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18 février 2012 6 18 /02 /février /2012 09:57

            Vercingétorix

 

     Chapitre IX - Le soulèvement de la Gaule.

 

1. Révolte des Sénons et des Carnutes.

 

La mort de Dumnorix et d’Indutiomar, la défaite d’Ambiorix avaient arrêté le soulèvement de la Gaule en 54 ; mais la conjuration, une fois formée, ne s’était point rompue.

Au mois de mars 53, César réunit à Samarobrive (Amiens) l’assemblée générale de la39s01.jpg Gaule : il la présida, à son habitude, du haut de son tribunal. Les Trévires, en guerre avec lui, n’y parurent pas, et le proconsul n’eut pas lieu de s’en étonner. Mais, pour la première fois depuis qu’il commandait en Gaule, deux des principales nations celtiques, les Sénons et les Carnutes, refusèrent d’envoyer des députés pour jouer près du camp romain la comédie de la liberté gauloise.

Elles avaient, quelques semaines auparavant, aboli la royauté que César leur avait imposée. Chez les Carnutes, le roi Tasget avait été égorgé sans autre forme de procès. Chez les Sénons, le roi Cavarin avait été, semble-t-il, condamné régulièrement par le sénat de la nation, présidé ou conseillé par Acco : mais on avait apporté une telle solennité à l’affaire que Cavarin avait eu le temps de se réfugier, à la tête des siens, auprès du proconsul. Ni des Carnutes ni des Sénons César n’avait reçu les satisfactions qu’il désirait ; ils avaient au contraire échangé des promesses avec les Trévires, et leur abstention à Samarobrive ressemblait à une déclaration de guerre.

La révolte de ces deux peuples avait une tout autre importance que celle des Éburons et des Trévires, peuplades à demi germaniques, presque cachées entre la Moselle, la Meuse et le Rhin, derrière les fourrés et les marécages de la forêt des Ardennes.

Les Sénons et les Carnutes étaient alors parmi les nations tes plus considérées de la Gaule : ils n’étaient guère inférieurs, comme rang et comme puissance, qu’aux Rèmes et aux Éduens. Les Sénons passaient pour un peuple « solide et de grande autorité ». Ils possédaient un très vaste territoire, s’étendant depuis les pentes septentrionales du Morvan éduen jusqu’aux abords de la Marne ; ils étaient maîtres de la plupart des vallées qui convergent du Sud et de l’Est vers le bassin de Paris : celles de la Seine, de l’Armançon, de l’Yonne (sur les bords de laquelle étaient leur principale ville, Agendincum, Sens), du Loing et de l’Essonne. Une alliance étroite les avait unis aux Parisiens de Lutèce. Ils commandaient ainsi les principales routes qui, d’Amiens, menaient au centre et au sud de la Gaule : hostiles à César, ils lui fermaient le plus court chemin de l'Italie.

La défection des Carnutes était presque aussi grave au point de vue militaire, elle avait une portée morale beaucoup plus grande. C’était une des nations les plus célèbres et les plus étendues de la Gaule centrale. Elle s’appuyait sur les deux plus grands fleuves : au Sud, elle possédait les deux bords de la Loire, à l’endroit même où celle-ci remonte le plus vers le Nord, et elle avait sur la rive septentrionale sa principale ville, Génabum (Orléans), la clé de la défense militaire de tout le bassin ; au Nord, les Carnutes possédaient, en face du débouché de l’Oise, les bords de la Seine, de Mantes à Poissy. Leur territoire était regardé par les Celtes, comme le milieu de la Gaule entière, et fort justement. Car il servait de lien entre les terres armoricaines à l’Ouest et les plateaux éduens à l’Est, entre la Belgique qu’il touchait au Nord et les Bituriges et les Arvernes qu’il avoisinait au Midi. C’était un centre merveilleux pour les opérations commerciales : à la suite des victoires de César, les marchands romains s’établirent à Orléans et y ouvrirent leurs magasins. Les Carnutes possédaient du reste ce dont César avait le plus besoin pour se maintenir en Gaule, la race des robustes chevaux du Perche, la fécondité des blés de la Beauce ; aussi le proconsul avait-il installé à Génabum son principal service d’approvisionnement. Enfin, dernier et redoutable élément d’influence, les Carnutes inspiraient aux Gaulois une sorte de respect religieux : chez eux se trouvait l’enceinte consacrée où se réunissait, chaque année, le conseil général des druides. C’était sur la terre carnute que reposait toujours, malgré la désunion des peuples, le foyer commun de toute la Gaule.

Les Carnutes avaient donc, autant que les Arvernes, plus même que les Éduens, le droit de jouer en Gaule un rôle universel. Seuls peut-être d’entre les peuples du Centre, ils jouissaient d’une certaine autorité parmi les tribus de l’Armorique, dont quelques-unes leur étaient apparentées. Ils furent une des nations qui maintinrent l’unité religieuse et la grandeur du monde celtique. Leur abstention, en mars 53, paraissait signifier à César que les dieux de la Gaule commençaient à se séparer de lui. Si la forêt sacrée des Carnutes se peuplait de ses ennemis, les hauts sommets où habitait Teutâtes ne tarderaient point à s’illuminer des feux de la révolte.

 

À suivre...

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15 février 2012 3 15 /02 /février /2012 06:43

              Vercingétorix

 

     Chapitre VIII - Vercingétorix, chef de clan.

 

5. Force et nature d’un clan gaulois.

 

Nous nous expliquons maintenant pourquoi César, à chacun des livres de ses Commentaires, revient et insiste sur cette masse d’hommes qui suivent la fortune d’un chef. Il pose en règle générale : Le degré de richesse et de noblesse chez les grands se mesure par le nombre de mercenaires et de clients attachés à lui : en dehors de cette force en serviteurs, il n’y a ni crédit ni pouvoir.

Ces armées familiales et libres, ces suites innombrables de cavaliers qui se lèvent à l’appel d’un seul homme, étonnent et inquiètent dès le premier jour le proconsul ; cependant il a vu à Rome des puissances semblables, comme la famille d’esclaves et de clients de Crassus, comme la bande d’émeutiers dont vivent Clodius et Milon. Mais le clan gaulois lui paraît tout autrement formidable. Les têtes s’y comptaient, non par centaines, mais par milliers. Les serviteurs domestiques d’Orgétorix l’Helvète étaient au nombre de dix mille, sans parler de ses clients et de ses débiteurs, dont le chiffre, dit César, était également considérable : un tel clan, à lui seul, formait presque une tribu.

Quand il se déplaçait, avec ses femmes, ses bêtes et ses chariots, il semblait que ce fût un peuple à la recherche de nouvelles terres. Quand il grondait dans les villes, il n’y avait magistrat si puissant qui ne se sentît menacé ; presque toujours le gouvernement des peuples gaulois ne gardait un cours régulier que parce que les deux ou trois plus grands clans se surveillaient et se neutralisaient. Mais souvent, le magistrat n’était que le premier serviteur d’un chef trop influent. Lorsque Dumnorix voulut affermer les impôts et péages de la cité des Éduens, nul n’osa se présenter contre lui, et il les eut à vil prix. Vous croyez, disait Ambiorix, roi chez les Éburons, que je commande à mon peuple : je ne suis que son principal sujet. Orgétorix, accusé par les chefs de la cité, se présenta devant l’assemblée suivi des milliers d’hommes de son clan, et personne n’osa plus l’accuser.

Le clan, ayant son chef, ses groupes, son état-major, son armée, sa forteresse, ses serviteurs ruraux et urbains, était une cité dans la cité même. Comme elle, il avait des relations diplomatiques, il contractait des alliances au dehors ; des liens d’hospitalité se formaient entre les grands clans des peuples voisins. Commios avait des amis dans toute la Belgique. Dumnorix possédait chez les Séquanes et ailleurs un grand nombre d’hôtes ou d’obligés auxquels il avait fait largesse. Il s’était marié dans la famille d’Orgétorix ; d’autres mariages avaient uni les siens aux plus puissantes familles des Bituriges et de nations plus lointaines. Pour aboutir à la fédération des cités, Dumnorix avait fait l’union des principaux clans, et telle était en effet la force énorme dont chacun d’eux disposait, que la confédération de trois ou quatre grands chefs suffisait pour les faire prétendre à l’empire de la Gaule.

Pareille institution n’était pas chose nouvelle dans le monde connu des Romains. Appius Claudius, quittant les montagnes de la Sabine pour immigrer sur le sol latin avec ses cinq mille clients ; Fabius, allant combattre les Étrusques avec les trois cent six membres de sa famille et la foule de ses serviteurs, sont les précurseurs italiens de Dumnorix et de Vercingétorix. Seulement, le clan du patricien romain n’a pas la même allure que celui du chef gaulois. Il limite son horizon à la Forêt Ciminienne et au sommet du Mont Albain ; ses hommes sont des fantassins entêtés, des combattants méthodiques, des laboureurs avides, des politiques vétilleux à la parole formulaire et à la pensée étroite. Le clan celtique est une bande de cavaliers aux galops indomptables, à l’humeur capricieuse, aux résolutions subites, rêvant de descendre dans les plaines lointaines, d’où l’on revient au son des chants et des vers, avec les têtes des vaincus se balançant sur le poitrail des montures.

 

6. Aspect physique de Vercingétorix.

 

C’est à la tête d’une multitude de ce genre, force militaire et familiale qui appartenait à lui seul, que se trouvait Vercingétorix l’an 53 avant notre ère. Lorsque César nous dit que le jeune chef possédait chez son peuple un très grand pouvoir, cela signifie qu’il conduisait le clan le plus redoutable de la nation arverne.

La puissance de Vercingétorix s’accroissait singulièrement de sa valeur personnelle.

Les qualités et les défauts de son âme, nous ne pourrons les juger qu’en le voyant à l’œuvre. Mais la splendeur de son corps haut et superbe le désignait au commandement et à l’admiration des foules. Il avait la supériorité physique, qui donne à la volonté une assurance nouvelle. Il faut se le figurer avec cette grande taille qui émouvait les Romains,vercinge-buste.jpg cet aspect farouche qui effrayait l’ennemi, droit sur son cheval de bataille, vêtu de la tunique aux couleurs bigarrées, la poitrine constellée de phalères de métal, ayant à son côté, suspendue par un baudrier d’or, la large et longue épée incrustée de corail, sur sa tête le casque surmonté d’un monstrueux cimier qui semblait prolonger encore sa haute stature, — mais aussi, flottant autour de cet appareil d’éclat et de terreur, le souffle vivant de la jeunesse, l’air de virginité militaire du chef adolescent qui n’a point encore souffert pour la liberté. S’il était vrai que les âmes des guerriers gaulois émigraient d’un corps à l’autre, les Arvernes ont pu se demander si Luern ou Bituit, les chefs encore célèbres de la Gaule triomphante, ne revenaient pas de leur lointain séjour sous la forme juvénile du dernier de leurs successeurs.

 

À suivre...

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11 février 2012 6 11 /02 /février /2012 09:36

             Vercingétorix

 

     Chapitre VIII - Vercingétorix, chef de clan.

 

4. La puissance d’un chef ; ceux qui dépendaient de lui.

 

Arrivé à l’âge de porter les armes, le jeune noble paraissait à côté de son père à la tête du clan qu’il devait hériter plus tard. On a vu que Vercingétorix reçut, n’étant encore qu’un enfant, l’héritage de Celtill ; il eut maison et clientèle à l’âge où beaucoup de Gaulois n’étaient que les premiers serviteurs de leur père : peut-être prit-il plus tôt que d’autres l’habitude de commander à des hommes et de faire valoir sa puissance.

La puissance d’un chef de clan consistait en terres, en or et en hommes.

Comme terres, les chefs de l’Auvergne avaient les plus fertiles de la Gaule : de la plaine de la Limagne et des prairies du Cantal venaient les blés, les flots de lait, les masses de fromage, les troupeaux de bétail dont les nobles réjouissaient la foule de leurs convives les jours des festins solennels, — En or et en argent, ils possédaient les revenus des mines voisines ou les héritages de Luern et de Bituit, ces rois qui se faisaient démagogues en versant de l'or du haut de leurs chars. Et il fallait aux chefs beaucoup d’or pour la solde et l’entretien de leurs hommes. — Car, comme la vie des puissants se passait surtout à combattre et à commander, c’était la richesse en hommes qui faisait la force d’un clan.

Je désigne par ce mot de clan, faute d’un nom meilleur, l’ensemble de choses et de personnes qui dépendaient d’un seigneur gaulois. Il renfermait des groupes d’origine fort diverse. — Les esclaves et les affranchis de la famille du chef étaient la catégorie la moins nombreuse ; il y avait en Gaule des formes si variées de la dépendance qu’il n’était point besoin de recourir à l’esclavage pour se fournir de serviteurs. Peut-être est-ce dans cette première classe que le maître choisissait les nombreux employés chargés d’assurer le train de sa maison, de percevoir ses droits et ses revenus. — Au-dessus des esclaves, à peine plus considérés qu’eux, était toute une plèbe d’hommes libres, débris des vieilles populations vaincues par la noblesse gauloise, ou bien épaves d’une société troublée, victimes d’un continuel droit du poing, traînards de tribus sans cesse en mouvement, tous attachés à la personne du chef par des liens d’intérêt et de crainte aussi tenaces que la tare servile. Parmi eux étaient les débiteurs du maître, ouvriers ou laboureurs, qui avaient hypothéqué leur champ, leur travail ou leur personne pour quelques poignées d’or ou quelques arpents de terres. — Plus haut, se tenaient les clients de condition meilleure, étroitement unis au seigneur leur patron par un serment de fidélité, famille morale qui complétait autour de lui la famille du sang, et qui ne devait point s’éloigner de ses côtés même au milieu des pires dangers. — Toutes ces sortes de subordonnés se rencontrent partout dans le monde antique : en voici deux qui paraissaient particulières à la Gaule et aux Barbares de l’Occident. Un chef de clan avait à sa solde un certain nombre d’hommes libres, qui lui servaient d’écuyers et de gardes : cavaliers pour la plupart, étrangers ou non, ils étaient armés, nourris et payés par lui, ils lui formaient une escorte guerrière, analogue à cette cavalerie domestique qu’entretint plus tard l’aristocratie du Bas Empire. Enfin, à côté de la garde militaire, ce qu’on pourrait appeler la cour intellectuelle : le noble n’allait pas sans ses parasites, convives officieux qui égayaient sa table, sans ses bardes surtout, les chantres nécessaires aux heures de repas et à la solennité des cortèges.

Il faut sans doute aussi ajouter à cette multitude les ouvriers des grandes villes, qui constituaient ce qu’un Romain eût appelé une plèbe municipale. Cette plèbe était, suivant toute vraisemblance, non pas groupée en un corps public comme celle des tribus de Rome, mais divisée entre les plus riches des chefs de clan, ainsi du reste qu’avaient vécu les plébéiens du Latium, au temps où les Tarquins recrutaient leurs adhérents, parmi les ouvriers du Capitole. La ville d’Uxellodunum, chez les Cadurques, fut tout entière dans la clientèle de Lucter, le compagnon d’armes de Vercingétorix, et je ne serais pas étonné si une bonne partie de la population de Gergovie eût été cliente du grand chef arverne. Car ce serait se tromper sur la société gauloise que de n’apercevoir en elle qu’une aristocratie équestre commandant à une clientèle rurale. Il y avait quelques centres municipaux, peuplés de milliers d’ouvriers : Avaricum était, dit César lui-même, une très belle ville ; Gergovie et Bibracte étaient pour le moins de très grandes bourgades, celle-là avec sescouv_gaulois_400-2-.jpg soixante-dix hectares, celle-ci avec une superficie presque double : quand Auguste transporta à Autun les habitants de la vieille cité éduenne, il fit bâtir pour les renfermer une muraille de près de 6 kilomètres de circuit, qui pouvait contenir plusieurs dizaines de mille hommes. Les fouilles de Bibracte (et Gergovie devait lui ressembler) ont fait reconnaître un fouillis de maisons tassées, d’échoppes et de boutiques encombrées, des marchés, des rues et des venelles, une série de quartiers dont chacun était le domaine d’un métier différent, et où les gens vivaient, travaillaient, mouraient et recevaient leur sépulture ensemble ; on a reconstitué des ateliers de forgerons, de fondeurs, d’émailleurs aux établis rutilants. Et on se représente aisément la foule qui vivait là au temps de Dumnorix, active, grouillante, tapageuse, et disposée, dans les jours de conflit politique, à fournir à un chef ambitieux l’appoint décisif d’une émeute populaire.

 

À suivre...

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8 février 2012 3 08 /02 /février /2012 11:31

                                                          Vercingétorix

 

      Chapitre VIII - Vercingétorix, chef de clan.

 

1. Rôle effacé des Arvernes depuis l’arrivée de César.

 

Nous connaissons déjà le peuple arverne ; nous savons pourquoi il avait commandé à la Gaule libre et pourquoi il pouvait lui commander encore le jour d’un soulèvement général. Ses montagnes menaçaient les grandes routes où circulaient les légions romaines. À la Gaule soulevée, il offrirait ses terrasses fortifiées propres aux longues résistances ; il lui apporterait le secours de ses fantassins et de ses cavaliers, l’aide de ses blés et de son or, le concours de ses clients traditionnels, le réconfort du souvenir des grands rois, et l’appui du dieu du Puy de Dôme.

Or, les Arvernes n’avaient pas une seule fois paru dans cette série de sinistres aventures qui s’étaient déroulées en Gaule depuis l’arrivée d’Arioviste. Il est question chez César des Éduens, des Séquanes, des Helvètes, des Carnutes, des Bituriges, des Sénons, et pas une seule fois des Arvernes. Il témoigne de l’humeur contre les uns, des égards pour les autres. Il n’a pas un mot sur le compte du peuple qui, avant son arrivée, faisait le plus parler de lui en Gaule. L’Auvergne demeure en dehors de son récit, de la marche et des campements de ses légions. En 58, elles suivent le flanc oriental du plateau central, dans leur marche du Confluent au Mont Beuvray ; en 57, elles guerroient dans le Nord ; en 56, elles longent les pentes de l’Occident, pour se rendre de la Loire à la Garonne. Elles ont fait le tour du massif sans y pénétrer. Elles ont hiverné en Franche-Comté, sur la Loire, en Belgique, et jamais dans les régions du Centre.

Il est vraisemblable que les Arvernes ne se sont signalés ni par une opposition prématurée, ni par une dépendance de flagorneurs. Le pouvoir appartenait toujours aux chefs de l’aristocratie, parents ou vainqueurs de Celtill ; son frère Gobannitio et les autres nobles continuaient à gouverner le pays, prenant les précautions nécessaires contre toute tentative nouvelle de tyrannie, surveillant d’assez près le jeune héritier de Celtill. Sans doute, comme les sénateurs des autres cités gauloises, ils avaient témoigné aux ordres de César la déférence de rigueur.

Ainsi, cette nation dont l’initiative, depuis un siècle, avait été prépondérante en Gaule, était en ce moment la plus effacée ou la plus recueillie. À moins de mentir à son caractère et de désavouer toutes ses ambitions, il fallait qu’elle prononçât son mot dans la crise solennelle qui se préparait. Les conjurés qui avaient écouté les paroles de Dumnorix ou adressé leurs vœux à Ambiorix avaient encore le droit d’espérer dans le peuple arverne et dans ses chefs.

Ces espérances grandirent le jour où le fils de Celtill, ayant atteint l’âge d’homme, devint un des plus grands chefs de la Gaule entière.

 

2. Caractère d’un chef gaulois.

 

Un chef de clan gaulois ne ressemble à aucun autre des maîtres d’hommes du monde antique, ni à l’eupatride grec, ni au patricien romain, ni au mélek phénicien, ni au roitelet de la Germanie. Il y avait chez lui à la fois la rudesse du Barbare et la souplesse de l’homme policé. Ne nous ne le figurons pas comme un glorieux sauvage, épris seulement de combats sanglants, de chasses rapides et de buveries sans fin. Certes, il aimait tout cela, et avec la fougue irréfléchie des natures encore neuves : les plus vives passions bouillonnaient en lui, et ne s’apaiseront jamais du reste chez notre aristocratie nationale, qui gardera en elle une survivance de ses premiers instincts. Mais le noble gaulois est autre chose qu’un brandisseur de glaives et un chevaucheur de grandes routes. Le Vercingétorix des statues classiques, dressant vers le ciel sa tête farouche et sa longue lance, est le chef des jours de bataille. Je crois que les hommes de son milieu connaissaient aussi des plaisirs plus fins et des goûts plus calmes. Si on veut retrouver ceux qui leur ont ressemblé le plus, il faut chercher, non parmi les Barbares du monde antique, mais parmi leurs successeurs sur le même sol. Le monde celtique, a dit avec raison M. Mommsen, se rattache plus étroitement à l’esprit moderne qu’à la pensée gréco-romaine. Et, en cherchant à comprendre Vercingétorix et ses congénères de l’aristocratie gauloise, j’ai toujours pensé malgré moi à Gaston Phœbus, superbe d’or, d’argent et de brocart, tantôt lancé dans d’infernales chevauchées où des meutes haletantes se mêlaient aux chevaux d’escorte, et tantôt trônant au milieu de ses convives, en face de la cheminée rayonnante de la grande salle de son château, entouré d’hommes d’armes, de chanteurs et de poètes, curieux lui-même de vers harmonieux et de récits imagés, beau conteur et beau diseur à son tour, intelligent, éloquent, rieur, têtu, cruel et dévot.


3. Son éducation et ses aspirations.

 

Les héritiers des grandes familles gauloises étaient élevés pour une vie de combats et une vie d’intelligence. Monter à cheval, manier les armes, courir au sanglier, c’était, sans aucun doute, les exercices obligatoires de leur adolescence. Mais une large part était aussi faite, dans leur éducation, aux travaux de l’esprit. Ne fallait-il pas qu’ils pussent comprendre et louer les poésies que les bardes chanteraient en leur honneur ? Ne devaient-ils pas eux-mêmes faire presque l’office de bardes, en célébrant leurs propres exploits et ceux de leur race avant d’engager les combats singuliers ? À table, dans le conseil du sénat, dans le conseil des chefs de guerre, dans, ces grandes réunions d’hommes, populaires ou armées, où la multitude imposait souvent sa volonté à ses maîtres, le noble gaulois devait tenir son rang, être prêt à l’attaque et à la riposte, commander par l’éloquence et savoir parler d’or.

Aussi est-il envoyé de bonne heure à l’école des druides ; il vit pendant les premièresdruide.jpg années de sa pensée dans la familiarité respectueuse de ces prêtres, qui sont d’ailleurs nobles comme lui, ses égaux par le rang, ses supérieurs par le mérite ; et il s’habitue à honorer autre chose que la force.

Des druides il apprend qu’il a une âme, que cette âme est immortelle, et que la mort est le simple passage d’un corps humain à un autre corps humain. Il sait bientôt par eux que le monde est une chose immense, et que l’humanité s’étend au loin, bien en dehors des terres paternelles et des sentiers de chasse ou de guerre. Enfin, ses maîtres lui font connaître ce qu’est la nation celtique, comment les Celtes ont une même origine, et que tous, amis ou ennemis du moment, sont les descendants d’un même ancêtre divin. Ainsi, le jeune homme s’imaginait peu à peu la grandeur du monde, l’éternité de l’âme, l’unité du nom gaulois. C’était chez lui un prodigieux effort pour élargir son horizon par delà ces domiciles provisoires et restreints qu’étaient son corps, le domaine de son père, la cité de ses camarades, pour contempler au loin dans des espaces infinis la durée de son être et la grandeur de sa race.

Peu d’aristocraties anciennes ont reçu un enseignement d’une telle portée, mieux fait pour stimuler le courage et l’orgueil, pour éveiller les vastes ambitions et les progrès généreux. Rien d’étroit, de formulaire, de strictement traditionnel : les druides savaient, au besoin, suppléer à leur ignorance par la hardiesse des hypothèses. Ils ne témoignaient aucun mépris pour les choses étrangères, ils avaient emprunté à la Grèce son alphabet, et peut-être avaient-ils modifié leurs doctrines primitives sous la rumeur lointaine de la philosophie grecque. Enfin, leurs procédés scolaires étaient à leur science ce qu’elle pouvait avoir de rebutant, ce que n’eût point aisément supporté l’esprit vagabond de la jeunesse celtique. C’était en vers, sous forme de longs poèmes, qu’ils donnaient leur enseignement ; il se présentait dans la trame continue de périodes cadencées. Les jeunes gens apprenaient par cœur des chants sans fin, tirades didactiques ou chansons de gestes, sœurs barbares de l’Iliade d’Homère et de la Théogonie d’Hésiode. De cette gymnastique incessante ils sortaient doués d’une excellente mémoire et d’une imagination très active : deux qualités essentielles, celle-là aux chefs d’État, celle- ci aux conquérants. Après avoir vécu leur jeunesse au son des épopées, les nobles étaient tentés de vivre à leur tour ces épopées mêmes.

Pour peu qu’ils eussent, avec l’amour de la gloire, l’intelligence des belles ambitions, ils entraient dans la vie imprégnés de l’idée que la Gaule était une grande chose et une seule patrie, et que leur devoir était d’en faire un même empire. Mettez enfin ces leçons et cette idée dans l’esprit d’un adolescent dont le père a commandé à tous les Gaulois, dont le peuple a fourni des rois à toute la Celtique, et vous comprendrez avec quelle force invincible Vercingétorix a été amené à reprendre contre César le rôle de Bituit.

 

À suivre...

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4 février 2012 6 04 /02 /février /2012 08:49

             Vercingétorix

 

     Chapitre VII - Le nom de Vercingétorix.

 

1. Ce n’est pas un nom de fonction, mais de personne.

 

Vercingétorix avait alors moins de trente ans. Il était né, croyait-on, à Gergovie, la principale ville des Arvernes.

Il n’y a pas longtemps encore, on regardait ce nom de Vercingétorix, non pas comme le nom propre et personnel du fils de Celtill, mais comme le titre de la magistrature suprême qu’il avait revêtue à la tête de la Gaule soulevée. Le chef arverne avait été le vercingétorix, c’est-à-dire (c’est ainsi qu’on traduisait ce mot) le généralissime ou le dictateur fédéral : César, qui ne savait pas le gaulois, a pris le nom de la fonction pour celui du chef. Dans les livres de lecture historique les plus populaires au temps où régnait le romantisme, la chose était présentée de cette manière, et l’on faisait ainsi du vaincu d’Alésia le champion anonyme et mystérieux de la liberté gauloise : l’homme s’effaçait et disparaissait derrière le héros symbolique. Michelet avait couramment écrit le vercingétorix dans son Histoire romaine et dans son Histoire de France, Amédée Thierry, dont les jugements eurent longtemps force de loi, avait lui-même accepté celte doctrine ; et si, dans son Histoire des Gaulois, il fait de Vercingétorix le nom du célèbre guerrier, c’est, dit-il, pour rendre la narration plus vivante, et parce qu’il est fastidieux de raconter en détail l’histoire d’un héros sans nom. En quoi Thierry avait tort, car l’historien ne doit pas ruser avec la vérité pour écrire un récit plus agréable, mais le présenter avec le plus grand degré de vraisemblance qu’il peut atteindre.

Ce qui donnait une apparence de raison à cette théorie sur le nom de Vercingétorix, c’est qu’il semble signifier en gaulois précisément chef supérieur ou quelque chose d’approchant. Rix, c’est, comme le latin rex ou l’irlandais ri, le mot roi : ver est un préfixe qui renferme l’idée de grandeur ou de prééminence ; cinget, enfin, signifierait celui ou ceux qui marchent, les guerriers, comme l’irlandais cing veut dire combattant. Vercingétorix deviendrait par là le grand roi des braves ou le roi très fort, et on a même dit le grand chef des cent têtes, comme Gingétorix (nous avons parlé de ce chef trévire) serait un simple roi des guerriers.monnaie vercingétorix.

La découverte, faite en Auvergne vers 1837, d’une monnaie d’or au nom même de Vercingétorix, écrit en lettres latines, des trouvailles semblables qui furent faites ensuite à Pionsat, aux environs d’Issoire, et enfin devant Alésia, c’est-à-dire aux endroits où le chef de Gergovie avait commandé ou combattu, ont jeté, quoique très lentement, le doute et le discrédit sur cette manière de raconter l’histoire. Aujourd’hui, je l’espère du moins, nul ne s’avise plus de contester son nom à Vercingétorix.

Aussi bien, César méritait, au moins en cela, une plus grande confiance : il était capable de mal juger et de méconnaître ses adversaires, mais il avait d’excellents interprètes qui ne le trompaient pas sur leurs titres. Vercingétorix devint son prisonnier et avait été son ami : César a dû faire inscrire exactement son nom sur ses tables d’hospitalité et sur les registres de la prison publique.

 

2. Si ce nom caractérise un membre de la plus haute noblesse.

 

Le nom de Vercingétorix a, dès la naissance, aussi bien appartenu au chef gaulois que celui de César à son adversaire. Mais si ce nom était synonyme de grand roi des braves, ne doit-on pas supposer qu’il prédestinait le fils de Celtill à commander aux Arvernes et à toute la Gaule ? Quelques érudits ne sont pas loin de penser, aujourd’hui, que le nom de Vercingétorix, tout en étant le nom d’un homme, n’était et ne pouvait être que celui d’un très grand personnage, qu’il était réservé à des nobles, chefs de peuple en réalité ou en espérance.

Qu’on remarque en effet que tous les noms à désinence semblable cités par César, — Ambiorix, Cingétorix, Dumnorix, Éporédorix, Orgétorix, — sont ceux de princes, de puissants ou de rois : il semble que nul ne pût s’appeler d’un nom en rix, c’est-à-dire se terminant par roi, s’il n’appartenait à une lignée ou royale ou capable de le devenir. Sans doute, après la conquête romaine, les noms de ce genre furent portés par toutes sortes de gens, et des plus humbles : leur valeur sociale disparut, en même temps que s’effaça le privilège des grandes familles. Mais à l’origine ces noms royaux sont spéciaux à ceux qui sont ou peuvent être rois, et c’était le cas de Vercingétorix, fils de Celtill.

Si séduisante que soit cette théorie, elle demeure, jusqu’à nouvel ordre, une simple conjecture. Il faudrait d’abord, pour qu’elle eût un fondement très solide, que l’étymologietsvercingetorix1g.jpg qu’on donne de ces noms fût indiscutable. Or, elle ne l’est pas plus que celle des noms de César ou d’Auguste, sur laquelle les contemporains eux-mêmes ne s’entendaient pas. Je ne puis affirmer, sans hésiter que rix, le mot décisif dans tous ces noms, signifie réellement roi. Cette terminaison ne serait-elle pas, en langue celtique, quelque suffixe sans aucun sens précis et nominal ? Nous la trouvons, en effet, dans d’autres noms, comme dans celui de Biturix, qui n’est pas un nom de personne, mais de peuple ; et, si on répond que les Bituriges étaient le peuple des rois du monde ou des rois éternels, je rappellerai que l’on écrivit à la fois Biturix et Bituricus, tout comme si rix et ricus étaient des suffixes analogues.

Mais admettons, ce qui après tout est très probable, que l’étymologie proposée pour les noms de Cingétorix et de Vercingétorix soit légitime, et que ces noms soient bien à désinence royale. Si plus tard, sous Tibère et sous les Antonins, ils ont été portés par toutes les classes de la société gauloise, comment pouvons-nous affirmer qu’il n’en fut pas ainsi dès le temps de César ? Celui-ci ne les mentionne que chez de grands chefs : mais bien des rois n’en portent pas de semblables, et d’autre part pouvait-il nous faire connaître, dans ses Commentaires, d’autres noms que des noms de chefs ?

Il demeure donc fort possible que le hasard ait fait appeler Vercingétorix le fils de Celtill, comme ce fut le hasard qui valut au fils d’un obscur athénien le nom de Démosthène, la force du peuple. Mais il prépara bien les choses, en faisant de l’un et de l’autre les hommes de leur nom.

 

3. De l’importance qu’il a pu avoir.

 

Car le nom de Vercingétorix n’a pas dû être une chose banale et sans valeur, indifférente à l’attitude de ceux qui l’entendaient, inutile à la fortune de celui qui le portait. En dehors de toute signification précise, il sonnait franchement et fièrement gaulois. Le mot appartenait à cette classe de noms superbes et sonores que les Gaulois de toute la Gaule affectionnaient, aussi bien ceux de la Belgique que ceux des Alpes et de la Loire. Tour à tour, les trois précurseurs de Vercingétorix à la tête du parti national ont porté un nom semblable : Orgétorix l’Helvète, Dumnorix l’Éduen, Ambiorix l’Éburon. C’était un nom à panache. Il retentissait profond et terrible, comme dit un écrivain grec des sons effrayants que prononçaient les Gaulois. Il semblait fait pour inspirer l’épouvante, écrivit plus tard l’historien latin Florus. Chez ce peuple sensible aux choses extérieures, aux couleurs voyantes et aux mots éclatants, le nom de Vercingétorix pouvait être, sinon un élément, du moins un ornement de la puissance souveraine.

Mais ce qui prédisposait l’Arverne à commander à la Gaule, c’étaient le passé et le présent de son peuple, la force de son clan, le prestige de sa personne.

 

À suivre...

 

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1 février 2012 3 01 /02 /février /2012 07:34

             Vercingétorix

 

     Chapitre VI - Vercingétorix, ami de César.

 

6. Ce que les Gaulois pouvaient penser de l’amitié de César.

 

Les calculs de César devaient être déjoués. Il jugea les Gaulois plus naïfs et plus crédules qu’ils ne l’étaient. Il les traitait trop volontiers en enfants qu’un hochet fait rester tranquilles.

L’aimable et triomphant proconsul n’apporta pas toujours, dans son appréciation des hommes, la science subtile et froide qui convenait à un manieur de peuples. Lui qui passa sa vie à réagir en vainqueur contre l’univers entier, il s’égara jusqu’à la veille de sa mort sur les sentiments de ses amis et de ses familiers. Sa confiance le perdit à Rome et faillit le perdre en Gaule. Aucun de ces chefs auxquels il donna le titre d’ami ne se crut tenu à une éternelle amitié. C’était pour eux une précaution contre les incertitudes du lendemain, un moyen de donner le change et de voir venir.

Ni Dumnorix, ni Ambiorix, ni Commios l’Atrébate, ni Vercingétorix n’entendirent engager leur parole qu’autant que le chef romain demeurerait véritablement l’ami de la Gaule, l’ami et non le maître. Quand tous ces satellites politiques de César se retournèrent contre lui, l’un après l’autre, aucun ne pensa violer la foi jurée : ils avaient mille motifs de croire que le proconsul y avait manqué le premier. S’il se plaignit, c’est qu’il se montrait un bienfaiteur ingrat : en le servant un ou deux ans, les Gaulois avaient suffisamment donné en échange d’un vain litre. Car, depuis 61, on avait tellement abusé de ce mot d’ami du peuple romain que les Gaulois avaient fini par l’estimer à sa juste valeur, et par le coter à peu près aussi exactement que les Romains eux-mêmes. Tous étaient prêts à lui déclarer ce que lui avait dit Arioviste, ami lui aussi du peuple romain de par la grâce de Jules César : Me croit-on assez barbare et assez innocent pour ne pas savoir ce que vaut une pareille amitié ? A-t-elle servi aux Éduens ? Ce litre n’a jamais été pour Rome qu’un prétexte à mettre des armées en marche. Les Gaulois pensèrent de même, jusqu’au jour où César leur eut montré que, si l’amitié du peuple romain était une formule de soumission, l’inimitié de César était une menace de mort.

 

7. Progrès continus du parti national : Dumnorix, Indutiomar, Ambiorix.

 

C’est qu’en effet la Gaule n’avait pas accepté comme un fait accompli la mainmise du proconsul sur ses libertés. Elle fut surprise, elle ne fut pas domptée. En dépit de cinq années de défaites partielles (de 58 à 84), le regret de la liberté, loin de s’atténuer, ne fit que grandir. Je ne parle pas seulement des blessures d’amour-propre que causèrent les pratiques politiques de César, favorable tour à tour aux sénats et à la royauté, débarrassant d’abord les cités de la crainte des tyrans et la leur infligeant ensuite. Mais il y a eu, depuis l’automne de 58 jusqu’aux révoltes générales, un progrès continu du patriotisme gaulois.

J’appelle de ce nom le désir de voir chaque cité obéir à ses lois traditionnelles, et toutes les cités de la Gaule s’unir en une seule fédération. La cause de l’indépendance nationale devenait de plus en plus inséparable de l’espérance d’un grand empire gaulois, à la manière rêvée par Dumnorix. Pour recouvrer l’autonomie, chaque cité devait s’associer à toutes : il n’y avait chance de succès que dans un effort collectif. L’idée d’une patrie commune, en puissance depuis des siècles chez les Gaulois, prenait corps au contact de César, de même que l’hellénisme se développa sous la pression des Barbares. Le patriotisme a besoin, pour grandir, de sentir l’adversaire ou l’étranger, c’est une vertu de réaction autant que de réflexion. Chaque année que le proconsul passait en Gaule, au lieu de l’acheminer vers la soumission définitive, le rapprochait au contraire de l’insurrection en masse.

Immédiatement après la défaite d’Arioviste, on entrevoit déjà la perspective d’un soulèvement national. On avait cru que César, ayant achevé la mission dont les Séquanes et les Éduens l’avaient chargé, ramènerait ses troupes au sud du Rhône : il les fit hiverner dans les vallées du Doubs et de la Saône. Aussi, lorsque, dans l’hiver de 58-57, les Belges se liguèrent contre Rome, ils furent encouragés par des Gaulois qui approchaient César ; et ceux-là, l’auteur des Commentaires les distingue fort nettement des démagogues en rupture d’ambitions : ce sont, dit-il, des hommes qui éprouvent à la vue de l’armée romaine la même impatience qu’à la vue des bandes d’Arioviste. C’étaient des âmes généreuses et fières, et vraiment patriotes.

Leur inspiration se fait sentir chaque année plus fortement. Les Bellovaques déclarent en 57 qu’ils veulent délivrer les Éduens de l’humiliante amitié de Rome. L’hiver suivant (57-56), les Vénètes et leurs voisins de l’Océan exhortent les peuples à demeurer dans cette liberté qu’ils tenaient de leurs ancêtres et à la préférer à cette servitude qui vient des Romains. — Un instant, il sembla que Dumnorix allait enfin grouper toute la Gaule contre Jules César.

Dumnorix, malgré la présence et les offres des Romains, rêvait encore des mêmes projets que du vivant de son beau-père Orgétorix. Il voulait pour lui un pouvoir plus vaste et plus noble que la royauté précaire des Éduens. En attendant, il demeurait auprès du proconsul, comme un dernier survivant des conjurations d’autrefois. Alors que, oublié ou mort, Diviciac disparaît après 57 du récit de César, son frère Dumnorix est encore un des chefs de la cavalerie auxiliaire. César, tout en le flattant, le surveillait ; mais Dumnorix le surveillait à son tour, et, tandis que le Romain se servait de son nom pour effrayer les sénateurs éduens, le Celte cherchait l’occasion de s’évader de son commandement vers la Gaule insurgée. Le parti patriote le regardait de plus en plus comme son chef naturel. Dumnorix faisait représenter sur ses monnaies l’appareil farouche d’un guerrier national, l’épée gauloise suspendue à son flanc, tenant de la main gauche la tête coupée de l’ennemi vaincu, agitant de la main droite la trompette et l’enseigne : une telle image sonnait comme une proclamation de guerre. — Il crut le moment venu lors de la seconde expédition de Bretagne (54). La conspiration était faite, les serments avaient été prononcés, le conseil des chefs organisé, la liberté de la Gaule jurée. César, prévenu au moment précis de son départ, donna l’ordre d’arrêter Dumnorix. Il se défendit l’épée au poing, criant qu’il était né libre et citoyen d’un peuple libre. On le tua. Les chefs conjurés suivirent César et attendirent.

Quelques semaines se passent ; puis, cette même année 54, ce sont l’éburon Ambiorix et leAmbiorix trévire Indutiomar qui se soulèvent. Mais ils ne sont pas isolés. Ambiorix déclare, qu’il le sache ou qu’il l’espère, que les chefs gaulois se sont unis pour reconquérir la liberté commune ; la Gaule a pris, disait-il, la résolution d’être indépendante. Indutiomar a reçu des délégués de presque toutes les cités. À la fin de l’automne de 54, il n’y eut aucune nation, sauf les Éduens et les Rèmes, qui ne donnât de l’inquiétude à César ; des députés et des messages se croisaient en tout sens ; des assemblées se tenaient dans les lieux écartés ; on traçait même des plans de guerre, et déjà l’Armorique avait levé et concentré ses contingents. Ambiorix et Indutiomar héritaient des espérances semées par Dumnorix. — Ils prirent trop tôt les armes, et grâce à la résistance désespérée de certains légats de César et à la hardiesse militaire de Labienus, le mouvement fut localisé dans la région voisine de la Germanie. Indutiomar fut tué, Ambiorix bloqué dans son pays. Mais la conjuration de toute la Gaule n’en demeurait pas moins à l’état de sourde menace.

Ni Dumnorix, ni Ambiorix n’auraient pu réussir, je crois, à la traduire en acte et à la formuler en empire. Ambiorix n’était que le chef lointain d’une peuplade sauvage, à demi germanique. À l’appel de la Gaule Indutiomar avait répondu par l’appel aux Germains ; et, s’il l’avait emporté, il eût été pour ses alliés aussi gênant qu’Arioviste. — Dumnorix, lui, était un franc Gaulois et chef dans la plus noble des nations. Mais il n’y était pas le maître absolu, et cette nation était irrémédiablement compromise, depuis trois générations, dans l’alliance romaine : toutes les trahisons étaient venues d’elle ; Dumnorix lui-même, tour à tour comploteur et résigné, gendre d’Orgétorix et officier de César, s’était usé dans huit années d’incertitudes.

Mais, qu’au centre même de la Gaule purement celtique, se soulève une nation forte et populeuse, que l’amitié romaine n’ait point avilie et que son passé de gloire et ses souvenirs d’alliances désignent à l’obéissance de tous ; qu’à la tête de cette nation se dresse un chef nouveau, au nom intact, que la puissance de sa famille, le prestige de sa personne, la tradition de ses ancêtres invitent à commander à son peuple : l’union se fera bientôt, dans toute la Gaule, autour de ce peuple et de ce chef.

C’est après l’échec des conjurations de Dumnorix et d’Ambiorix que l’arverne Vercingétorix, fils de Celtill, renonça à l’amitié de Jules César pour défendre la liberté de la Gaule.

 

À suivre...

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28 janvier 2012 6 28 /01 /janvier /2012 09:37

              Vercingétorix

 

     Chapitre VI - Vercingétorix, ami de César.

 

4. De quelle manière César commandait à la Gaule.

 

Ce semestre de campagnes militaires et politiques (avril-septembre 58) présente donc en raccourci toute l’œuvre que les Romains se sont assignée en Gaule ; les quatre années qui suivirent (57-54) furent consacrées par César à développer le programme qu’il avait d’abord tracé.

À l’intérieur, il imposa l’hégémonie romaine aux différentes ligues qui, en 58, n’avaient point suivi l’exemple des Séquanes et des Éduens : celles des Belges au delà de la Marne, de l’Armorique sur l’Océan, des Aquitains non gaulois au sud de la Garonne. Mais, plus encore qu’à cette tâche intérieure, César s’appliqua à fixer et protéger la frontière de la Gaule. Du côté des Alpes, la route fut ouverte vers l’Italie ; les Cantabres furent rejetés en Espagne ; les Bretons, menacés sur leur île, n’eurent plus la tentation de secourir la Gaule ; et les Germains, deux fois attaqués chez eux, finirent par comprendre que le Rhin allait être la limite sacrée de la chose romaine. Ainsi, avant que la Gaule eût été franchement conquise, César en avait pacifié les abords : la future province était créée, pour ainsi dire, par le dehors.

Périodiquement, les cités gauloises alliées de César envoyaient à son camp des délégués, qui formaient, sous sa présidence ou sous sa protection, le conseil général des Gaules. Elles entretenaient des otages auprès de lui ; il s’approvisionnait chez elles de blé, de fourrage, d’armes et de munitions ; il entrait librement dans leurs places- fortes. Leur noblesse formait dans l’armée romaine la cavalerie auxiliaire. C’était le proconsul qui fixait leur contingent militaire. Il était le chef suprême des armées gauloises unies à ses légions. Il ne commandait pas à la Gaule d’une manière très différente de celle d’un Celtill ou d’un Bituit.

Les cités étaient libres de s’unir, comme autrefois, sous le principal des plus autorisées. Il y avait, comme avant l’arrivée de César, deux grandes ligues : les Éduens avaient recouvré leurs anciens clients, et en avaient acquis de nouveaux ; les Rèmes avaient remplacé les Séquanes et les Arvernes à la tête de la seconde confédération. Mais c’était l’amitié de César qui était la principale garantie de l’hégémonie de l’une et l’autre nations.

  À l’intérieur des cités, il respecta de même, au moins dans les premiers temps, les usages établis. Mais il s’ingéniait de manière à disposer des hommes et des décisions. Il les faisait gouverner par ses amis, ses protégés ou ses obligés. Ambiorix, un chef des Éburons, la plus indomptable et la plus sauvage des nations belges et l’avant-garde de la Gaule entre la Meuse et le Rhin, regardait César comme son bienfaiteur : il lui devait la liberté de son peuple et de son fils (en 57). Chez les Trévires, leurs voisins de la Moselle, le proconsul donna le pouvoir à Cingétorix, qui avait (peut-être dès 58) réclamé l’amitié du peuple romain. Il distribua sans doute à profusion ce titre d’ami, ami du peuple romain ou ami de César. La clientèle de César s’étendit sur la Gaule entière, plus encore que celle des Rèmes ou des Éduens.

Ainsi, la Gaule continuait à être tenue comme elle avait l’habitude de l’être, par les liens flottants de la foi jurée et de la vassalité personnelle. César n’était pas un proconsul commandant à des sujets de Rome ; c’était un chef suprême parlant à des amis et à des clients.

 

5. César restaure la royauté : Vercingétorix, ami de César.

 

Le sénat de Rome, s’il fut assez intelligent pour comprendre ce qui se passait à Bibracte ou à Reims, ne pouvait s’en réjouir. Un proconsul à sa dévotion aurait agi d’une autre manière. Ces procédés de César faisaient pressentir le dictateur, le candidat à la royauté. Avant d’être prince ou roi à Rome, il s’essayait à l’être en Gaule.

Aussi, se préparant à la tyrannie du monde et à la conquête de l’aristocratie romaine, ilcesar.jpg n’eut pas toujours pour les sénats des cités gauloises le respect et les attentions que Flamininus et Paul-Émile avaient témoignés à ceux de la Grèce. Le régime oligarchique des chefs ne trouva pas chez lui les sympathies exclusives que le patriciat éduen avait espérées. César ne tarda pas à moins s’inquiéter de ces aspirations monarchiques et populaires contre lesquelles Diviciac l'avait mis en garde. Du jour où il se crut le maître en Gaule, il pensa qu’il lui était profitable d’avoir comme amis des tyrans ou des rois gaulois. Après tout, leur situation ressemblerait un jour à la sienne, et, dans ses luttes contre la noblesse italienne, il trouverait un appui plus utile chez des rois amis de César que chez un sénat frère du peuple romain. Aussi peu à peu voyons-nous se réorganiser en Gaule, avec l’appui du proconsul, ces monarchies que Rome et César lui-même avaient contribué à renverser.

César avait fait hiverner ses légions chez les Carnutes en 57-56, et il s’y était cherché des amis. Le principal des chefs de cette nation, l’homme qui y avait le même rang que Vercingétorix chez les Arvernes ou Castic chez les Séquanes, était Tasget, fils ou descendant des rois du pays, le représentant de la famille souveraine à laquelle l’aristocratie avait enlevé le titre royal. Tasget s’était attaché à la fortune de César, le suivit dans ses guerres, se comporta près de lui à la Gauloise, bravement et loyalement. Aussi, dès l’année 56, et peut-être avec l’aide des légions, Tasget reçut de César l’investiture du pouvoir royal qu’avaient détenu ses ancêtres : la monarchie fut rétablie chez les Carnutes, à la grande colère des sénateurs du lieu, et à la surprise, sans doute, de ceux de la Gaule. — Les Sénons étaient, comme les Carnutes, un peuple d’une grande puissance et d’une haute influence. Au moment de l’arrivée de César, ils obéissaient à leur roi Moritasg, descendant d’une ancienne dynastie : ils réussirent, vers ce temps-là, à se débarrasser de la royauté ; mais plus tard le proconsul leur imposa comme monarque le frère même de Moritasg, Cavarin. — Ces deux faits ne peuvent être des exceptions : nous ne voyons nulle part César substituant à la monarchie le régime sénatorial, et nous connaissons le nom de quelques rois dont il s’est fait le créateur. Quand les familles royales lui manquaient dans un pays, il cherchait ailleurs. Commius, qu’il fit roi chez les Morins (en 57 ?), était un Atrébate. Et c’est parce qu’il aimait à forger des rois que, en manière de plaisanterie, il offrait quelque royauté gauloise aux Romains qui cherchaient fortune près de lui.

Il y a plus. Le bruit courut en Gaule qu’il avait fait espérer à Dumnorix le titre de roi des Éduens. Dumnorix avait affirmé ce propos devant le sénat de son peuple ; César le rapporte sans le démentir, et j’incline à croire qu’il a fait l’offre, soit sincèrement, pour s’attacher Dumnorix, le plus célèbre et le plus influent des chefs gaulois, soit par une double ruse, pour le brouiller avec les sénateurs éduens et les tenir en respect sous la menace de la monarchie.

Ce fut dans des intentions semblables que le proconsul donna le titre d’ami, mais d’ami de César, à Vercingétorix. Le fils de Celtill était le chef du clan le plus puissant de l’Auvergne ; son père avait failli être roi et avait commandé à toute la Gaule ; il pouvait, le moment venu, s’inspirer des souvenirs paternels, et prétendre aux mêmes rôles qu’Orgétorix et Dumnorix. César prit les devants ; il crut se le concilier en lui attribuant le titre d’ami ; peut-être même lui fit-il, comme à Dumnorix, la vague promesse d’une royauté sur son peuple.

 

À suivre...

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25 janvier 2012 3 25 /01 /janvier /2012 08:19

                                                             Vercingétorix

 

      Chapitre VI - Vercingétorix, ami de César.

 

1. L'aristocratie lutte contre le parti national.

 

Le parti national des chefs populaires avait deux principaux ennemis : au dedans de la Gaule, les sénats locaux, désireux de garder l’autorité publique ; au delà des frontières. César, qui préparait ses légions.

Quand il quitta l’Italie, il trouva sa besogne à moitié faite par les sénateurs gaulois. Grâce à leur vigilance, le triumvirat royal d’Orgétorix, Dumnorix, Castic ne put se constituer. Les chefs helvètes, avertis à temps, se débarrassèrent d’Orgétorix, soit en le tuant eux-mêmes, soit en l’invitant au suicide. Dumnorix fut étroitement surveillé par le vergobret en charge et par son frère Diviciac, revenu de Rome. Le séquane Castic disparaît de l’histoire. Une fois de plus l’aristocratie déclara qu’elle avait sauvé les libertés de son pays, ce qui voulait dire qu’elle avait assuré à nouveau sa propre domination. En Gaule comme en Grèce, elle empêchait âprement les peuples de se rapprocher, les vastes patries de naître. L’étranger était le favori de son égoïsme conservateur. Les Éduens avaient, en la personne de Diviciac, à la fois leur Antalcidas et leur Polybe.

Mais le péril était encore très grand pour les patriciens gaulois. Derrière les forêts desDumnorix-cita Vosges, Arioviste amassait de nouvelles espérances. À Bibracte même, Dumnorix ne renonçait à aucun de ses projets ; c’était un homme d’une ambition tenace, d’un esprit retors, d’un caractère souple, qui savait vouloir, attendre et se taire. Enfin, les Helvètes n’abandonnèrent point leur résolution de s’établir dans l’Ouest : leurs préparatifs étaient achevés, leur migration commença (début de 58). Dumnorix avait conservé d’excellentes relations et des attaches de famille chez les Séquanes, les Bituriges et d’autres peuples ; il demeurait l’ami des Helvètes, il avait parmi eux ses beaux-frères, les fils d’Orgétorix, auxquels la nation avait laissé leur rang ; le chef éduen se tint prêt à accueillir les émigrés, en dépit de son sénat, et comme auxiliaires à ses entreprises sur la Gaule.

 

2. Arrivée, projets politiques et auxiliaires de César.

 

C’est alors que César apparut sur le Rhône, qui, de Lyon à Genève, formait la frontière de la province romaine et de la Gaule indépendante. Il venait, lui aussi, pour conquérir cette Gaule. Mais il voulait cette conquête à la fois plus nettement et moins ouvertement que Dumnorix et qu’Arioviste.

Jamais proconsul de Rome ne sut plus exactement, dès le jour de son entrée en charge, jusqu’où il souhaitait aller. L’ambition de César, en Gaule et ailleurs, eut en même temps un caractère scientifique et une allure impériale, elle fut précise et prestigieuse. Il commença par marquer nettement les frontières du pays qu’il avait à conquérir : les Pyrénées, le Rhin et l’Océan. Avant d’écrire ses Commentaires, comme avant de commencer ses campagnes, il traça les limites géographiques qu’il assignait à la Gaule, et il n’est pas bien sûr qu’il n’ait pas été lui-même l’inventeur heureux de ces limites : si le Rhin, depuis tant de siècles, passe pour être la fin de la Gaule, n’est-ce pas surtout parce que César a dit qu’il l’était, et a voulu qu’il le fût ? Et ayant ainsi dessiné ce pays, depuis les monts du Sud jusqu’au grand fleuve, il a arrêté qu’il serait son empire.

Mais s’il le savait, il ne le disait pas. Il eut l’air de venir en Gaule malgré lui. Il se fit appeler, désirer, caresser des sénateurs gaulois. Chacune de ses campagnes militaires fut précédée d’une campagne diplomatique, qui prépara et justifia l’autre. Pendant l’hiver, les amis gaulois de César parlaient et négociaient ; puis, au printemps, comme s’il ne faisait que marcher sur l’invitation d’un conseil d’alliés, César se mettait en route. Il se proposait à peine, il ne s’imposait jamais. Il trouva toujours des prétextes autres que son ambition : pour intervenir, le sénatus-consulte qui ordonnait de protéger les Éduens ; pour combattre, l’appel des Éduens menacés par les Helvètes ; pour rester, la protestation de l’assemblée des Gaules contre la tyrannie d’Arioviste. Il y eut, pour tromper la galerie des auxiliaires et empêcher les imprudences de la soldatesque, d’étonnantes mises en scène : poignées de mains entre Romains et Barbares, cortèges fraternels d’amis des deux nations, allées et venues incessantes entre un conseil gaulois et le camp de César. Une façade celtique dissimulait l’œuvre latine.

Quelques Gaulois, sans doute, s’y laissèrent prendre. D’autres ne demandèrent pas mieux que de se faire tromper. Les Éduens regardèrent César et ses légions comme un appui inespéré : grâce aux nouveaux venus, ils rêvèrent d’établir enfin, après les Arvernes et les Séquanes, leur principat sur la Gaule entière. Les aristocraties pourront, de leur côté, César étant là, se délivrer pour longtemps des aspirants à la tyrannie, qui sont autant de gêneurs pour la politique romaine. Aussi, dès qu’il pénètre en Gaule, il a près de lui des chefs séquanes et d’autres, les patriciens et le vergobret même des Éduens, et la cavalerie presque entière de ce dernier peuple : comme Dumnorix la commande, le général, averti, fait mettre des gardes à ce dangereux personnage. Si les Éduens sont les auxiliaires du proconsul, il est regardé par eux et d’autres Gaulois comme un auxiliaire supérieur, tels qu’avaient été d’abord Arioviste ou Orgétorix. César et l’aristocratie celtique unissaient leurs ambitions, en attendant de se duper l’un l’autre.

 

3. La Gaule soumise à César.

 

Au début, les deux alliés parurent tirer un égal profit des opérations militaires.

La défaite des Helvètes compléta la ruine du parti national. Dumnorix demeura en otage entre les mains de César ; des délégués de toute la Gaule vinrent complimenter le vainqueur, et, avec son assentiment, se formèrent en assemblée générale ; il fut reconnu comme un bienfaiteur par l’aristocratie. — Puis, au delà des Helvètes, il alla chercher Arioviste et le rejeta sur la rive droite du Rhin. Ce que faisant, il délivra les Séquanes d’une grande honte, les Éduens d’un grand péril. — Enfin, il continua à servir les intérêts du peuple de Diviciac : après l’expulsion des Germains, l’autorité des Éduens devint grande partout, et ils se crurent les premiers de la Gaule.

Ils l’étaient en effet, mais après Jules César et grâce à lui.

César s’était d’abord attaché la Gaule par la reconnaissance. Ces deux campagnes contre les Helvètes et les Germains avaient eu lieu la première année de la présence effective des Romains au delà du Rhône (58), et dès lors César avait trouvé et appliqué les bienheureuses formules qui, jusqu’à la fin de l’empire, serviront à définir l’œuvre gauloise du peuple-roi. Les Helvètes renvoyés chez eux et maintenus sur la rive citérieure du Rhin : c’est l’indice que les va-et-vient des tribus à l’intérieur, si contraires à la stabilité politique, vont prendre fin, et que les nations celtiques doivent désormais vivre et travailler chez elles, en acceptant et en gardant leurs frontières. Les Suèves d’Arioviste rejetés sur la rive ultérieure : c’est la Gaule interdite aux migrations lointaines, protégée par Rome et la protégeant à son tour contre un retour offensif de Cimbres et de Teutons. Comme ce double résultat profitait aux Celtes plus encore qu’à l’Italie, les amis gaulois de César pouvaient, sans lâcheté, célébrer son œuvre dans les assemblées de leurs nations.

L’admiration les menait sans doute aussi à César. Vraiment, le nouveau proconsul de la Province était le chef le plus glorieux que Rome eût encore envoyé sur les bords du Rhône. Quelle différence d’avec ces misérables concussionnaires qui l’avaient précédé ! Il rappelait son oncle Marins, qui avait vengé à Aix, sur les Teutons, l’humiliation de la Gaule entière. Encore Marius avait-il mis trois ans avant d’en finir avec les Barbares : en un semestre, deux batailles, César avait brisé à la fois Helvètes et Germains. Il s’était montré dans ces affaires un chef prodigieux : beau parleur, il avait accablé Arioviste et Divico l’Helvète sous le poids de ses arguments ; bon soldat, il avait commandé lui-même l’aile qui avait décidé de la principale victoire ; dans sa marche vers le Rhin, il n’avait eu peur ni de la fatigue de sept longues étapes, ni de ses soldats qui murmuraient, ni des mystères des forêts qu’il dut traverser. Il avait le geste imperturbable du héros qui marche d’accord avec les dieux.

C’étaient les dieux, pouvait-on dire encore, qui lui donnaient la Gaule. La défaite d’ Arioviste, habilement exploitée par le proconsul, ressemblait à une décision des puissances souveraines. Le chef germain avait dit, avant le combat, que la Gaule lui appartenait par droit de conquête ; et César avait répondu la même chose, en rappelant la victoire du sénat sur Bituit. Puis la bataille avait eu lieu, non par surprise, mais offerte par César, imposée enfin par lui à son adversaire, engagée solennellement, dans une vaste plaine, ainsi qu’en un champ clos où le ciel est pris comme témoin et comme arbitre. Et le ciel jugeait moins sur la liberté de la Gaule que sur le nom de ses maîtres. Les dieux se prononcèrent en faveur de César.

Le hasard des lieux achevait de favoriser le proconsul. Ses deux campagnes l’avaient obligé de traverser le pays des Éduens et celui des Séquanes, il commandait à Bibracte et à Besançon ; et ces deux peuples, étant les chefs des deux grands partis gaulois, mettaient presque toute la Gaule dans la foi de César.

Il en résulta qu’après la fuite d’Arioviste, dans l’automne de 58, César était maître de la Gaule celtique sans l’avoir combattue.

Cette suzeraineté fut-elle, non pas simulée et implicite, mais acceptée et formulée ? Y eut-il un acte précis par lequel les peuples principaux de la Gaule reconnurent la majesté du nom romain ? Éduens, Séquanes et Arvernes prononcèrent-ils devant César des paroles définitives, comme celles par lesquelles les Rèmes s’engagèrent l’année suivante ? Ils se confiaient, eux et tous leurs biens, à la foi et au pouvoir du peuple romain ; ils étaient prêts à livrer à César des otages, à exécuter ses mandats, à lui ouvrir leurs villes fortes, à l’assister de convois de grains ou autrement. Rien ne prouve que ces déclarations aient été faites en 58 : mais César fit, dès cette première année, comme s’il les avait entendues. Cette Gaule, qui était la plus inquiète des nations, qui avait un si long passé d’indépendance et de gloire, qui était alors, l’Égypte exceptée, la chose la plus vivante du monde. César, sans rien dire, lui confisqua la liberté. Ce fut, dans la vie du proconsul, un nouveau miracle d’audace heureuse et tranquille.

 

À suivre...

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21 janvier 2012 6 21 /01 /janvier /2012 16:13

              Vercingétorix

 

      Chapitre V - Celtill, père de Vercingétorix

 

7. Victoire de la première avec l’aide des Germains.

 

Ce qui devait se produire arriva. Au lieu d’avoir les Germains en grosses masses, comme au temps des Cimbres, la Gaule les eut par bandes. Il y avait toujours, sur l’autre rive du Rhin, des hordes germaniques à la recherche d’aventures et de terres. A l’appel des Arvernes et des Séquanes, il en accourut quelques-unes sous les ordres d’Arioviste. Les Éduens furent battus (71-61 av. notre ère).

Le parti opposé triompha. Mais comme, dans les dernières affaires, c’étaient les Séquanes et non les Arvernes qui avaient eu le principal rôle, le premier de ces peuples prit pour lui la prééminence dans la ligue qui l’avait emporté. Les chefs de Besançon eurent le pas sur ceux de Gergovie. Au fur et à mesure que les Germains se mêlaient des choses celtiques, l’axe politique de la Gaule se déplaçait. Il reculait vers l’Est. Bientôt, il semblera passer même chez les Helvètes.

Les Séquanes, avec l’appui d’Arioviste, essayèrent davantage. Ils voulurent imposer leur suprématie, aux Éduens et à leurs amis. Il semble qu’ils aient réussi, et que par là une certaine communauté de dépendance fût rétablie chez les Celtes de la Gaule centrale.

Il est à peine besoin d’ajouter que jamais union ne fut plus précaire et plus nominale. D’abord les, Éduens ne cessaient de grincer des dents et d’invoquer le sénat. Puis Arioviste se persuada qu’il valait mieux travailler pour son propre compte : il se fit remettre les otages et les tributs qui revenaient de droit aux Séquanes ; il s’installa chez eux en se faisant octroyer le tiers de leurs terres ; il demanda bientôt d’autres territoires pour de nouvelles troupes qu’il appelait. — Il y avait cinquante ans, la Gaule avait vu la bande germaine qui détruit et qui s’échappe ; elle voyait maintenant celle qui s’arrête et qui s’établit. Déjà apparaissait dans son histoire cette succession de faits qui, quatre ou cinq siècles plus tard, constitueront les invasions germaniques.

Arioviste, commandant aux Séquanes auxquels la Gaule paraissait soumise, revendiquait avec outrecuidance l’empire des nations celtiques, comme, après la défaite de Bituit, le sénat romain avait cru pouvoir y prétendre.

Le sénat de ce temps, celui de Cicéron, fort occupé des affaires intérieures ou des triomphes orientaux de Pompée, comprit assez mal ces événements lointains de l’Occident. Les députés gaulois qui vinrent le trouver contribuèrent médiocrement à l’éclairer. Ne sachant plus quel peuple favoriser, il les caressait tous également. Le roi des Séquanes, la nation éduenne, n’étaient-ils pas également ses amis ? En 89 même, on donna à Arioviste ce titre convoité, comme si l’on sanctionnait par là ses prétentions sur la Gaule. Peut-être les sénateurs bornaient-ils leur politique à souhaiter à tous ces Barbares une haine réciproque.

Mais que les Gaulois, suivant leurs penchants, se rassurent ou s’inquiètent. Cette indifférence de Rome ne sera pas éternelle. Deux faits se produisent, l’un qui légitime, l’autre qui annonce son intervention. — En 61, un sénatus-consulte de quelques lignes promet assistance au peuple éduen, et cela devait suffire le jour où un proconsul aurait le désir de franchir le Rhône au confluent. Et deux ans plus tard, en 89, César reçoit ce proconsulat des Gaules dont il attendait la gloire et la richesse.

Comme la Grèce prise entre Philippe et le sénat, la Gaule voyait à son horizon un double nuage, celui de Rome qui se formait lentement vers le Sud, celui de la Germanie qui éclatait déjà dans le Nord.

 

8. Le parti national : Orgétorix et Dumnorix.

 

Le seul moyen de salut qui lui restât était dans l’union de toutes ses cités. Un pouvoir respecté au-dessus de chaque peuplade, les chefs de nations étroitement fédérés : peut-être n’était-il pas trop tard pour réaliser ce dessein. Les plus grands chefs de clans des principales nations résolurent cette tentative : Orgétorix chez les Helvètes, Dumnorix chez les Éduens, Castic chez les Séquanes, un autre chez les Bituriges. Le complot ne paraît pas avoir eu d’adhérents chez les Arvernes : Vercingétorix, le fils de Celtill, était fort jeune encore, et les autres chefs de son peuple ne furent pas compromis dans cette entreprise.

Les conjurés s’unirent entre eux par des mariages, présages de la confédération future. orgetorix-Rhone.gifOrgétorix donna sa fille à Dumnorix, et tous deux devinrent les vrais artisans du complot national. Chacun chez soi, les chefs devaient se mettre à la tête des mécontents et de la tourbe des plébéiens, et préparer dans leur cité la chute de l’aristocratie et le rétablissement à leur profit de la royauté. Orgétorix serait roi des Helvètes, Dumnorix, des Éduens ; Castic, dont le père avait été roi chez les Séquanes, reconquerrait le titre dont les nobles l’avaient écarté. Enfin les Helvètes s’apprêtèrent à quitter leur pays, où ils étaient trop nombreux, pressés par les Germains et bloqués par la montagne ; ils se fixeraient quelque part dans les grandes plaines vacantes de l’Ouest : mais, en cours de route, leur armée, brochant sur toute la Gaule, en assurerait l’empire à Orgétorix, Dumnorix et leurs amis (61-59 avant notre ère).

Malgré toutes ses discordes, la Gaule n’avait donc point perdu le goût de la liberté et le sentiment national. La pensée de devenir un seul empire végétait toujours dans les diverses cités. Le patriotisme celtique était, comme le panhellénisme, un sentiment léger et subtil, se dissipant sous le souffle d’un orage plus fort, se reformant aussi vite qu’il se dispersait. À tous les moments de crise, il se leva des hommes d’une ambition intelligente pour dire que, s’il fallait avoir des maîtres, mieux valait obéir à des Gaulois. Entre les alliés de Rome et les victimes des Germains, Orgétorix et Dumnorix constituèrent un tiers parti, fédéral et national, monarchique et populaire, et ils se liguèrent pour rétablir l’union faite jadis par l’arverne Celtill.

 

À suivre...

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18 janvier 2012 3 18 /01 /janvier /2012 05:43

              Vercingétorix

 

     Chapitre V - Celtill, père de Vercingétorix.

 

5. L'aristocratie arverne renverse Celtill.

 

Mais la notion d’un grand empire se séparait rarement de celle d’une grande monarchie. Ce fut un roi que ce biturige Ambigat dont les Gaulois célébraient encore la légendaire domination. Bituit avait eu, de la royauté, la réalité et l’appareil. Celtill aspira à lui ressembler, et à changer son titre contre celui de roi.

Ce Celtill fut, sans nul doute, un chef semblable à d’autres chefs, mais plus riche et plus influent que ses rivaux. Nous devinons sans peine comment il procéda, l’histoire est banale dans l’antiquité. Il avait plus d’amis que les autres nobles, plus d’esclaves, de mercenaires, de clients, de parasites et de débiteurs. Un parti put se former autour de lui, plébéien, militaire et monarchique ; et ce parti ne différa guère de ceux que groupèrent les Pisistrates à Athènes ou Manlius à Rome, guettant la royauté de leur nation à travers la faveur populaire et le prestige de la gloire des armes.

Les autres chefs furent les plus forts. Ils réservèrent à Celtill le sort prévu par la celti.jpgcoutume des peuples anciens contre les aspirants à la tyrannie, celui que les patriciens avaient infligé à Manlius. Il fut condamné à mort. Le jugement fut solennel, public, porté par la cité tout entière contre celui qui avait voulu lui faire violence. Puis l’exécution eut lieu : l’usage était que le coupable pérît sur le bûcher, voué aux dieux du peuple outragé.

Les Arvernes frappèrent l’homme et ne touchèrent pas à la famille. Ils ne lui imputèrent pas le crime de son chef. C’est ainsi qu’après l’expulsion de Tarquin le Tyran ses congénères demeurèrent à Rome et purent aspirer à la gouverner par des moyens légitimes ; aucune grave malédiction ne fut portée non plus contre la race dont Manlius était sorti. Les dieux se contentaient d’abord de la victime désignée par la faute.

Le frère de Celtill, Gobannitio, conserva chez les Arvernes son rang et son influence. On peut même soupçonner ce Gobannitio d’avoir aidé à renverser son frère. Les aspirants à la tyrannie eurent souvent dans leur famille leurs pires adversaires : Brutus et Tarquin Collatin frondèrent contre le chef de leur clan le gouvernement des patriciens de Rome ; et l’Éduen Dumnorix, qui rêvera d’imiter Celtill, se heurtera à son frère Diviciac. Gobannitio allait devenir un des gardiens les plus vigilants de celte autorité des grands que son frère Celtill avait tenté de renverser.

Celtill laissait un fils en bas âge, nommé Vercingétorix. Les Arvernes furent plus cléments pour lui que les Romains ne l’avaient été pour le fils de Bituit. Celui-ci avait partagé la captivité de son père : Vercingétorix conserva, non seulement la vie et la liberté, mais l’héritage du condamné. On lui laissa ce dont les dieux l’avaient fait héritier, cette richesse en hommes et en choses qui pouvait lui permettre de conquérir dans son pays la situation réservée aux hommes de sa race.

 

6. Formation des deux ligues arvernes-séquanne et éduenne

 

Une fois encore l’unité de la Gaule fut brisée après la mort de Celtill. Cependant, le morcellement ne fut pas absolu. Toutes ces convulsions militaires et politiques, ces alternatives d’union et de désunion, laissaient aux cités gauloises, en même temps que l’impuissance à former un empire, le regret de vivre isolées. N’avait-on pas vu en Grèce, après le groupement de tous les peuples à Platées, se constituer les deux ligues de Sparte et d’Athènes, compromis entre le besoin de s’entendre et l’instinct de se combattre ?

Quatre coalitions se formèrent entre le Rhin et l’Océan, les Cévennes et la Garonne, dans le domaine qui restait aux Gaulois encore libres. Les peuples situés de l’embouchure de la Seine à celle de la Loire fondèrent la fédération de l’Armorique, qui sans doute fut maritime aussi bien que terrestre. Les nations de la Belgique, auxquelles l’invasion des Cimbres avait donné le sentiment de leur force et de leur solidarité, demeurèrent groupées pour la plupart autour des Suessions. Mais les deux principales ligues furent celles qui reconnurent la suprématie des deux grands États de la Gaule centrale, les Arvernes et les Éduens.

Entre ces deux États et ces deux ligues, l’hostilité fut aussi constante qu’entre Sparte et Athènes, Israël et Juda. La Gaule était vraiment un pays à deux têtes. La rivalité entre les deux peuples se répercutait dans les moindres cités, dans les cantons, dans les clans, dans les familles mêmes. Il devait y avoir des amis des Arvernes chez les Éduens, et inversement, comme Athènes eut ses amis à Sparte.

Les deux nations suzeraines s’appuyaient sur des cités clientes et sur des peuples amis. On a déjà nommé la clientèle habituelle des Arvernes, les gens du Velay, du Rouergue, du Quercy, du Gévaudan. Les Éduens avaient sous leur dépendance particulière les peuples du Forez, du Beaujolais et de la Bresse. — Les deux rivaux s’étaient acquis chacun une alliance utile et puissante parmi les nations de premier ordre. Les Bituriges du Berry, qui commandaient vers la Loire moyenne les abords du plateau de l’Auvergne, s’étaient unis aux Éduens ; il en fut de même des Sénons, leurs voisins dans les vallées de l’Yonne et de la Seine, ce qui assurait aux nobles du Morvan un débouché dans le bassin de Paris. Mais en revanche les Séquanes de la Franche-Comté, qui disputaient aux Éduens les deux rives et les péages de la Saône, avaient accepté l’alliance des Arvernes : car ce fut une cause ordinaire de jalousie entre les cités gauloises que la possession des deux bords et le monopole des droits sur les rivières importantes. — Au delà de la Marne, les Belges ne se désintéressèrent pas absolument de ces querelles : des liens d’amitié, sinon de clientèle, se nouèrent entre les Éduens et l’une de leurs principales nations, les Bellovaques.

En dehors de la Gaule, l’un et l’autre parti cherchèrent des appuis : ils ne répudièrent pas plus l’accord avec l’étranger que les Grecs d’aucune époque. Les Éduens demeurèrent de plus en plus attachés au peuple romain, et leurs chefs, comme Diviciac, finirent par apprendre le chemin de Rome et l’hospitalité des sénateurs en vue. — Contre les Romains, protecteurs dangereux de leurs adversaires, les Arvernes eurent recours à des auxiliaires germains, qui pouvaient devenir plus redoutables que les Romains eux-mêmes. D’autant plus que le sénat, ayant tour à tour sur les bras Mithridate, Sertorius, Spartacus, les pirates et Catilina, ne pouvait guère, au nord du Rhône, envoyer que des formules et des décrets.

 

À suivre...

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