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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 23:03

  Diffusé lors de l'émission "Des Racines & des Ailes", voici un magnifique reportage réalisé en image de synthèse. Découvrons Lutèce telle qu'elle était à la fin du premier siècle de notre ère :

 


 

 

L'intégralité du reportage en cliquant sur ce lien puis cliquez sur l'image en bas à droite (Des Racines & des Ailes)

 


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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 11:28

  Dans la religion gauloise, le Mercure indigène était une des divinités les plus honorées. Ce dieu patronnait notamment le commerce, une fonction qui est à mettre en relation avec ses dédicaces aux abords des routes et sur des lieux en hauteur.

 

  Dans la religion des Celtes préchrétiens, l'un des dieux les plus importants était Lug(us).dieux mercure Nous le connaissons en Irlande sous le nom de Lug, au Pays de Galles sous le nom de Lleu et dans l'Antiquité celto-romaine sous le nom de Lugus, mais surtout sous l'interpretatio romana de Mercure. César nous informe qu'il est le dieu que les Gaulois honorent le plus, des propos confirmés par les très nombreuses dédicaces et monuments figurés en son honneur; en 1989, l'historien J.J. Hatt recensait 283 dédicaces.

 

 Mercure a des fonctions très variées dans la religion gallo-romaine. Parmi celles-ci, la protection des voyageurs et du commerce sont particulièrement intéressantes. Le fait que nombre des dédicaces qui lui étaient consacrées se situaient sur des hauteurs est également significatif.

 

  Dans la guerre des Gaules, César nous dit clairement que Mercure "est pour eux [les Gaulois] le dieu qui indique la route à suivre, qui guide le voyageur, il est celui qui est le plus capable de faire gagner de l'argent et de protéger le commmerce".

 

  Les routes

  De nombreuses épiclèses[1] évoquant ces fonctions ont été découvertes aux abords de nombreuses routes empruntées à l'époque gallo-romaine; plusieurs indices archéologiques attestent également de l'association entre le Mercure gaulois et les routes. Des dédicaces et des ruines de sanctuaires qui lui sont dédiées se situent aux abords des routes ou dans leurs parages. Dans l'Antiquité gallo-romaine, une divinité figurée sur une colonne pouvait signifier son contrôle sur les passages; or, en Bretagne, les dévots de Mercure ont érigé en son honneur une colonne de bois. Il existe également un bronze provenant de Bordeaux qui représente un Mercure doté de quatre visages, ce qui lui permettait sans doute de pouvoir regarder les quatre points cardinaux en même temps; il faisait sans doute office de dieu des carefours. Au sanctuaire de Lux (Côte-d'Or), les dédicaces à Mercure sont ornés d'une charrette, un objet qui fait sans doute allusion à la route qu'il protège.

  Mercure était souvent représenté ou honoré dans des lieux situés à proximité d'une route. Dans l'ancienne cité des Lingons se dresse le plateau de Chateroy, situé à 16 kilomètre au nord-est de Langres (Haute-Marne). Il dominait la voie de Trèves, commandait le bassin de la Meuse vers Montigny et celui du Rhône vers Poiseul-Andilly; de là, on découvrait également le chef-lieu de la cité dans son ensemble. Sur ce plateau de Chanteroy, se trouvait un lieu de culte important consacré à Mercure. D'après le baron Héron de Villefosse (1774-1852), le Mercure découvert en ce lieu - précisément à Dampierre - était une seconde copie du Mercure arverne exécuté par Zénodore[2]. À Velay, où se croisaient au moins quatre voies romaines, on a retrouvé deux représentationsmercure-gallo-romain1 de Mercure. La première est la stèle d'un homme sans tête, mais la présence d'un caducée, d'un bélier, d'un coq et d'une éventuelle tortue ne laisse guère de doutes sur l'identité du dieu. La seconde est une statuette en bronze, d'inspiration indigène, où l'on voit le dieu tenant de la main droite une bourse, tandis que la tête et les épaules étaient couvertes du capuchon gaulois.

  Dans la cité de Vienne, l'essentiel des inscriptions et des représentations de Mercure se situe le long des grandes voies de communications. Par exemple, une dédicace a été découverte à Tamié, où passait peut-être la route de Vienne à Genève par Boutae, près d'Annecy (Haute-Savoie). Une autre a été trouvé à Saint-Félix (Haute-Savoie) où passait le chemin qui reliait les deux route de Boutae à Gusy et de Condate (aujourd'hui commune de Seyssel, Haute-Savoie) à Albens (Savoie). Une troisième dédicace a été découverte au niveau de Bourget-du-Lac (Savoie), où la route traversait des lieux marécageux entre le pied de la montagne du Chat et le bord du lac du Bourget.

  Le Mercure Viator était honoré sur le célèbre Donon[3] (Bas-Rhin), qui devait sa réputation à la présence du sanctuaire antique consacré à ce dieu. Au col entre les deux Donons - nom qui désigne le Donon principal, qui culmine à 1 009 m, et le petit Donon haut de 964 m - on a découvert une stèle qui portait une inscription commémorative. Elle rappelait qu'un personnage nommé L. Vatinius Felix avait fait mettre en place toutes les bornes militaires le long de route de Sarrebourg au Donon et les avait consacrées à Mercure.

  À Beauvais, une stèle de Mercure a été trouvée entre deux anciennes voies romaines, l'une qui allait à Bavai, l'autre qui, par Clermont, se dirigeait vers Reims. Non loin de cette stèle, une voie vraisemblablement romaine, appelée aujourd'hui chaussée de Bulles, prenait aussi son départ. L'endroit semblait idéal pour y faire ses dévotions en l'honneur du dieu des Voyageurs et des Marchands.

 

  Le commerce

  Dans l'extrait de la Guerre des Gaules cité plus haut, César attribuait au Mercure gaulois la protection du commerce. Mais il est possible qu'il s'agisse d'un développement secondaire de sa fonction initiale de patronner les routes. En effet, lorsque les infrastructures routières s'améliorent, la communication entre les hommes progresse, en particulier les échanges commerciaux. Cette fonction de Mercure est parfaitement mise par la présence d'une bourse sur certaines représentation plastique du dieu ainsi que par plusieurs épiclèses : Mercalis (marchand, marchandise...), Negociator, Propitius (propice - aux affaires -) sur un poids étalon découvert à Lucey, Felix (porte-bonheur) et Nundinator (dieu des marchés) sur un médaillon d'applique à Vienne. Un marchand de poterie du pays rhénan a également fait inscrire le nom de Mercure sur un ex-voto. Le lien entre Mercure et le commerce se confirme par un autre élément : César qualifie ce dieu d'omnium inuentor artium, "inventeur de tous les arts". Autrement dit, les arts qu'il patronne sont autant de domaines liés à l'économie. Mercure était donc certainement honoré par les forgerons, les bronziers ou encore les cordonniers qui souhaitaient la réussite financière.

  La fonction de protecteur des routes peut aussi s'expliquer du point de vue de l'aménagement du territoire. La présence des routes favorise l'organisation d'une société, l'appropriation du territoire par l'homme, ainsi que la communication entre eux. Le Mercure gallo-romain était sans doute un dieu qui était invoqué pour l'organisation de la société humaine.


[1] Dans l'Antiquité, l'épiclèse était une épithète accolée au nom d'un dieu dans le but de préciser l'aspect sous lequel il était révéré : Athena Hygieia (protectrice de la santé), Dionysos Sukitês (protecteur des figuiers), Zeus Sôter (sauveur) etc. Les épiclèses étaient nombreuses. On en connaît par exemple une centaine pour Apollon. Source

[2] Selon Pline l'Ancien, Zénodore fut chargé par les Arvernes de fondre une statue colossale de Mercure, qui exigea dix ans de travail et rapporta 4 millions de sesterces à son auteur.

[3] Le Donon est le plus septentrional des sommets du massif des Vosges.

 

Source : Histoire Antique N° 39


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15 mai 2011 7 15 /05 /mai /2011 01:25

    La Gaule soumise au pouvoir militaire et administratif de Rome va toutefois bénéficier de l'apport culturel de la civilisation romaine. Parmi ses apports, un certain art de vivre illustré par exemple par la construction de thermes dont seul les barbares pourraient se passer.

  Il n’est sans doute pas une seule ville de la Gaule, même secondaire, qui n’ait été dotée d’au moins un établissement de bains publics. Par exemple, Lousonna (la Lausanne antique) et Martigny en Suisse, en possédaient un, de même que Bliesbruck (Moselle et Allemagne), Antigny (Vienne), Argentomagus (Indre), Izernore (Ain) et Quimper (Finistère). Drevant (Cher) et Néris-les-Bains (Allier) en proposaient deux à leurs habitants, à l’instar de Vaison-la-Romaine au IIe siècle et de Cimiez (Nice). On en comptait trois à Lutèce, Saint-Bertrand-de-Commingues (Haute-Garonne), Saintes, Feurs (Loire) et peut-être aussi à Fréjus. Arles en offrait trois, peut-être quatre, Lyon cinq, voire six. Une telle prolifération de thermes, dont l’usage fut introduit par l’Italie et Rome, ne peut s’expliquer par le seul souci d’hygiène et de propreté corporelle. Ces établissements apparaissent, en effet, comme l’expression d’un nouvel art de vivre. En attendant le repas du soir, on ne manquait pas d’y aller flâner. Au hasard des salles, des couloirs, des cours, des jardins et des portiques, on aimait à s’y retrouver, à s’y relaxer, à entretenir son corps par des exercices physiques dans la palestre ou bien, dans les bibliothèques ou les salles de conférence, à y meubler son esprit. On devisait, on colportait les derniers ragots, on écoutait les diatribes d’orateurs improvisés, on se délassait ou bien on parlait affaires. Aussi les a-t-on comparés à nos cafés et à nos clubs, les assimilant même à nos modernes maisons de la culture. Quoi qu’il en soit, plus sans doute que le forum jugé trop solennel, les thermes furent le lieu de rencontre et de rendez-vous favori des habitants des villes, d’autant que l’entrée était libre ou ne coûtait qu’un prix symbolique.

  thermes-romains2

  Mais la fonction des thermes dépassait cette simple notion de délassement et de loisirs. Dans une page célèbre, l’historien latin Tacite rapporte les méthodes employées par son beau-père Agricola, gouverneur de la province de Bretagne de 77 à 84, pour romaniser les Bretons, c’est-à-dire les habitants de l’actuelle Angleterre : « Afin que ces hommes dispersés et grossiers et comme tels prompts à la guerre, s’accoutumassent au repos et au loisir, il exhorte les particuliers, aide les villes à construire temples, fora, maisons, louant l’empressement, blâmant la nonchalance, de telle sorte que l’émulation remplaçait l’obligation. Des gens qui, auparavant, rejetaient la langue romaine, en recherchaient l’éloquence. Puis on prit le goût de nos tenues et la toge devint fréquente, peu à peu on en vint aux séductions de nos vices, aux portiques, aux bains, aux raffinements des banquets ; et chez ces hommes sans expérience, on appela civilisation ce qui était un élément de leur esclavage. » Vie d’Agricola, XXI, 1,2 et 3. On le constate, les bains ne sont pas oubliés et figurent même en bonne place parmi les « instruments d’assimilation », au même titre que la langue latine, les banquets et la toge.

  Passé dans les thermes en hommes pressé eût été sans nul doute regardé comme parfaitement incongru. Il convenait de s’y attarder – au moins deux heures, pense-t-on – et tout un programme, voire un rituel, présidait aux opérations du bain. Il était généralement recommandé de se diriger d’abord vers le palestre, une esplanade entouréethermes-romains1 d’une colonnade où l’on pratiquait quelques jeux et exercices physiques propres à échauffer le corps. Après avoir laissé ses vêtements au vestiaire (apodyterium) et s’être frotté d’huile d’olive bien grasse, on passait dans la salle tiède ou tepidarium. Là, à l’aide de spatules métalliques incurvées, les strigiles, on se faisait longuement racler la peau par quelque esclave. Les gens à tête faible, préconise Celse, un célèbre médecin romain du Ier siècle, devaient y demeurer sans se déshabiller jusqu’à ce qu’une légère transpiration s’établisse ; c’est alors seulement qu’ils pourront se soumettre sans danger à une température élevée. L’étape suivante, conduisait à la salle chaude, le caldarium, véritable étuve équipée de bains très chauds. Il y régnait une température de l’ordre de 55°C dans une atmosphère où l’humidité atteignait 95%. Dans cette ambiance très chaude et saturée d’humidité, gare aux accidents cardiaques quand, si l’on en croit Juvénal (Satires, I, 140-145), tu déposes ton manteau et portes aux bains un paon mal digéré. Delà des morts subites, des vieillards n’ayant pas eu le temps de rédiger leur testament… Après une sudation poussée – la température des bains y était de l’ordre de 40°C - , on passait au massage puis, le corps reposé, on revenait au tépidarium. Le programme s’achevait au frigidarium, salle froide où, tout à loisir, on pouvait se plonger dans des bains d’eau froide.

  En Gaule narbonnaise, l’un des établissements de bains les plus ancien, celui de Glanum à Saint-Rémi-de-Provence, fut construit entre 40 et 20 avant notre ère. Son agencement et ses dimensions s’apparentent étroitement à ceux des thermes de Stabies à Pompéi, dans leur dernière phase. C’est la preuve que la formule architecturale des bains publics gallo-romains fut importée d’Italie peu après la conquête de César. Ils juxtaposent d’ailleurs déjà les organes essentiels : frigidarium, tepidarium, et caldarium – ces deux derniers chauffés par un système d’hypocauste sur pilettes -, palestre, piscine (natatio) et annexes diverses.

plan-thermes

     Voici de quelle manière l’architecte et ingénieur militaire romain Vitruve conçoit les thermes dans son traité en dix livres De architectura, probablement rédigé en 30-26 av. J.C.  

  •   Il faut premièrement choisir la situation la plus chaude, c’est-à-dire qui ne soit point exposée au septentrion. Les étuves chaudes et tièdes doivent avoir leurs fenêtres au couchant d’hiver, et, si l’on découvre quelque empêchement pour cela, il faut les tourner au midi, parce que le moment de se baigner va ordinairement depuis le midi jusqu’au soir. Il faut aussi faire en sorte que le bain chaud pour les hommes, ainsi que celui des femmes, soient proches l’un de l’autre ; pour que l’on puisse chauffer les lieux où sont les vases de l’un et de l’autre bain avec le même foyer (…). Le sol et les étuves doivent être creux et comme suspendu; il sera établi de la manière suivant : il faut premièrement faire un dallage avec des dalles de terre cuite d'un pied et demi qui aillent en penchant vers le fourneau, en sorte que, si l'on y jette une balle, elle n'y puisse demeurer, mais qu'elle retourne vers l'entrée du fourneau; par ce moyen la flamme ira plus facilement sous tout le plancher. Sur ce dallage on établira des piles avec des briques de huit pouces, disposées et espacées en sorte qu'elles puissent soutenir des dalles de deux pieds en carré sur lesquelles sera le dallage (...). La grandeur des bains doit être en raison du nombre des habitants; mais leur proportion doit être telle qu'il leur faut de largeur un tiers moins que de longueur, sans comprendre le promenoir qui est autour de la piscine, et le corridor. La piscine doit être éclairée par en haut, afin qu'elle ne soit pas obscurcie par ceux qui sont à l'entour, et il faut que les promenoirs qui sont autour du bain soient assez grands pour contenir ceux qui attendent que les premiers venus qui sont dans le bain sortent (...).
  • Le laconicum, ou étuve à faire suer, doit être joint avec l'étuve qui est tiède, et il faut que l'une et l'autre aient autant de largeur qu'elles ont de hauteur jusqu'au commencement de la voûte, qui est en demi-rond; au milieu de cette voûte on doit laisser une ouverture pour donner du jour, et y suspendre avec des chaînes un bouclier d'airain par le moyen duquel, lorsqu'on le haussera ou baissera, on pourra augmenter ou diminuer la chaleur qui fait suer. Ce lieu doit aussi être arrondi au compas, afin qu'il reçoive en son milieu également la force de la vapeur chaude qui tourne et s'épand dans toute sa cavité.

       De architectura, Livre V, X

  L’agencement de thermes exigeait une intégration rationnelle des installations de chauffage et des annexes de service. Afin d’éviter toute déperdition de chaleur, il importait de concentrer les espaces à chauffer. Certains dispositifs techniques ne manquent d’ailleurs pas d’ingéniosité. Aux thermes de Sainte-Barbe, à Trèves, l’air circulant dans les hypocaustes était généré par un foyer (praefurnium) à sole inclinée qui donnait sur une galerie de chauffage à la base de laquelle coulait une rigole dont le courant évacuait les cendres vers la Moselle. A Chassenon, les escaliers impressionnants conduisant aux foyers et l’excellente conservation de ces praefurnia témoignent du rôle éminent de ces systèmes de chauffage par hypocauste. Mais ce qui fait l’originalité de ces thermes charentais, qui se déplient sur une superficie de 11 000 m2, c’est l’impressionnant réseau de couloirs souterrains voûtés qui court sous l’édifice, probablement pour la décantation des eaux. Quant aux locaux de service, ils abritaient les énormes réserves de combustibles et l’ensemble des dispositifs techniques liés au fonctionnement et à l’entretien. Aux thermes de Sainte-Barbe, ils constituent avec les conduits d’évacuation, un inextricable labyrinthe souterrain dans lequel s’affairait le personnel soumis à une chaleur et à une humidité à la limite du tolérable…

  On peine aujourd’hui, en visitant les ruines des thermes, à imaginer la richesse de  leur ornementation. Placage de marbre, peintures, stucs, mosaïques, statues, ajoutaient l’éclat du décor à la majesté des volumes. Aux thermes de Cluny à Lutèce, on ne peut qu’être admiratif devant le frigidarium, l’une des rares salles gallo-romaines qui ait conservé intégralement ses murs et sa voûte sur une hauteur de 14,50m. Sa décoration devait être grandiose si l’on en juge par les consoles sculptées conservées à la base des retombées des voûtes d’arêtes. Les bains publics d’Argentomagus étaient également décorés avec raffinement. Mais ce sont les thermes de Sainte-Colombe qui ont laissé les témoignages les plus significatifs du luxe déployé dans ces établissements. Parmi les œuvres les plus accomplies qui y furent recueillies figure la Vénus accroupie, conservée au musée du Louvre.

thermes-cluny1

                                                               Thermes de Cluny (Paris)

Au IVè siècle, le poète Ausone exalte les charmes des thermes mosellans :

  •   Ai-je besoin de citer ces édifices qui s'élèvent au milieu des vertes prairies, ces toits soutenus par des colonnes sans nombre ? Que dire de ces bains construits sur la grève du fleuve ? Une épaisse fumée s'en échappe, alors que Vulcain, englouti au fond de l'étuve brûlante, roule les flammes qu'il exhale dans les canaux pratiqués à l'intérieur des murailles revêtues de chaux, et condense la vapeur enfermée dans les tourbillons s'élancent au dehors. J'ai vu des baigneurs fatigués à force d'avoir sué dans la salle de bains, dédaigner les bassins et la piscine glacée pour jouir des eaux courantes et, retrouvant bientôt leur vigueur dans le fleuve, frapper et refouler en nageant ses vagues rafraîchissantes. Si un étranger arrivait ici des murs de Cumes, il croirait que Baïes l'Eubéenne a voulu donner à ces lieux un abrégé de ses délices : tant leur recherche et leur propreté ont de charme, sans que le plaisir qu'on y goûte exige aucun luxe.

   Ausone, La Moselle, 335-348

  Articles à consulter : Les thermes de Sens sur le blog "L'Yonne gallo-romaine", et sur le Blog de Lutèce : Délices et dérives des thermes romains.

Source : Voyage en Gaule romaine, G. Coulon & J.C. Golvin - éd. Actes Sud Errance

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9 mai 2011 1 09 /05 /mai /2011 17:42

  Dans son Histoire de l'Église de Reims, le chanoine Flodoard (mort en 996) raconte : "Lorsque la ville de Rome eut été fondée par Romulus et Remus, frère jumeaux, Remus fut mis à mort par les soldats de son frère. [...] Les soldats de Remus s'exilèrent, bâtirent notre ville et fondèrent la nation rémoise, car nos murs portent pour ornement les emblèmes des Romains et la porte à conservé jusqu'à nos jours le nom de Mars, qui selon l'opinion des anciens fut le père de la nation romaine. Sous la voûte à droite en sortant, est représentée, suivant la fable, la louve qui donne ses mamelles aux deux enfants Remus et Romulus." Voici pour l'origine mythique de la ville. Quant à sa christianisation, Flodoard ne craint pas de la faire remonter aux tout premier temps du christianisme, puisqu'il fait intervenir l'apôtre Pierre en personne : "Les premiers propagateurs de la foi, nos pères en Jésus-Christ par l'Evangile, ont toujours honoré les pontifes qui ont occupé le siège de Reims, le premier de la province. Ainsi le prince même de l'Église de Jésus-Christ le bienheureux apôtre saint Pierre, ayant ordonné saint Sixte archevêque, jugea à propos de l'envoyer dans notre ville avec des suffragants." Si ces deux épisodes de l'histoire de Reims tels que les raconte Flodoard relève bien du genre mythique, ils n'en disent pas moins l'ancienneté de la ville et l'importance du christianisme dans son destin.

 

  Au Ier siècle avant Jésus-Christ, tandis que les Gaulois s'opposent  aux troupes de César, l'oppidum de Durocorter (en gaulois) qui allait devenir plus tard la ville de Reims, est tenu par les Rèmes, une peuplade belge qui décident de se rallier aux Romains, ce qui favorisera leur victoire. L'alliance est votée par le Sénat de Rome. En -53, César ordonne au concilium Galliae de se réunir à Durocortorum pour y juger la conjuration des Sénons et des Carnutes. Les Rèmes ayant prouvé leur fidélité à Rome, Durocortorum est classée dans les cités fédérées, considérées comme indépendantes, et promue métropole de la vaste province romaine en Belgique seconde, territoire considérable qui correspond au nord de la France, à une bonne partie de la Belgique, et jusqu'à la partie méridionale des Pays-Bas, la ville gallo-romaine de Durocorturum fait l'objet, dès le règne d'Auguste, de gigantesques travaux d'urbanisme, dont témoigne la porte Mars, et connaît une belle expansion économique. Ses dimensions sont importantes et ses rues sont agencées sur le modèle orthogonal habituel. Sept grandes voies desservent la ville.

  La localisation de la ville en fait un site stratégique important et un centre administratif et économique dynamique - on connaît l'existence de manufactures impériales d'armes et de textiles, et l'on a conservé la trace des dons de certains agents impériaux en faveur de la toute jeune Église locale.

  Avec l'édit de Milan, dit de tolérance, promulgué par l'empereur Constantin (306-337) en 313, et qui accorde au christianisme le même statut qu'aux cultes païens, la nouvelle religion, d'abord tolérée, est rapidement favorisée, même si le paganisme ne disparaît pas immédiatement. Moins d'un siècle plus tard, en 380, par l'édit de Thessalonique, l'empereur Théodose Ier (346-395) déclare que "tous nos peuples doivent se rallier à la foi chrétienne". D'admis, le christianisme devient religion d'état, et les temples païens sont fermés et détruits. Chaque communauté chrétienne commence de s'organiser et élit à sa tête un évêque (du grec épiscopos, "surveillant"), qui nomment les prêtres pour l'exercice du culte, tandis que les diacres prennent en charge les questions d'organisation matérielle. A Reims, le développement du christianisme à partir de la seconde moitié du IIIè siècle entraîne l'émergence de deux nouveaux quartiers : le premier, au sud du forum antique, qui deviendra le coeur de la cité épiscopale; le second, à l'extérieur des remparts, dans un faubourg du sud de la ville, le long de l'axe principal, le futur quartier Saint-Rémi.

  En 357 et en 366, des guerriers germaniques font irruption dans la région mais sont reppoussés avant d'atteindre Reims.

  La première cathédrale de la ville est consacrée en 401. Elle est disposée selon un axe nord-sud qui va des arènes à un édifice important, peut-être un palais, et qui compte des arcs monumentaux, un forum, des thermes, etc... Dédiée à la Sainte Vierge, c'est dans cet édifice que Clovis Ier recevra le baptême.

  

Sources : Gérard Coulon, Les Gallo-Romains : vivre, travailler, croire, se distraire - 54 av. J.-C.-486 ap. J.-C.éd.Errance _ La cathédrale de Reims - Collection Rois de France. éd. Atlas

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12 mars 2011 6 12 /03 /mars /2011 01:30

L'élevage

 

  Les auteurs anciens ont à maintes reprises la prospérité de l'élevage en Gaule. Activité primordiale s'il en fût qui assurait la traction, fournissait la viande, lait et matières premières et pour l'artisanat textile, le travail de l'os et de la corne et la préparation des cuirs.

 

  Les textes anciens mentionnent entre autres la qualité des chevaux trévires, la renommé des oies de Morins (peuple de l'actuel Pas-de-Calais), des porcs, des Séquanes et des Ménapes, respectivement peuples de l'ouest du Jura et de la Flandre marécageuse.

 

  Les données archéologiques, plus diversifiées, apportent des éléments concrets. Certes des scènes pastorales trop souvent conventionnelles et stéréotipées sont reproduites par des sculpteurs, notamment sur les sarcophages. Mais plus évocatrices en dépit de leurs naïveté, sont des statuettes comme celle mise au jour à Thésée en Loir-et-Cher. Un pâtre tient son bâton de la main droite et de la main gauche, serre contre sa poitrine une flûtte de pan. Une stèle funéraire de Saint-Ambroix montre un couple de paysans éleveurs. L'homme tient des forces, c'est à dire des ciseaux à tondre les moutons. Particulièrement émouvante est l'épitaphe d'un berger de trente ans assassiné par un esclave. Au bas de la stèle retrouvée à Mayence en Allemagne, est figuré le malheureux berger qui, avec son chien, surveille ses moutons. Quant aux représentations d'Épona, la déesse cavalière, elles mettent en relief le rôle éminent du cheval.

  Deux autres sources évocatrices sont fournies par les innombrables figurations d'animaux - mosaïques, bas-reliefs, figurines en terre cuite, statuettes en bronze, fibules zoomorphes notamment - et par les empreintes de leurs pieds lorsqu'ils sont venus marcher fortuitement sur les tuiles encore fraîches. Moutons, chèvres, porcs, chiens, chats et poules ont ainsi imprimé leur pas dans l'argile.

  Les forces, les clarines en fer ou en bronze (clochettes suspendues au cou des animaux), les faisselles en poterie au fond percées de petits trous destinés à égoutter les fromages, les hipposandales et les busandales (semelles métalliques pour protéger les sabots des chevaux et des bœufs), pinces à castrer, mors de chevaux, constituent autant de témoignages directs sur l'élevage. Ferme-gal-rom-wasserwald

                                     Ferme gallo-romaine de Wasserwald (Bas-Rhin)

 

  Plus significatifs encore sont les bâtiments agricoles identifiés avec quelques certitudes comme écuries ou étables. Dans l'Yonne, à Crain par exemple, une pièce tout en longueur dans une modeste villa a livré sept anneaux régulièrement espacés le long de la cloison de séparation avec la pièce voisine. Retrouvés avec leur tige de fixation, ces anneaux pouvaient servir a attacher les animaux domestiques, d'autant qu'une porte donnant sur l'extérieur, permettait un accès direct au troupeau. Dernier indice enfin, le long de la cloison, le sol contenait des restes de céréales et autres graminées, suggérant la présence d'une mangeoire. Une autre pièce contenant les restes calcinés d'un cheval devaient être une écurie.

 

  L'archéozoologie, qui par analyse des vestiges osseux, étudie les animaux dans leur contexte archéologique, constitue une source d'information irremplaçable pour l'élevage, fournissant notamment pour un gisement donné, les espèces représentées, le nombre minimum d'individus présents, leur âge et leurs mensurations. Elle apporte également de précieuses données sur les modes alimentaires et les comportements en matière de chasse et de pêche.

  Les analyses archéozoologiques montrent que les espèces élevées à cette époque différaient quelque peu de celles que nous connaissons aujourd'hui. Le porc par exemple, élevé en liberté, était beaucoup plus vigoureux d'autant que les textes nous apprennent qu'on le croisait avec le sanglier. Deux types de bœufs coexistaient. Il en allait de même pour le cheval avec une variété indigène de petite taille et une espèce plus robuste qui apparaît à l'époque romaine. Quant au mouton, dont les deux sexes étaient pourvus de cornes, il était un peu plus petit que celui que nous connaissons. Ânes, chevaux, coqs, oies, sont également présent dans les fermes. Les Gallo-romains possèdaient également des animaux domestiques : chiens, chats...

 

  

  À Gournay-sur-Aronde (Oise), l'étude de différents ensembles archéologiques homogènes et bien datés à permis de suivre l'évolution morphologique des bœufs sur une période d'environ quatre siècles, du milieu du IIIè siècle avant Jésus Christ jusqu'au cour du IIè siècle de notre ère. Sur les gisement d'époque gauloise ne sont connus que des bovins de petites tailles. Les ensembles gallo-romains, quant à eux, livrent des animaux beaucoup plus grands. La différence de taille entre ces animaux est considérable puisqu'elle dépasse vingt centimètres ! Le grand bœuf gallo-romain se singularise aussi par une puissance bien supérieure au niveau des épaules et des cuisses, ce développement plus important des masses musculaires assurant un meilleur rendement en viande.

  L'apparition de ces grands bœufs, probablement dû à des croisements entre races gauloises et italiennes, n'élimina pas pour autant le petit bœuf indigène qui conservait manifestement toute son utilité pour les populations qui l'élevaient.

  boeuf-gallo-romain

L'apiculture

 

  Source essentielle du sucre dans l'Antiquité, le miel était évidement fort prisé mais son élaboration demeurait inexpliquée. «Le miel tombe des airs, affirmait Pline. Il est la sueur du ciel, sorte de salive des astres ou du suc des airs qui se purifient». D'autres auteurs pensaient que les abeilles le butinaient tel quel sur les fleurs ou bien qu'elles le fabriquaient à partir de la rosée... L'édit de Dioclétien mentionne deux qualités de miel, la meilleure à quarante deniers le setier, l'autre presque deux fois moins chère.

  La lecture des auteurs anciens qui ont traité l'apiculture, incline à penser que plusieurs types de ruches furent utilisées en Gaule romaine : ruches en paille, ruches en troncs d'arbres évidés, ruches en baguettes ou éclisses tressées étanchéifiées à l'aide de bouse de vache ou bien ruches horizontales en planches.

  Les traces archéologiques de l'apiculture gallo-romaine sont assez rares : deux plaquettes en os dans l'Yonne figurent des ruches en paille ou un pot enfumoir découvert dans les Alpes-Maritimes...

 

 

Source : Les gallo-romains, Gérard Coulon.

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12 mars 2011 6 12 /03 /mars /2011 01:29

  Dans le nord-ouest de la Gaule commence, au Vè siècle, une immigration dont l'histoire est mal connue, mais dont les conséquences devaient être fort importantes. Aujourd'hui encore, de toutes les provinces de France, la Bretagne est celle où la population a le plus parfaitement conservé sa physionomie, ses traditions, ses mœurs et sa langue : c'est dans ce passé lointain et mal connu qu'il en faut rechercher la cause.

 

  Sous l'Empire, la Bretagne avait été romanisée : nul témoignage ne la montre comme uneFrance Cotes d Armor Cote de granit rose 01 sorte d'asile où la langue et les institutions celtiques se seraient maintenues avec plus d'énergie qu'ailleurs. Des voies romaines la sillonnaient, on y a retrouvé la trace de monuments et de riches villas. Plus tard, le christianisme y pénétrera.  Toutefois, les évêchés de Nantes, de Rennes et de Vannes, sont les seuls dont on puisse affirmer avec certitude l'existence au Vè siècle. Malgré tout, cette région couverte de forêts était, sur bien des points, encore très sauvage. 

  Le IVè siècle fut difficile pour les habitants de cette région, opprimée par les fonctionnaires romains, abandonnée sans défense aux ravages des pirates saxons, elle subi ensuite, au Vè siècle, les violences des Alains. Un écrivain grec, souvent bien informé, Procope, affirme que nul pays en Gaule n'était plus désert.

 

  Les Bretons de la Grande-Bretagne étaient dans une situation plus désespérée encore. Rome ayant retiré de l'île ses légions, ils avaient à lutter contre les attaques des Pictes et des Scots du côté de la terre, des Saxons du côté de la mer. Vers 446, ils firent appel à Aétius, mais en vain. Ils finirent par traiter avec les Saxons et les Angles. Trahis bientôt pas ces dangereux alliés, certains se résignèrent à l'esclavage, d'autres se réfugièrent dans les montagnes et les forêts, ou encore ils s'expatrièrent. «Ils s'embarquaient, en poussant de grandes lamentations, dit Gildas, qui plus tard raconta leurs malheurs, et, tandis que le vent gonflait leurs voiles, ils chantaient avec le Psalmiste* : Seigneur, vous nous avez livrés comme des agneaux à la boucherie et vous nous avez dispersés parmi les nations.»

  Dès le milieu du Vè siècle, ces bandes d'émigrés débarquent sur les côtes de l'Armorique.Boudicca «Notre race, écrivait au IXè siècle Wrdisten (Gurdisten), abbé de Landevennec, tire son origine de l'île de Bretagne. Elle est la fille, la progéniture chérie de la race insulaire; elle fut jadis amenée dans des barques sur nos bords à travers l'océan Britannique, au temps même où le territoire de sa mère tomba au pouvoir de la race saxonne... Se voyant en sûreté sur cet asile, elle s'établit tranquillement, sans guerre, sur le rivage.» Le témoignage de l'abbé de Landevennec est quelque peu discutable sur ce point : car quand ils furent en nombre, ils agirent en conquérants.

  Dès 461, Mansuétus, «évêque des Bretons» siège du concile de Tours; plus tard, vers 470, un chef Breton, Riothime, est au service de Rome, il lutte contre les Wisigoths dans la région de la Loire. Par la suite, très souvent les immigrants arrivent d'outre-mer sous la conduite, non de chefs guerriers, mais d'évêques, de prêtres, de moines, car ils viennent d'un pays fortement évangélisé.

Breton-BD1Breton-BD2 Ils s'établissent sur le littoral, puis ils pénètrent dans l'intérieur du pays où s'épaissit la forêt : ils fondent des évêchés, des monastères; ils implantent les institutions et les mœurs celtiques. Bientôt l'Armorique prendra le nom de Bretagne, et la langue celtique, telle qu'on la parlait au delà de la Manche, deviendra la langue du pays.

  L'histoire de la Bretagne est riche, cependant de nombreuses sources proviennent de légendes écrites longtemps plus tard, et qui souvent ne s'accordent pas entre elles. Il faut par conséquent être prudent sur ce qu'on lit.

 

* auteur de psaume

 

Source : Histoire de France, Tome III. Ernest Lavisse _  Images BD : Histoire de Bretagne Tome I, Reynald Secher et René Le Honzec

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11 mars 2011 5 11 /03 /mars /2011 01:21

  Au 1er août 12 avant Jésus Christ, Drusus, beau-fils d'Auguste et gouverneur de la Gaule, inaugure au confluent de la Saône et du Rhône un autel dédié à Rome et à Auguste.

 

  À cette cérémonie, il convie les représentants des Trois Gaules, qui célèbrent pour la première fois le culte impérial. Depuis lors, l'assemblée des Gaules se retrouve tous les ans à la même date autour d'un sanctuaire fédéral dont l'autel forme le principal monument.

  Lorsque Drusus consacre, sur les directives d'Auguste, l'autel des Trois Gaules, le recensement des biens et des hommes de ces régions, commencé en 28, vient de se terminer. La Gaule, qui a mal réagi à cette opération, est agitée. Avant de pertir à la conquête de la Germanie, Drusus doit calmer la population et s'efforcer de l'intégrer à la communauté romaine. Le meilleur moyen d'y parvenir est de rassembler les notables gaulois. La méthode expérimentée est l'introduction d'un nouveau culte : celui de Rome et d'Auguste, qui rassemblera dans une même ferveur et un même élan de fidélité à l'Empire les représentants des «Trois Gaules» : l'Aqitaine et les futures Lyonnaise et Belgique. C'est pour ce culte rendu dans un sanctuaire fédéral qu'est élevé l'autel impérial.

 

  C'est exactement à Condate, le territoire fédéral qui domine, face à Lugdunum (Lyon), lemonnaie-Autel de Lyonconfluent du Rhône et de la Saône, que se dresse le sanctuaire de Rome et d'Auguste. Le choix du lieu a été dicté par la situation de Lugdunum, à la jonction des trois provinces de la Gaule chevelue, et par son rôle de capitale du pays. L'autel qui n'a jamais été retrouvé, est connu par les monnaies antiques. Établi au sommet d'une terrasse à laquelle menaient deux larges rampes, il se présentait sous la forme d'un rectangle, entouré de deux hautes colonnes portant une statue de la victoire. Au monument sont ajoutées bientôt d'autres constructions qui font partie du même complexe religieux : ainsi un amphithéâtre où se déroulent les jeux qui accompagnent la tenue de l'assemblée annuelle.

  plan sanctuaire 1er

    Dans le sanctuaire fédéral, le culte est rendu à Auguste, puis à ses successeurs les empereurs régnants. Il est rendu aussi à Rome, déesse inventée par les États grecs d'Asie Mineure pour exprimer leur loyalisme envers leur nouveau maître. Aucun témoignage direct n'a été laissé par les auteurs anciens sur la forme même du culte. À côté des cérémonies liées à la réunion du conseil des Trois Gaules, il consiste probablement à célèbrer les anniversaires de la maison impériale et surtout celui de l'empereur. Des sacrifices exécutés sur l'autel font partie des rites.

  Ces cultes officiels n'empêchent pas la vénération d'anciens dieux gaulois : Cernunnos, Épona, Sucellus...

  Les divinités romaines sont assimilées aux dieux gaulois pour former le panthéon gallo-romain. Sous les images et noms de Mercure et de Mars, dieux les plus révérés, se cachent des divinités indigènes. C'est pourquoi ces dieux présentent de nouvelles fonctions, tel Mercure qui devient patron des commerçants... Hercule, Apollon et Vulcain jouissent aussi d'une grande popularité. 

   Le responsable du culte est le prêtre ou sacerdos de Rome et d'Auguste à l'autel du confluent. Désigné chaque année par ses pairs de l'assemblée des Trois Gaules, il estAmphitheatre 3-gaulesrééligible. Cette charge prestigieuse, qui comporte de nombreux honneurs, est assortie de lourdes contreparties financières. Au prêtre, nécessairement riche, incombe la construction de monuments. C'est le prêtre fédéral Caius Julius Rufus, par exemple, qui en 19, édifie l'amphithéâtre. Il revient également au prêtre d'organiser les jeux et de financer les combats de gladiateurs, dont le coût est très élevé.

  Dans sa fonction, le prêtre est aidé par divers assistants, parmi lesquels un administrateur et un gérant chargé de la caisse de l'assemblée des Trois Gaules. Celle-ci est sans doute alimentée par les cités ou les peuples.

 

  L'assemblée des Gaules n'est pas une création. Elle existait avant la conquête romaine, et se doublait alors d'un autre assemblée, annuelle, celle des druides, chargés des affaires religieuses mais aussi des matières profanes comme les querelles publiques et privées.

  Le conseil des Gaules, convoqué à partir d'Auguste, est formé quant à lui des représentants ou légats de soixante cités ou peuples, désignés parmi les anciens magistrats ou les décurions. Ils sont plusieurs centaines à se retrouver ainsi, jusqu'au milieu du IIIè siècle, le er août de chaque année à Condate. Tout en remplissant ses obligations religieuses envers Rome et Auguste et en démontrant la loyauté du pays à l'Empire, l'institution se préoccupe des intérêts des trois provinces. À plusieurs reprises, elle joue un rôle politique. En demandant l'admission des Gaulois au sénat en 48; en envoyant un orateur gaulois féliciter Néron après la disparition d'Agripine...

  En se présentant ainsi comme l'intermédiaire entre les habitants des Trois Gaules et l'empereur romain, cette assemblée, dont on a pu dire qu'elle était le premier parlement français, a contribué à éveiller la conscience d'une identité nationale.

 

Sources : Les grands événements de l'histoire de France, Larousse - Géographie de Strabon,Amédée Tardieu

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10 mars 2011 4 10 /03 /mars /2011 15:59

  La fertilité de la Gaule a été vantée à maintes reprises par les auteurs anciens. Strabon notamment qui, dans sa Géographie, après avoir souligné la similitude entre la Narbonnaise et l’Italie, poursuit : « Tout le reste du pays produit le blé en abondance, du millet, des glands (…). Rien n’est inculte si ce n’est dans les secteurs marécageux ou boisés. »

  Florissante au temps de l’indépendance (jamais les légions romaines ne manquèrent de blé pendant les huit années de la guerre des Gaules !) l’agriculture connue une nouvelle expansion après la conquête où de nombreuses villae voient le jour.

La villa est un élément fondamental du paysage des campagnes romaines. C’est une grandemaquette villa romaine exploitation rurale constituée de bâtiments résidentiels et agricoles au coeur d’un domaine cultivé, qui appartient en général à de riches propriétaires fonciers. La villa réunit donc les fonctions résidentielles et économiques. Ces deux aspects sont nettement différenciés dans son architecture par deux ensembles séparés : la partie résidentielle appelée pars urbana et la partie agricole ou pars rustica . On la qualifierait aujourd'hui de “grande ferme".

Quelques villae apparaissent en Gaule dès le Ier siècle avant J.-C., immédiatement après la conquête romaine : c’est le cas de la villa de Richebourg, dont le propriétaire a des relations privilégiées avec Rome. Mais ce modèle méditerranéen s'impose véritablement dans nos régions à partir du Ier siècle de notre ère. Le réseau des villae est assez dense au nord de la Gaule et sur le territoire des Yvelines actuelles (on recense en moyenne un site rural antique tous les 2 à 4 kilomètres) : ce phénomène témoigne de l'adoption par les grands propriétaires locaux de modes de vie romains, mais aussi d'une emprise agricole intense sur le territoire.

 

Le domaine agricole

Le domaine agricole cultivé est de taille variable. Il peut s’étendre sur une superficie de 10 à 500 jugères soit de 2,5 à 500 ha. Il est le plus souvent exploité sous les ordres d'un intendant, le villicus, et cultivé par des esclaves ou des ouvriers. Une population nombreuse (parfois plusieurs centaines de personnes) y vit en permanence pour cultiver la terre.

 

  Les céréales

 Le blé constituait l’élément essentiel de l’agriculture antique. Pline souligne, entre autres, l’importance du blé amidonnier (triticum dicoccum) dont il mentionne des variétés locales qu’il désigne sous le nom de bracis ou de scandala. Le blé commun (triticum vulgare), qu’il appelle sigilo, convient surtout, selon lui, aux régions humides. Quant au blé ordinaire, mentionné sous la forme triticum, il est cultivé dans les régions les plus septentrionales. D’autres céréales sont citées par les auteurs latins. Le millet pour la moisson duquel Pline signale l’utilisation d’une sorte de peigne égreneur ; l’orge dont on tirait la bière (kourmi) ; le panic ou le millet des oiseaux, surtout cultivé en Aquitaine ; le seigle, l’avoine et le sésame.

 A ces données textuelles s’ajoutent les informations fournies par les études de graines et de pollens effectuées sur des prélèvements archéologiques. Les informations permettant d’approfondir le sujet faisant défaut, les connaissances sont limitées. Toutefois, grâce à des découvertes effectuées en milieux ruraux, on sait que des grains de blé étaient cuits dans les villas de Sauvian (Hérault), et de Montréal (Gers). Du blé poulard a été identifié à la villa de Bouche Rolland dans l’Aveyron et du blé ordinaire dans une couche du IIIe siècle à la bourgade de Liberchies en Belgique. Une ferme de l’Aveyron, aux Infruts, a fournis des grains de seigle et d’orge d’hiver. Sur l’oppidum de Joeuvre, à Saint-Maurice-sur-Loire, la fouille d’un établissement agricole a livré des céréales datant du IVe siècle.

 L’orge a été également identifiée à plusieurs reprises comme à Crain dans l’Yonne et on signale même une amphorette découverte dans le port antique de Marseille qui portait en lettre peinte.

La vigne

  La vigne est introduite en Gaule avec la conquête romaine, d'abord dans le sud, puis jusqu'aux rives de la Moselle. Dès le Ier siècle après J.-C., le vin gaulois concurrence le vin italien, et l’on en trouve dans les caves des notables de Rome. Des installations liées à la fabrication du vin ont été mises en évidence dans de nombreuses villae : tout d’abord, les grappes sont foulées au pied dans une cuve afin de réduire leur volume. Ensuite, on les met dans un pressoir pour les comprimer grâce à un système de levier. Le jus qui en sort est recueilli dans des jarres que l’on vide dans des dolia rangées dans un cellier.

  La viticulture en Gaule connaît un rapide essor, à tel point qu'à la fin du premier siècle de notre ère, les vins de la Gaule méridionale envahissent lemosaïque-viticulteur marché italien ! Aussi afin de mettre un terme à la surproduction de vin, l'empereur Domitien (81-96) ordonna-t-il l'interdiction de toute plantation nouvelle en Italie et la destruction de la moitié des vignes dans les provinces. Cette mesure fut bien peu suivie d'effet et le vignoble gaulois s'étendit progressivement vers le nord. C'est ainsi qu'il gagna la Bourgogne puis le pays trévire (Luxembourg, Allemagne) au cours du IIIè siècle. Finalement, entérinant sagement un état de fait, l'empereur Probus (276-282) rendit libre la viticulture.

 

L'olivier

 

  Limité au sud pour des raisons climatiques, la culture de l'olivier, si l'on en croit Pline, ne réclamait aucun soin particulier. Même si l'affirmation paraît exagérée (labour, fumage et taille constituaient un minimum chaque année) cette culture ne devenait en tousoliviers cas rentable qu'à l'issue d'une dizaine d'années, laps de temps nécessaire pour qu'un olivier planté fournisse ses premiers fruits. Les olives sont consommées partout, sous forme d'huile, pour la cuisine, pour l'éclairage, mais aussi comme lotion corporelle.

  De très nombreuses huileries ont été reconnues dans le Midi, notamment dans le département du Var où plus d'une centaine d'installations sont recensées. Ces huileries produisaient trois qualités : huile de première pression - huile vierge, la plus recherchée - et deux autres de moindre qualité obtenues par deux pressions successives. Au début du IVè siècle, l'Édit du Maximum différencie d'ailleurs nettement ces trois qualités avec des prix atteignant respectivement 40, 24 et 12 deniers le setier.

  Les olives étaient également commercialisées en amphores, conservées dans du vin cuit.

  

  La plantation d'arbres fruitiers se développe de manière importante. Dans le potager, on trouve également des légumes, ainsi que les plantes aromatiques qui servent tous les jours dans la cuisine.

 

Sources :  Gérard Coulon - Les Gallo-Romains, éd. A. Colin _ Dossier pédagogique - Service archéologique départemental des Yvelynes. http://www.ac-grenoble.fr/lycee/diois/Latin/archives/civilisation/richebourg.pdf

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9 mars 2011 3 09 /03 /mars /2011 13:09

    Un remarquable ensemble de trois panneaux provenant d'un pavement de domus de Vienne (Isère) et datant de 175 à 225 ap. J.C., en tessel de marbre et calcaire, a été acquis par le musée du Louvre, lors d'une vente publique le 5 décembre dernier.

 

Capitale du peuple allobroge au IIè siècle avant Jésus-Christ, promue en 50 avant J.C. colonie latine par Jules César (colonia lulia Augusta Florentia Vienna), Vienne constitue la limite septentrionale de la province de Narbonnaise fortement romanisée. Avec ses faubourgs, Sainte-Colombe et Saint-Romain-en-Gal, elle a livré un très vaste ensemble de mosaïques (142 pavements ou fragments de pavement recensé à ce jour), qui témoignent de l'intense activité des ateliers locaux, sans équivalent dans une autre ville de Gaule.

  Le premier panneau illustre la chasse de Méléagre contre le sanglier de Calydon, un thème classique de la peinture murale à l'époque romaine, souvent repris en mosaïque sous forme d'emblema (décor central d'un pavement) ou intégré à des scène de chasse plus vastes. mosaïque1

  Le deuxième montre un couple de canards au centre d'un médaillon décoré d'une épaisse couronne de feuilles de lierre chargée de fruits.

mosaïque2

  Le troisième reprend la même organisation du décor : un buste masculin, peut-être un philosophe ou un poète portant une couronne de lierre et un manteau, s'inscrit dans un large médaillon orné de feuilles de chêne.

mosaïque3

  Ces trois panneaux portent donc des sujets sans relation les uns avec les autres, qui à l'exception des canards ne sont pas courants à Vienne. Ils appartenaient à un pavement constitué d'un quadrillage de cases carrées à décors multiple, type de composition bien attesté dans la production de mosïques viennoises.

  Exhumés en 1881 lors de travaux de fondations d'un immeuble au 5, rue Peyron à Vienne, déposés vraisemblablement durant les fouilles, ils ont tous trois été montés sur des supports de ciments carrés, ceints d'une encadrement métallique. Publié dès 1890, ils ont été classés Monuments historique par un arrêté du 2 mars 1937. En 1981, ils sont intégrés dans le Recueil général des mosaïques de la Gaule. III. Province de Narbonnaise. 2 Vienne par Janine Lancha. Ils resteront dans l'immeuble où ils ont été découverts jusqu'à leur mise en vente publique en 2010.

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27 février 2011 7 27 /02 /février /2011 13:49

Deuxième partie de l'article consacré au grand commerce en Gaule-Romaine. 1ère partie cliquez ici

 

La céramique sigillée[1]

  Au rang des produits commercialisés elle occupe une place privilégiée puisque pratiquement chaque fouille en livre au moins quelques tessons.

  L’engouement des Gallo-Romains pour cette céramique fut si vif qu’à l’époque de leur activité maximale, les ateliers du sud et du centre couvrirent non seulement les besoins du pays mais, par une politique commerciale conquérante, ils réalisèrent une spectaculaire percée dans le monde romain tout entier. N’a-t-on pas découvert dans les ruines de Pompéi une caisse non encore déballée contenant quatre-vingt-dix vases en céramique sigillée et trente lampes provenant des officines de la Graufesenque[2] ? ceramique sigillee metz

 Ces céramiques furent largement exportées dans la province d’Espagne. Les fouilles de Belo, Ampurias, Tarragone en Espagne et Coïmbra (Conimbriga) au Portugal, ont en effet révélé le quasi-monopole des céramiques sigillées de la Graufesenque pendant un demi-siècle, des années 50 à la fin du 1er siècle. Une solide organisation concertée avec les négociants du port de Narbonne, permit cette conquête du marché espagnol avant que les productions locales n’y supplantent les poteries gallo-romaines.

 Mais le territoire ibérique ne fut pas le seul à être inondé par la production de la Graufesenque, ses productions étaient également exportées en Grande-Bretagne (partie orientale jusqu’aux limites de l’Ecosse), sur les frontières Rhin-Danube, dans l’ouest de l’Italie et, de façon plus clairsemée, en Afrique du Nord jusqu’à Alexandrie et au Proche-Orient.

 L’officine voisine de Banassac (Lozère) dont la période de production s’étend de 60 à 180 environ, s’orienta délibérément vers l’exportation en direction de l’Europe Centrale que l’autorité romaine s’efforçait alors de mettre en valeur. Aussi la clientèle, disséminée dans les postes du limes rhétique et danubien, fut-elle essentiellement militaire. La voie de diffusion la plus courte atteignait probablement Genève par le Rhône puis Lausanne, Avenches, suivait la vallée de l’Aar, franchissait le Rhin et rejoignait le cours supérieur du Danube dans l’actuel Württemberg en Allemagne. Descendant le cours du fleuve, les productions de Banassac, furent aussi vendues jusqu’en Hongrie et même dans la province de Dacie, actuelle Roumanie. Des tessons ont même été trouvés à Antioche sur les côtes de Syrie, acheminés peut-être par cet itinéraire. Quant aux produits de l’atelier de Banassac découverts à Pompéi, il est fort probable qu’ils aient été transportés par voies maritimes. Amphore-espagnole

 Le marché intérieur de la Gaule fut lui aussi pénétré par des productions étrangères, notamment par les amphores espagnoles contenant l’huile d’olive de Bétique, aujourd’hui l’Andalousie. Identifiable par leur panse sphérique et les marques imprimés sur leurs anses rondes, ces amphores importées, ajoutés à l’exportation de la céramique sigillée, témoignent de la vitalité des échanges commerciaux.

  [1] La céramique sigillée est une céramique fine destinée au service à table caractéristique de l'Antiquité romaine. Elle se caractérise par un vernis rouge grésé cuit en atmosphère oxydante, plus ou moins clair et par des décors en relief, moulés, imprimés ou rapportés. Certaines pièces portent des estampilles d’où elle tire son nom, sigillée venant de sigillum, le sceau.

  [2] La Graufesenque est un site archéologique situé sur la commune de Millau (Aveyron) à 2 kilomètres de la ville, dans une petite plaine alluviale formée à la jonction des rivières du Tarn et de la Dourbie, sur le territoire des Rutènes

 

Découverte d'une amphore espagnole : (vidéo)

 

Source : Les Gallo-romains- Gérard Coulon éd. A. Colin _

 

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