublèrent pas plus son bon sens que les dieux de Rome. Il s’est passé, sans nul doute, des auspices sacerdotaux pour introniser Tasget et Cavarin ; on ne se représente pas les druides inaugurant l’assemblée de la Gaule sous la présidence du général romain. La civilisation latine menaçait d’une fin prochaine ce qui faisait la grandeur et la puissance du sacerdoce national : les chants des bardes, les prophéties des devins, les sacrifices sanglants des prêtres. En présence de César, les lyres ne résonnaient plus de la louange des héros gaulois, et les dieux étaient sevrés de victimes humaines.druides-et-guerres

Depuis l’hiver de 54-53, la majorité des druides est passée (je le suppose du moins) du côté de la conjuration : si les prêtres n’en furent pas les inspirateurs, ils en étaient du moins les auxiliaires. Quatre ans plus tard, lorsque César quitta pour toujours la Gaule vaincue, les bardes et les druides furent les premiers à se réjouir, et reprirent, ceux-là leurs harpes et ceux-ci leurs couteaux. Après la mort de Néron, au temps de l’incendie du Capitole, ce sont les druides qui prophétisent la revanche des Celtes : les Romains ne séparent pas leur nom de la crainte d’une révolte gauloise. De la même manière, à la veille du principal soulèvement, ils ne purent être que du côté de ceux qui le préparaient. Ce fut dans la profondeur des bois que se tinrent les conciliabules des chefs, et ces bois étaient l’asile ordinaire des rendez-vous sacrés. Les conjurés profitaient des fêtes d’hiver pour haranguer les hommes, et c’étaient des prêtres qui présidaient à ces fêtes. Un des deux chefs carnutes qui proclameront la guerre dans l’hiver de 53-52, semble être revêtu d’un sacerdoce.

Car, enfin, ce sont les Carnutes qui, les quatre dernières années de la guerre, se sont périodiquement faits les hérauts du soulèvement (et, chose étrange ! leur nom signifie peut-être, en langue celtique, la trompette de combat). En 54, ils massacrent le, roi imposé par Rome ; en 53, ils refusent de venir à rassemblée convoquée par César ; en 52, l’année de Vercingétorix, ils donnent le signal de l’entrée en campagne ; l'année suivante encore, après la chute d’Alésia, ils recommenceront la lutte à l’improviste, au beau milieu de l’hiver. Ils furent, de tous les peuples de la Gaule, celui qui s’acharna le plus à vouloir la liberté, et c’était celui qui offrait l’hospitalité à la réunion des prêtres. Ce ne peut être un hasard si le mot d’ordre de la révolte a toujours été lancé près de l’enceinte sacrée où les druides prenaient leurs décisions.

 

À suivre...

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Le blog de LUTECE
  • : Petits dossiers sur des thèmes historiques simples mais serieux
  • Contact

Facebook

Retrouvez et devenez amis du Blog de Lutèce sur facebook

Recherche

English & Deutch versions

1348995815 United-Kingdom-flag1348995857 Germany-Flag

Site sélectionné par :

elu-sdj

Livres à lire sur le blog

Vercingétorix - Camille Jullian

L'oeuvre intégrale cliquez ici

  Essai sur la condition des Barbares - Eugène Léotard

Pour lire cliquez ici

 

Articles à venir

_ La borne militaire de l'Empereur Victorin