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10 mars 2012 6 10 /03 /mars /2012 10:11

                                                        Vercingétorix

 

      Chapitre IX - Le soulèvement de la Gaule.

 

5. Progrès de la conjuration : intervention de Commios et de Vercingétorix.

 

Tels étaient les propos qui s’échangeaient dans les grandes réunions d’hommes, les jours de  marchés et les jours de fêtes. L’hiver, la population est moins dispersée dans les champs, les fêtes sont plus nombreuses, les familles se rapprochent davantage. Les chefs, parents, amis ou complices d’Acco et des meurtriers de Tasgei, profitaient de ces assemblées pour travailler leurs clients et la foule. Deux surtout parlèrent et agirent : Commios en Belgique et Vercingétorix dans la Gaule centrale.Commios

Commios l’Atrébate, roi chez les Morins, répudiait lui aussi cette amitié de César qui lui avait valu sa royauté. Il se faisait le chef du complot dans le Nord, où son nom était fort connu. C’était un homme intelligent, adroit, actif, quoique un peu trop agité pour l’œuvre qu’il s’agissait de mener à bonne fin. Ses démarches dans les cités voisines firent surprendre son secret par Labienus ; il se laissa attirer dans une embuscade, d’où il sortit grièvement blessé, réduit à l’impuissance, et la conjuration fut ajournée en Belgique.

Le légat de César paraît avoir été moins au courant de ce qui se passait entre la Seine et les montagnes du Centre. Vercingétorix allait et venait sans être inquiété, et sa parole ardente et fière réveillait l’amour de l’antique liberté.

Peu à peu l’entente se fit ou se renoua entre les principaux chefs. Des réunions plus  nombreuses, plus mystérieuses et plus décisives furent tenues dans les bois ou dans des retraites invisibles, et l’on y parla nettement des moyens de soulever la  Gaule. De sûrs messagers circulèrent rapidement entre toutes les cités du Centre et de l’Ouest, de Génabum à Gergovie, de Lutèce jusqu’en Armorique  (décembre 53).

 

6. Assemblée générale des conjurés.

 

Enfin, le rendez-vous général fut fixé dans une de ces forêts profondes où la Gaule conjurée pouvait délibérer sans autre crainte que celle de ses dieux. Tout contribua à donner à cette assemblée une poignante solennité. Les principales  nations étaient représentées par les plus nobles de leurs chefs ; les hommes, au fond de ces bois, se trouvaient plus près de la divinité ; on avait apporté les étendards militaires des tribus, signes aimés de leur gloire d’autrefois et symboles de leur génie éternel.

On se mit aisément d’accord sur les points essentiels. — Le  soulèvement devait avoir lieu sur-le-champ, en plein hiver, pendant que César, ignorant tout, était séparé de ses légions : en son absence, les légats n’oseraient point bouger, lui-même craindrait de revenir sans une armée pour escorte. Pourrait-il même quitter Ravenne, où il se trouvait en ce moment ? D’étranges nouvelles venaient d’arriver d’Italie : Clodius, l’ami de César, avait été tué (30 décembre 53) ; l’incendie ravageait le forum, la république était en danger ; le sénat armait des légions, sans doute contre le proconsul. Ces nouvelles, défigurées par la distance et l’exagération habituelle aux Gaulois, leur donnaient une excitation de plus, achevaient de les affermir dans leur décision. — César pourrait être pris entre deux adversaires, le sénat et la Gaule, il fallait, par un coup de main, lui couper la route des camps. La prise d’armes devait avoir lieu, à quelques heures près, le même jour dans toutes les cités conjurées.

Il fallut décider alors quelle nation et quels chefs auraient le périlleux honneur de donner le signal. On fit de belles promesses à ceux qui voudraient, au péril de leur vie, se dévouer à la liberté de la  Gaule. Les Arvernes ne pouvaient être appelés à ce rôle, puisque les chefs de la nation, Gobannitio et les autres, étaient hostiles au parti des patriotes. Les Carnutes, au contraire, étaient tout désignés pour le remplir : ils étaient, depuis deux ans, entraînés contre César sans retour possible ; leur territoire étant au centre de la Gaule, le signal qu’ils feraient arriverait en même temps à toutes les nations conjurées. Ils acceptèrent  d’eux-mêmes de commencer le combat, et de faire la première libation de sang romain.

Il est probable qu’on agita enfin la question du commandement suprême. Peut-être promit-on dès lors à Vercingétorix de rendre la suprématie au peuple arverne, s’il parvenait à le rendre à la cause de la liberté.

Les Carnutes avaient expérimenté par deux fois l’humeur inconstante de leurs compatriotes : ils demandèrent des garanties, pour n’être pas abandonnés dans cette aventure capitale. L’usage était en Gaule de laisser des otages entre les mains des chefs envers lesquels on s’engageait : mais à le faire maintenant, on eût risqué d’ébruiter le complot. Alors, et toujours sur la proposition des Carnutes, on remplaça le lien corporel des otages échangés par le lien religieux du serment collectif. — Les étendards sont approchés et réunis en faisceau, ce qui est le symbole de l’entente des tribus associées : les chefs les entourent, et, les mains étendues vers ces témoins des patries conjurées, ils prêtent serment de répondre au signal donné. — C’était la plus puissante des cérémonies, l’acte mystérieux et redoutable d’une fédération sacrée. Les chefs, désormais, n’appartenaient plus qu’à leurs dieux, gardiens de la cause et du serment.

Des remerciements  furent votés aux Carnutes. Le jour précis de la révolte fut fixé. On arrêta sans doute un système de signaux et de crieurs pour mettre ce jour-là Génabum en  communication rapide avec le reste de la Gaule. Puis on se sépara. Vercingétorix, à Gergovie, attendit le mot d’ordre.

Pendant ce temps. César, à Ravenne, suivait avec inquiétude les événements de Rome. C’était le fort de l’hiver. Les fleuves débordés avaient détruit les routes des plaines ; les sentiers des montagnes disparaissaient sous la neige ; les ruisseaux étaient pris par la glace ; les Alpes et les Cévennes étaient devenues impraticables, et leur double muraille fermait la Gaule à César (52, milieu de janvier).

 

À suivre...

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8 mars 2012 4 08 /03 /mars /2012 07:08

   À la suite de la pression exercée par les Anglo-Saxons contre les Bretons pour les refouler vers l’ouest de la Grande-Bretagne, l’émigration en Armorique prit bientôt des proportions considérables. Dès 461, on signale un évêque breton, Mansuetus, au Concile de Tours. Quelques années plus tard, un chef breton, Riothime, à la tête de Bretons armoricains, répondit à l’appel de l’empereur Antheonius, qui lui demandait de défendre Bourges contre les Wisigoths. Il fut battu à Déols. D’autre part, à la même époque Sidoine Apollinaire, évêque de Laon (vers 488), signalait que les Bretons étaient établis sur la Loire.

   L’établissement des Bretons insulaires en Armorique entraîne le changement du nom même du pays dès la fin du IVe siècle, l’Armorique, au moins dans une partie occidentale fortement occupée par les Bretons, n’était plus appelée que Britannia, la Bretagne.

  L’émigration de Grande-Bretagne en Armorique se fit sans doute par tribus ou factions de tribus. Elle s’accomplit au hasard de la conquête saxonne, sans aucun plan d’ensemble. Une flottille partait sous la direction d’un tiern (chef), ou d’un moine, et cinglait vers l’Armorique que l’on savait déserte. Arrivés dans la péninsule, les exilés se groupaient autour de chefs puissants : ce fut l’origine des principautés créées par les Bretons sur le sol de leur nouvelle patrie.

 

     Les Principautés bretonnes.

 

  Ces principautés furent au nombre de trois : la Domnonée, la Cornouaille et le Bro-Waroch ou Bro-Erec.

 

     La Domnonée.

 

   La Domnonée désigne, jusqu'au IXe siècle, tout le nord de la péninsule armoricaine, depuis l'Elorn jusqu'au Couesnon. La Domnonée de Grande-Bretagne, actuellement presqu’île de la Cornouailles anglaise, fournit un grand contingent d’émigrés. Toutefois, parmi les habitants de la Domnonée armoricaine, depuis l’Elorn jusqu’à la rivière de Morlaix, dans cette partie de la péninsule qu’on le Léon, les Gallois, venus de Caër-Léon ar Wyse, s’y établiront en grand nombre. Les abbés qui ont fondé les premiers monastères de la Domnonée armoricaine, saint Pol-Aurélien, saint Lunaire, saint Samson, saint Magloire, saint Méen, sont en effet d’origine galloise, tandis que saint Tutwal ou saint Tugdual, premier évêque de Tréguier, était venu de la Domnonée insulaire.carte-armorique.jpg

 

     La Cornouaille.

 

  Un autre groupe d'émigrants, les Cornovii, qui occupaient le nord de la Grande-Bretagne, pressés par l'invasion saxonne, descendirent vers le sud et se fixèrent à la pointe de la Domnonée insulaire, à laquelle ils donnèrent le nom qu'elle porte encore : Cornouailles, Cornwall. Mais une forte proportion de cette population, pour mieux échapper à l’emprise des envahisseurs germanique, passa la mer et vint s’établir  entre l’Elorn et l’Ellé. Le sud-ouest de l’Armorique portera désormais le nom de Cornouaille. Ces Cornovii ont joué un grand rôle dans l’émigration bretonne. Les noms de beaucoup de paroisses du Cornwall anglais se retrouvent dans la Cornouaille armoricaine. Selon Joseph Loth, « le point capital à relever, c’est que la langue bretonne actuelle forme avec le cornique qui fut parlé dans le Cornwall anglais jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, un groupe beaucoup plus intime vis-à-vis du gallois ».

 

     Bro-Werec.

 

  Un troisième lot d'émigrants vint s'établir le long des côtes du Morbihan, depuis l'embouchure de l'Ellé jusqu'à l'estuaire de la Loire. On ne sait trop de quelle région de Grande-Bretagne ils provenaient, sans doute du pays de Galles. Ils formèrent le principauté du Bro-Werec, nom d’un chef fameux, Waroc, qui lutta contre les Francs.

Malgré l’apport de ces émigrants, le Vannetais oriental fut faiblement celtisé et la ville de Vannes elle-même ne tomba définitivement aux mains des Bretons qu’au IXe siècle.

Cette prise de possession du sol par les Breton se fit sans doute par la force, là où les Armoricains étaient en nombre suffisant pour résister aux émigrants dont le christianisme encore récent n’avait point éteint l’humeur guerrière.

 

     La receltisation de l'Armorique.

 

  Dans l’œuvre de « receltisation » de l’Armorique, il faut distinguer deux zones : à l’ouest, l’élément celtique domina complètement, car cette région était en partie dépeuplée. Certains noms de localités, comme La Feuillée, indique cependant la persistance de l’élément armoricain. Mais ces îlots ne tarderont guère à être noyés dans le flot de l’émigration.

  À l’est de l’Armorique, au contraire, où la population armoricaine était plus dense, il se forma, dans ce qu’on appelle aujourd’hui la Haute-Bretagne, ou pays gallo, une zone mixte à la fois bretonne et armoricaine.

  Des colonies d’émigrants s’installèrent assez loin vers le nord-est de la péninsule (Saint-Hilaire-du-Harcouët, Landivy, Pontmain, Landréan, etc ., sont des noms d’origine bretonne). Les abords de Rennes (Bruz, Pléchâtel, etc.) et les abords de Nantes (Guérande, Paimbœuf) furent partiellement occupée par les Bretons. Tandis que les noms de lieu en é, comme Vitré, Aubigné, Acigné, indiquent la persistance de l’élément armoricain, au contraire des noms en ac (Comblessac, Avessac, etc.), marquent la prépondérance de l’élément migrateur. La fusion entre ces deux rameaux celtiques, les Armoricains et les Bretons ne se fit guère qu’au Xe siècle après la formation du royaume de Bretagne.

  « Sans l’émigration bretonne, la péninsule armoricaine aurait été un pays de langue latine province du royaume des Francks, languissante, inculte désolée longtemps encore souillée de paganisme…

L’émigration bretonne lui a donné un peuple nouveau de race et de langue celtique, peuple fier, énergique, indépendant, qui l’a défrichée, fécondée, christianisée en un mot qui en a fait la Bretagne…

Voilà ce que les émigrés ont apporté en ce pays, voilà ce que ce pays leur doit. » (A. La Borderie, Histoire de Bretagne t.I)

 

 

Source : Histoire de Bretagne, H. Poisson • J.P. Le Mat éd. Coop breizh

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7 mars 2012 3 07 /03 /mars /2012 09:16

                Vercingétorix

 

     Chapitre IX - Le soulèvement de la Gaule.

 

3. Campagne de 53. Départ de César.

 

Mais, en mars 53, le signal fut encore donné trop tôt : aucune autre nation du Centre ne se trouva en mesure de suivre l’exemple des Éburons et des Trévires, des Sénons et des Carnutes.

César agit avec cette rapidité de décision qui est le trait distinctif de sa nature. Il ne laissa pas au mouvement le temps de s’étendre vers le Sud. L’assemblée de la Gaule à peine réunie, à Samarobrive, et l’absence des révoltés une fois constatée, il la déclare suspendue, la renvoie à Lutèce chez les Parisiens, et se dirige à grandes étapes vers le territoire des Sénons. La marche fut si prompte, qu’ils n’eurent même pas le temps de se réfugier dans leurs places fortes. Ils firent leur soumission, les Carnutes de même : les Éduens intercédèrent pour ceux-là, les Rèmes pour ceux-ci. César se fit livrer des otages par chacun des deux peuples, et les choisit parmi les plus compromis : mais il réserva toute autre décision. Il revint ensuite à Lutèce, et tint une assemblée, où il fixa le contingent de cavalerie que la Gaule devait lui fournir pour la prochaine campagne.

Alors, disent les Commentaires, la Gaule centrale étant pacifiée, César n’eut plus de pensée et de volonté que pour s’acharner contre les Trévires et les Éburons. Une guerre inexpiable commença. Labienus écrasa encore les Trévires, et ce qui restait de la nation fut donné à Cingétorix, l’ami du peuple romain. César traqua les Éburons comme des bêles fauves, et pour les anéantir plus sûrement, il sembla convier les Germains eux-mêmes à prendre part à la curée. Mais Ambiorix échappa, les Germains maltraitèrent moins les Éburons que les hommes de César, et ce fut avec un sentiment de dépit que celui-ci ramena ses légions à Durocortorum (Reims).

Là se réunit l’assemblée d’automne. Les événements de l’année n’avaient point disposé César à la clémence. Il consacra cette session à instruire l’affaire des Carnutes et des Sénons : il ne fut pas question de pardon et d’oubli. Acco, le chef des conjurés sénons, fut condamné à la peine capitale, et César prit soin qu’il fût exécuté à la manière romaine. D’autres otages s’étaient enfuis avant le jugement : ils furent condamnés à l’exil. Puis l’assemblée fut congédiée.

La campagne militaire et diplomatique de l’année 53 était achevée. Il n’y avait plus d’hommes en armes en deçà du Rhin, sauf Ambiorix et ses quatre compagnons : tout le monde avait obéi à la réunion d’automne. La Gaule entière était cette fois, écrivait César sur ses tablettes, tranquille et apaisée, Il désigna les campements d’hiver de ses dixCampement-romain légions : deux furent logées près des Trévires, sur l’Aisne, la Meuse ou la Moselle, surveillant la frontière de la Germanie et les retraites d’Ambiorix. Le gros de l’armée fut déplacé vers le Sud, dans le bassin de la Seine : six légions à Sens, deux autres plus bas encore, chez les Lingons du pays de Langres et de Dijon ; Gaius Fufius Cita, chevalier romain, fut envoyé à Génabum (Orléans), pour diriger l’approvisionnement des camps romains. Labienus, le plus capable et le plus élevé en grade des lieutenants de César, fut chargé de veiller au salut de l’armée, pendant l’absence du proconsul.

Sauf le corps qui avoisinait les Germains, les légions romaines se trouvaient sur la route directe qui menait du Nord en Italie, comme si César, après six années de campagnes, voulait déjà leur montrer le chemin du retour. Lui-même prit cette route, franchit les Alpes, arriva sur les bords du Pô.

L’hiver survenait, les forêts celtiques se dépouillèrent, et les Gaulois virent reparaître la verdure éternelle des guis aux rameaux des arbres dénudés (novembre 53).

 

4. Bilan de l’œuvre de César en Gaule ; motifs de mécontentement.

 

Presque chaque année, à l’entrée de l’hiver, Jules César avait annoncé de même la pacification de la Gaule. Mais jamais il n’y avait cru davantage, jamais il ne se trompa plus complètement.

À force de ne voit dans la Gaule que des cités jalouses et des partis ennemis, il s’était persuadé qu’elle était plus incapable que la Grèce même de s’entendre contre l’étranger ; il se fit illusion sur la force et la nature des sentiments des vaincus, sur la durée et l’étendue de leurs colères. Son attitude pendant l’hiver qui commence est d’une étrange imprudence. Il ne se doute de rien, son service d’espionnage, si bien fait l'année précédente, ne lui donne aucun renseignement essentiel. Ses légats demeurent immobiles et tranquilles dans leurs campements ; s’il lève des troupes en Cisalpine, c’est contre ses ennemis du sénat. De Langres ou de Dijon, où campent ses légions les plus proches, jusqu’à Lucques ou Ravenne, où il va s’installer, il y a 150, 200 lieues et davantage, plus d’une semaine de chevauchée rapide, et pas un détachement important pour garder les communications. Les dix légions elles-mêmes, ramassées entre les plaines de la Champagne et le plateau de Langres, ne commandent pas sur plus d’un dixième de la Gaule. Ce qui peut se passer en Auvergne, sur la Loire ou en Armorique, leur échappe complètement. César ne prévoit pas l’imminence d’un mouvement général ; il le juge impossible, matériellement et moralement.

Car c’est le propre des ambitions universelles de méconnaître la valeur du patriotisme, la force de l’esprit national. Napoléon se brisa à vouloir briser les peuples. César se perdit deux fois par mépris ou ignorance des sentiments d’une nation : lorsque, dictateur à Rome, il crut qu’il pouvait y être roi ; lorsque, proconsul dans la Gaule, il la crut soumise le jour où elle fut silencieuse.

À cette heure où il ignorait le plus ce qui se faisait en Gaule, les Gaulois dressaient le bilan de ce que César leur avait apporté. — L’aristocratie l’avait accueilli, et il lui avait imposé un roi chez les Carnutes, chez les Sénons et ailleurs. Les Éduens lui avaient donné l’alliance de la Gaule, et il avait pris la présidence de l’assemblée, et il avait grandi, contre eux, la puissance des Rèmes. Il s’était dit le sauveur des Séquanes, et il avait laissé les Rèmes encore leur dérober leur clientèle. Les plus grands chefs étaient morts, et non pas tous sur les champs de bataille : Acco, Indutiomar, Dumnorix, le plus populaire de tous. L’action néfaste de César avait détruit des sénats entiers, les uns massacrés, d’autres frappés de proscription. Les nobles traînaient à travers les campements leurs tristesses d’otages éternels. Cette superbe cavalerie qui était l’ornement de la Gaule s’était usée dans des chevauchées sans gloire en Bretagne et en Germanie. Pour ménager ses fantassins légionnaires. César exposait ses auxiliaires gaulois aux principaux dangers. Ses commis aux vivres drainaient les blés et les fourrages ; les marchands romains commençaient dans les grandes villes leur besogne d’accapareurs et d’usuriers. César était venu pour délivrer la Gaule : il y tenait ses assises à la Romaine. Il était venu pour chasser les Germains : et, dans l’été qui venait de finir, il leur avait presque ouvert la frontière pour satisfaire sa haine contre Ambiorix. Que de contradictions entre ses premières paroles et ses derniers actes !

Ceux qui énuméraient ainsi les actions de César rappelaient aussi le passé de la Gaule, cette liberté dont elle avait été si fière jusqu’à l’arrivée des Romains, celte gloire militaire dont le monde entier avait tremblé. Mourir pour mourir, il valait mieux que ce fût les armes à la main, contre l’ennemi national. Et puis, était-on sûr de ne point revivre après ce qu’on appelait la mort ?

 

À suivre...

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5 mars 2012 1 05 /03 /mars /2012 07:28

Etymologie : du latin urbanus, de la ville.
L'urbanisation est l'action d’urbaniser, c'est-à-dire de favoriser, de promouvoir le développement des villes par la transformation de l'espace rural en espace urbain.
Le terme "urbanisation" désigne aussi le phénomène historique de transformation de la société qui se manifeste par une concentration croissante de la population dans des agglomérations urbaines. L'urbanisation se mesure par le nombre d'habitants dans les villes par rapport à l'ensemble de la population, la densité de population, l'extension territoriale des villes et ses conséquences sur le mode de vie.
L'urbanisme est l'art de construire, de transformer, d’aménager les villes au mieux de la commodité, suivant les règles de l’esthétique et de l’hygiène. En tant que discipline et domaine professionnels, l'urbanisme recouvre l'étude du phénomène urbain, l'action d'urbanisation et l'organisation de la ville et de ses territoires.

 

 

   C'est à partir d'un axe principal orienté nord-sud matérialisé par l'actuelle rue Saint-Jacques, d'un point de franchissement commode de la Seine et du faible relief d'une petite éminence naturelle, la montagne Sainte-Geneviève, que s'est mis en place le premier parcellaire gallo-romain de Lutèce.

 

   Les premières installations de la montagne Sainte-Geneviève.

 

  La montagne Sainte Geneviève est l'une des collines qui entourent, au sud, la plaine alluviale de Paris, façonnée par les méandres de la Seine. Sa superficie correspond grossièrement au Ve arrondissement qui forme avec une partie du VIe, les contours de la ville gallo-romaine.

  Les vestiges et le mobilier les plus anciens ont été retrouvés au sommet de la colline. À partir de là, le tracé des parcelles, l'implantation des rues et les premiers lotissements se sont développés sur les flancs su et nord jusqu'au fleuve, puis sur l'île de la Cité et la rive droite. Les vestiges d'habitat les plus précoces ont été mis au jour dans ce secteur géographique, entre la rue Cujas, de l'Abbé de l'Épée, Pierre et Marie Curie, ainsi qu'à l'École des Mines et à l'Institut Curie. Les insulae sont loties prioritairement sur leur périmètre, en bordure des voies et passages. À l'intérieur, les premières maisons sont mitoyennes ou isolées au milieu de grands espaces non bâtis ; cours, friches, vastes zones de circulation. Ce sont des modules d'habitation rectangulaires en structure légère - murs de torchis sur sablières basses - parfois bordées de portiques.

 

       Un premier parcellaire en fossé.

 

  Les premières traces de découpage de l'espace observée sur la rive gauche de la Seine sont matérialisées par des systèmes de fossés de section en V ou en U.

  La forme et les dimensions de ces fossés rappellent les techniques utilisées dans les fossés du Verbe-Incarné et de la rue Le Châtelier, à Lyon, dispositif léger, pourvu d'une rigole et de bois de défense à leur base. Sans remettre en cause l'origine militaire de cette technique d'ouvrage, l'interprétation de ces fossés va dans le sens d'un tracé primitif de parcellaire, ou d'un premier état  d'urbanisation, faisant appel à des techniques empruntées au génie militaire.

 

     Le tracé des rues.

 

  La distribution des rues par rapport aux axes fondateurs de Lutèce est assez irrégulière. Et ce, aussi bien dans ce qu'il convient d'appeler la périphérie urbaine lutécienne que dans le centre monumental. Ces irrégularités sont toutefois structurantes pour les zones de la ville dans lesquels elles se trouvent, créant même de véritables réseaux urbains secondaires. On observe ainsi dans la partie sud du cardo, une variation de tracé qui entraîne une autre logique d'organisation reprise par les rues qui lui sont parallèles et perpendiculaires.

  Ces irrégularités semblent s'imposer sur les rues principales qui prolongent les voies d'accès à la ville. Plus simplement, certaines rues secondaires étaient souvent plus utilisées que les voies tracées.

  La plupart des rues créées au début de l'urbanisation gallo-romaine de Lutèce vont perdurer jusqu'au IVe siècle, ainsi que bon nombre de limites parcellaires à l'intérieur des îlots.lutece-antique

 

     Les aménagements des berges de la Seine et de l'île de la Cité.

 

  Le guet que constitue l'île de la Cité, peut-être préhistorique, est un lieu stratégique de passage entre le nord et le sud et d'échange entre le fleuve et le territoire de la cité de Lutèce. Au début de la romanisation, l'île est encore coupée en deux par une zone inondable qui la configure en deux îles.

  Si l'on situe les années de ce grand chantier d'urbanisation, pendant la période augustéenne (27 av. - 14 ap. J.C.), ce n'est que sous Tibère que commence véritablement l'insertion de l'île dans l'espace urbanisé. L'analyse dendrochronologique des bois recueillis a en effet permis de fixer leur date d'abattage à l'hiver de l'année 3 après Jésus Christ. À la différence de la rive gauche, l'aménagement des abords du fleuve et le façonnage des îles s'est déroulé sur une période assez longue et par étapes successives.

  L'île est remodelée et le port créé sous Tibère (14 - 37). Les données archéologiques mettent en évidence l'existence d'une zone portuaire sur le petit bras de la Seine, sur le versant sud de l'île de la Cité. Des agencements particuliers destinés d'une part à maîtriser les variations du fleuve et d'autre part à rendre accessible cette berge au trafic fluvial ont été mis au jour.

  Viennent ensuite l'aménagement des berges par un appontement en bois le long du quai, fondé dans l'argile et reposant sur des pieux de bois et enfin, l'installation d'un complexe de poteaux et de pieux dans la zone inondable entre les deux îlots. Tous ces travaux ont été menés de front suivant un véritable projet urbain conçu pendant la période augustéenne.

  La prédominance de la rive gauche, et plus particulièrement de la montagne Sainte Geneviève, apparaît bien dès l'instauration du premier parcellaire de Lutèce. À l'intérieur de ce cadre, va se mettre en place, à partir de l'époque flavienne, la construction de l'appareil monumental comme une organisation scénographique, destinée à être vue depuis le cours du fleuve perdurera au cours du développement urbain et architectural que connait la ville jusqu'au IIIe siècle.

 

Source : Sylvie Robin, Histoire Antique H-S N° 10

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3 mars 2012 6 03 /03 /mars /2012 09:51

                                                          Vercingétorix

 

      Chapitre - Le soulèvement de la Gaule.

 

2. De intervention de la religion et des druides dans le soulèvement général.

 

Le nom des Carnutes doit attirer notre attention sur les druides. Ont-ils, eux aussi, dénoncé la guerre à César, ou se sont-ils tenus, eux et leurs dieux, dans la neutralité ? Quelle a été, depuis l’arrivée jusqu’au départ du proconsul, l’attitude de l’aristocratie religieuse en face du peuple romain ?

 À ces questions, nul ne pourra jamais répondre que par des conjectures. On ne trouvera pas la moindre allusion, dans les Commentaires de César, à un rôle joué par la religion dans la guerre de la Gaule ; et les autres historiens, plus ou moins influencés par lui, imitent sur ce point sa réserve.

Ce silence doit être voulu. César a vécu pendant quelques mois auprès du druide Diviciac ; il en a fait son confident et son conseiller dans des causes délicates : pas un instant il n’a mentionné sa qualité de prêtre. Il a prêté aux chefs gaulois de beaux et longs discours : il évite de leur faire prononcer les noms des dieux. Une seule fois, dans le cours des grandes révoltes, nous nous apercevons qu’ils pensaient à la divinité en combattant, et c’est en lisant le livre des Commentaires qui n’est point écrit par César.

Le proconsul a la ferme volonté de tenir les puissances religieuses à l’écart du récit de ses démêlés avec les hommes. A-t-il jugé, lui, sceptique par philosophie, qu’il était inutile de faire intervenir, pour expliquer des affaires sérieuses et positives, les fantômes créés par l’imagination craintive des peuples ? ou bien, politique prudent, a-t-il voulu insinuer aux Gaulois, en racontant ses victoires, que leurs dieux n’ont paru nulle part, et que, s’ils se trouvaient d’un côté, c’était de celui des Romains ? ne dit-il pas lui-même, et tout à fait incidemment, que ces dieux ressemblaient à ceux de Rome, leur Teutatès n’étant que Mercure ? Quoi qu’il en soit, tous les insurgés dont parle César, Ambiorix, Indutiomar, Vercingétorix lui-même et surtout, et les soldats aussi bien que les chefs, n’apparaissent dans les Commentaires que comme des hommes qui commandent ou qui obéissent, et rien de plus, ignorants de la prière et de la foi, étrangers à toute crainte religieuse et à toute espérance vers le ciel. César ne leur a laissé que l’allure militaire, et le moins possible de couleur locale. Il a laïcisé à outrance l’esprit et l’histoire de la Gaule.

César a par là, sinon dénaturé, du moins dénudé cette histoire. Nul ne croira que la Gaule n’ait pas appelé prêtres et dieux à son secours. Ces hommes, que leur adversaire regarde comme voués aux superstitions, ont dû terriblement jouer de leurs croyances dans ces journées décisives de leur vie ; ces dieux, dont la multitude grouillait sur les montagnes, le long des sources et dans les bois, ont dû s’agiter sur le passage de tant d’hommes en armes ; le sang des victimes humaines a dû couler pour solenniser les serments des conjurations suprêmes et attirer sur les étendards gaulois la faveur des puissances souveraines. Il est impossible que les druides, leurs prophètes et leurs bardes soient devenus subitement muets à l’arrivée des Romains : les prêtres et les desservants de la religion gauloise avaient la parole facile et l’humeur loquace. Voilà des hommes dont César nous dit, textuellement : Ils décident presque de toutes les causes privées et publiques ; ils peuvent interdire les sacrifices aux particuliers et aux nations mêmes qui n’acceptent pas leurs sentences : il n’y a en Gaule que deux classes qui soient considérées, les druides et les chevaliers ; et c’est par les prêtres que les magistrats peuvent être installés. Croira-t-on que, jusque-là arbitres et juges suprêmes, les druides aient brusquement abdiqué leur puissance ? Je ne m’imagine pas la subite abstention de tout un sacerdoce au milieu des conflits politiques et des luttes nationales.

Si la logique des faits n’a point subi trop de démentis dans la guerre des Gaules, s’il est permis de deviner la conduite des hommes d’après leur origine et leur caractère, voici ce qu’on pourrait supposer de l’histoire des druides depuis l’arrivée des Romains.

 À aucun moment, je doute qu’ils aient été unanimes pour ou contre Jules César. Le sacerdoce partagea les querelles et les partis pris de la noblesse, à laquelle il était allié. Malgré leurs assemblées générales et leur chef unique, les prêtres étaient divisés entre eux ; les armes seules décidaient parfois du choix du grand pontife. Éduens et Séquanes, chaque parti devait tenir à ce qu’il fût homme de son goût, comme Athéniens ou Spartiates cherchaient à faire parler leur langue à la sibylle d’Apollon.

Au début, les prêtres, ainsi que les nobles, sont en majorité du côté de César. C’est un druide que Diviciac, le traître le plus intelligent et le plus utile que le proconsul ait rencontré chez les Gaulois ; et je soupçonne que le druidisme était particulièrement influent chez les Éduens, amis presque séculaires du peuple romain.

Insensiblement, les prêtres, eux aussi, s’éloignèrent du proconsul. Il n’est plus question de Diviciac après 57. L’impérialisme militaire de César s’accommodait mal d’une théocratie officieuse. Ce fut, de tous les Romains, celui que les scrupules religieux ont le moins arrêté. Les dieux gaulois ne troublèrent pas plus son bon sens que les dieux de Rome. Il s’est passé, sans nul doute, des auspices sacerdotaux pour introniser Tasget et Cavarin ; on ne se représente pas les druides inaugurant l’assemblée de la Gaule sous la présidence du général romain. La civilisation latine menaçait d’une fin prochaine ce qui faisait la grandeur et la puissance du sacerdoce national : les chants des bardes, les prophéties des devins, les sacrifices sanglants des prêtres. En présence de César, les lyres ne résonnaient plus de la louange des héros gaulois, et les dieux étaient sevrés de victimes humaines.druides-et-guerres

Depuis l’hiver de 54-53, la majorité des druides est passée (je le suppose du moins) du côté de la conjuration : si les prêtres n’en furent pas les inspirateurs, ils en étaient du moins les auxiliaires. Quatre ans plus tard, lorsque César quitta pour toujours la Gaule vaincue, les bardes et les druides furent les premiers à se réjouir, et reprirent, ceux-là leurs harpes et ceux-ci leurs couteaux. Après la mort de Néron, au temps de l’incendie du Capitole, ce sont les druides qui prophétisent la revanche des Celtes : les Romains ne séparent pas leur nom de la crainte d’une révolte gauloise. De la même manière, à la veille du principal soulèvement, ils ne purent être que du côté de ceux qui le préparaient. Ce fut dans la profondeur des bois que se tinrent les conciliabules des chefs, et ces bois étaient l’asile ordinaire des rendez-vous sacrés. Les conjurés profitaient des fêtes d’hiver pour haranguer les hommes, et c’étaient des prêtres qui présidaient à ces fêtes. Un des deux chefs carnutes qui proclameront la guerre dans l’hiver de 53-52, semble être revêtu d’un sacerdoce.

Car, enfin, ce sont les Carnutes qui, les quatre dernières années de la guerre, se sont périodiquement faits les hérauts du soulèvement (et, chose étrange ! leur nom signifie peut-être, en langue celtique, la trompette de combat). En 54, ils massacrent le, roi imposé par Rome ; en 53, ils refusent de venir à rassemblée convoquée par César ; en 52, l’année de Vercingétorix, ils donnent le signal de l’entrée en campagne ; l'année suivante encore, après la chute d’Alésia, ils recommenceront la lutte à l’improviste, au beau milieu de l’hiver. Ils furent, de tous les peuples de la Gaule, celui qui s’acharna le plus à vouloir la liberté, et c’était celui qui offrait l’hospitalité à la réunion des prêtres. Ce ne peut être un hasard si le mot d’ordre de la révolte a toujours été lancé près de l’enceinte sacrée où les druides prenaient leurs décisions.

 

À suivre...

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2 mars 2012 5 02 /03 /mars /2012 11:59

Guy Montagné nous propose une imitation du célèbre accadémicien Alain Decaux dans la narration de la bataille d'Alésia. L'histoire tourne vite au vinaigre à cause d'une carafe d'eau remplie par erreur avec du rhum blanc.. Cliquez ici.

 

 

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25 février 2012 6 25 /02 /février /2012 08:02

 

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21 février 2012 2 21 /02 /février /2012 07:26

Carlos Núñez est né le 16 juillet 1971 à Vigo en Galice, sonneur de gaïta et flûtiste. Formidable musicien, amoureux de la Bretagne, Carlos Nuñez est la vedette des fêtes celtiques.

 

Carlos Nuñez : Rencontre avec un breton de coeur par tvtregor

 

  Dans son album "Un galicien en Bretagne", Carlos rend hommage à l'An Dro, cette danse bretonne originaire du pays vannetais qui se danse en ronde, en chaîne ouverte ou par couples, en cortège. Un morceau magnifique qui donne la chair de poule et picote les yeux de ceux qui n'ont pas perdu leurs racines : Celtes


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18 février 2012 6 18 /02 /février /2012 09:57

            Vercingétorix

 

     Chapitre IX - Le soulèvement de la Gaule.

 

1. Révolte des Sénons et des Carnutes.

 

La mort de Dumnorix et d’Indutiomar, la défaite d’Ambiorix avaient arrêté le soulèvement de la Gaule en 54 ; mais la conjuration, une fois formée, ne s’était point rompue.

Au mois de mars 53, César réunit à Samarobrive (Amiens) l’assemblée générale de la39s01.jpg Gaule : il la présida, à son habitude, du haut de son tribunal. Les Trévires, en guerre avec lui, n’y parurent pas, et le proconsul n’eut pas lieu de s’en étonner. Mais, pour la première fois depuis qu’il commandait en Gaule, deux des principales nations celtiques, les Sénons et les Carnutes, refusèrent d’envoyer des députés pour jouer près du camp romain la comédie de la liberté gauloise.

Elles avaient, quelques semaines auparavant, aboli la royauté que César leur avait imposée. Chez les Carnutes, le roi Tasget avait été égorgé sans autre forme de procès. Chez les Sénons, le roi Cavarin avait été, semble-t-il, condamné régulièrement par le sénat de la nation, présidé ou conseillé par Acco : mais on avait apporté une telle solennité à l’affaire que Cavarin avait eu le temps de se réfugier, à la tête des siens, auprès du proconsul. Ni des Carnutes ni des Sénons César n’avait reçu les satisfactions qu’il désirait ; ils avaient au contraire échangé des promesses avec les Trévires, et leur abstention à Samarobrive ressemblait à une déclaration de guerre.

La révolte de ces deux peuples avait une tout autre importance que celle des Éburons et des Trévires, peuplades à demi germaniques, presque cachées entre la Moselle, la Meuse et le Rhin, derrière les fourrés et les marécages de la forêt des Ardennes.

Les Sénons et les Carnutes étaient alors parmi les nations tes plus considérées de la Gaule : ils n’étaient guère inférieurs, comme rang et comme puissance, qu’aux Rèmes et aux Éduens. Les Sénons passaient pour un peuple « solide et de grande autorité ». Ils possédaient un très vaste territoire, s’étendant depuis les pentes septentrionales du Morvan éduen jusqu’aux abords de la Marne ; ils étaient maîtres de la plupart des vallées qui convergent du Sud et de l’Est vers le bassin de Paris : celles de la Seine, de l’Armançon, de l’Yonne (sur les bords de laquelle étaient leur principale ville, Agendincum, Sens), du Loing et de l’Essonne. Une alliance étroite les avait unis aux Parisiens de Lutèce. Ils commandaient ainsi les principales routes qui, d’Amiens, menaient au centre et au sud de la Gaule : hostiles à César, ils lui fermaient le plus court chemin de l'Italie.

La défection des Carnutes était presque aussi grave au point de vue militaire, elle avait une portée morale beaucoup plus grande. C’était une des nations les plus célèbres et les plus étendues de la Gaule centrale. Elle s’appuyait sur les deux plus grands fleuves : au Sud, elle possédait les deux bords de la Loire, à l’endroit même où celle-ci remonte le plus vers le Nord, et elle avait sur la rive septentrionale sa principale ville, Génabum (Orléans), la clé de la défense militaire de tout le bassin ; au Nord, les Carnutes possédaient, en face du débouché de l’Oise, les bords de la Seine, de Mantes à Poissy. Leur territoire était regardé par les Celtes, comme le milieu de la Gaule entière, et fort justement. Car il servait de lien entre les terres armoricaines à l’Ouest et les plateaux éduens à l’Est, entre la Belgique qu’il touchait au Nord et les Bituriges et les Arvernes qu’il avoisinait au Midi. C’était un centre merveilleux pour les opérations commerciales : à la suite des victoires de César, les marchands romains s’établirent à Orléans et y ouvrirent leurs magasins. Les Carnutes possédaient du reste ce dont César avait le plus besoin pour se maintenir en Gaule, la race des robustes chevaux du Perche, la fécondité des blés de la Beauce ; aussi le proconsul avait-il installé à Génabum son principal service d’approvisionnement. Enfin, dernier et redoutable élément d’influence, les Carnutes inspiraient aux Gaulois une sorte de respect religieux : chez eux se trouvait l’enceinte consacrée où se réunissait, chaque année, le conseil général des druides. C’était sur la terre carnute que reposait toujours, malgré la désunion des peuples, le foyer commun de toute la Gaule.

Les Carnutes avaient donc, autant que les Arvernes, plus même que les Éduens, le droit de jouer en Gaule un rôle universel. Seuls peut-être d’entre les peuples du Centre, ils jouissaient d’une certaine autorité parmi les tribus de l’Armorique, dont quelques-unes leur étaient apparentées. Ils furent une des nations qui maintinrent l’unité religieuse et la grandeur du monde celtique. Leur abstention, en mars 53, paraissait signifier à César que les dieux de la Gaule commençaient à se séparer de lui. Si la forêt sacrée des Carnutes se peuplait de ses ennemis, les hauts sommets où habitait Teutâtes ne tarderaient point à s’illuminer des feux de la révolte.

 

À suivre...

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16 février 2012 4 16 /02 /février /2012 08:21

  Le Mont Beuvray, qui va accueillir la future Bibracte, fut occupée par des habitants dès le Néolithique. Mais l'oppidum n'est fondé que lors du IIe siècle avant Jésus-Christ.

Bibracte est nommée ainsi en l'honneur de la déesse qui porte le même nom.


  La première mention de Bibracte dans l’histoire a été faite par César dans ses Commentaires sur la Guerre des Gaules concernant l’année -58 et la bataille de Bibracte. Celle-ci est à nouveau mentionnée en -52 lorsque César s’interroge sur les intentions de ses alliés Éduens qui ont rejoint la révolte et couronnent Vercingétorix roi des Gaules à Bibracte. Malgré ce ralliement, César traita la cité avec ménagement après sa victoire à Alésia. Il y séjourna même durant l'hiver 52/51.

 

     L'oppidum.


  L'oppidum Eduens est formé d'un rempart extérieur  qui protège une surface de 200 hectares. Entre 5 000 et 10 000 habitants vivaient sur cette surface. Mais avec le temps, la ville fut rétrécie et un rempart intérieur, plus petit donc que le premier mais aussi plus facile à défendre, fut construit avec les matériaux du rempart extérieur. Bibracte est passé de 200 à 135 hectares, ce qui donne tout de même 5km de remparts. Ce mur intérieur fut rénové cinq fois par les Eduens. D'une hauteur de 5 mètres, il était précédé d'un fossé de 10 mètres de large et 4 mètres de profondeur !Plan_Bibracte.png

   Une quinzaine de portes étaient étalées sur les remparts. Entre les deux remparts se trouvait une nécropole exclusivement réservée aux familles aristocrates. Une autre nécropole (d'1,5 hectares) était à disposition du peuple et 70 enclos funéraires étaient disponibles. Les défunts étaient incinérés.

   Bibracte avait aussi une importance artisanale. Des mines d'extraction ont vu le jour sur les massifs des environs. L'étain, le fer et l'or étaient recherchés. Les ateliers de fonte des métaux se trouvaient à l'extérieur de l'oppidum. Une fois la transformation du métal réussi, celui-ci était envoyé aux ateliers de la puissante cité, où se côtoyaient donc mineurs, forgerons et frappeurs de monnaies. Un quartier de la ville était entièrement réservé à leurs ateliers.

   Au centre de la rue principale se trouvait un bassin en granit rose. Son orientation estBasin_in_Bibracte.jpg étudiée car elle correspond au lever du soleil lors du solstice d'hiver et au coucher du soleil pour le solstice d'été. Sa construction fut confiée à des étrangers de la côte Méditerranéenne.

   Le quartier du bassin était aussi celui des caves où l'on entreposait les céréales (dont les récoltes Eduennes) et les vins Méditerranéens.

   Autre quartier, plus original celui-ci, le quartier des cultes. Celtique entre autres avec un nemeton d'un hectare au sommet du Mont Beuvray. Dans cet endroit, les druides effectuaient des sacrifices d'animaux (ou de prisonniers de guerre plus rarement). Ce lieu de culte était entouré d'une palissade et d'un fossé. Cinq fontaines et une dizaine de sources étaient éparpillées à travers Bibracte. Dans certaines, des pièces ou ex-voto étaient jetés. Certaines, comme la fontaine Saint-Pierre avaient des vertus purificatrices et curatives.

  Les maisons étaient majoritairement constituée de bois et de terre,  la pierre étantbibracte-.jpg plutôt consacrée aux remparts. On retrouve cependant des constructions en pierre dans le quartier dit du Parc aux chevaux, certainement des maisons aristocratiques, et un édifice à colonne (certainement public) au niveau de la pâture du Couvent.

  Au centre du Mont-Beuvray, le plateau dit du Parc aux chevaux abrite plusieurs maisons en pierre à la romaine. On y retrouve en particulier une demeure initialement construite en bois (d'inspiration romaine) puis transformée en une véritable domus avec un atrium à impluvium, des portiques et même des thermes chauffés par hypocauste, ainsi qu'un système d'égouts. Dans sa phase finale, la demeure mesurait 55 m × 67 m, couvrant une superficie d'environ 3 500 m², soit environ quatre fois la taille des domus que l'on retrouve sur le site de Pompéi. On estime qu'il y avait environ une quinzaine de domus dans cette zone, de plus petite taille. On a retrouvé également des habitats de type villa rustica (les demeures rurales italiques). Cependant, on ne sait pas si c'était un quartier résidentiel uniquement réservé à une élite puisque les fouilles ont également révélé la présence de forges près des domus.

   Bibracte était donc une cité riche, une capitale et une puissance commerciale sans comparaison possible avec ce qu'il se faisait ailleurs en Gaule. Elle a fait la puissance des Eduens et le fait que les Romains soient alliés à ce peuple Gaulois a permis à la ville de régner en maître sur la région.

   Le géographe Strabon, qui écrit une génération après César, signale encore Bibracte comme place forte des Éduens.

  Au début du règne de l'empereur Auguste, les Romains fondèrent Autun (Augustodunum). Sœur et émule de Rome, Autun avait pour mission de remplacer Bibracte comme capitale gallo-romaine des Eduens.  Bibracte fut alors peu à peu délaissée par ses habitants. Des cultes se poursuivent cependant dans les temples et près des fontaines et les habitations aristocratiques continuent d'être entretenues. Deux hypothèses principales sont avancées quant à cet abandon progressif du site sur quelques décennies. Cette migration peut être due à des raisons économiques ou à une volonté d'intégration au modèle romain ; une partie de la classe dominante éduenne, déjà pro-romaine durant la Guerre des Gaules, a certainement pris conscience de l'importance stratégique de la nouvelle ville située sur les principaux axes de communication et a aussi voulu s'adapter au modèle romain des villes de plaines tandis qu'une population plus traditionnelle est restée un temps sur le site.

 

Sources : Jules César, Commentaires sur la Guerre des Gaules  _ Strabon, Géographie, livre IV _ Stephan Fichtl, La ville celtique, Les oppida de 150 av. J.-C. à 15 ap. J.-C., éditions Errance _ http://www.augustodunum.org/le_site.htm

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