Deuxième partie de l'article consacré au grand commerce en Gaule-Romaine. 1ère partie cliquez ici
La céramique sigillée[1]
Au rang des produits commercialisés elle occupe une place privilégiée puisque pratiquement chaque fouille en livre au moins quelques tessons.
L’engouement des Gallo-Romains pour cette céramique fut si vif qu’à l’époque de leur activité maximale, les ateliers du sud et du centre couvrirent non seulement les besoins du pays mais, par une politique commerciale conquérante, ils réalisèrent une spectaculaire percée dans le monde romain tout entier. N’a-t-on pas découvert dans les ruines de Pompéi une caisse non encore déballée contenant quatre-vingt-dix vases en céramique sigillée et trente lampes provenant des officines de la Graufesenque[2] ?
Ces céramiques furent largement exportées dans la province d’Espagne. Les fouilles de Belo, Ampurias, Tarragone en Espagne et Coïmbra (Conimbriga) au Portugal, ont en effet révélé le quasi-monopole des céramiques sigillées de la Graufesenque pendant un demi-siècle, des années 50 à la fin du 1er siècle. Une solide organisation concertée avec les négociants du port de Narbonne, permit cette conquête du marché espagnol avant que les productions locales n’y supplantent les poteries gallo-romaines.
Mais le territoire ibérique ne fut pas le seul à être inondé par la production de la Graufesenque, ses productions étaient également exportées en Grande-Bretagne (partie orientale jusqu’aux limites de l’Ecosse), sur les frontières Rhin-Danube, dans l’ouest de l’Italie et, de façon plus clairsemée, en Afrique du Nord jusqu’à Alexandrie et au Proche-Orient.
L’officine voisine de Banassac (Lozère) dont la période de production s’étend de 60 à 180 environ, s’orienta délibérément vers l’exportation en direction de l’Europe Centrale que l’autorité romaine s’efforçait alors de mettre en valeur. Aussi la clientèle, disséminée dans les postes du limes rhétique et danubien, fut-elle essentiellement militaire. La voie de diffusion la plus courte atteignait probablement Genève par le Rhône puis Lausanne, Avenches, suivait la vallée de l’Aar, franchissait le Rhin et rejoignait le cours supérieur du Danube dans l’actuel Württemberg en Allemagne. Descendant le cours du fleuve, les productions de Banassac, furent aussi vendues jusqu’en Hongrie et même dans la province de Dacie, actuelle Roumanie. Des tessons ont même été trouvés à Antioche sur les côtes de Syrie, acheminés peut-être par cet itinéraire. Quant aux produits de l’atelier de Banassac découverts à Pompéi, il est fort probable qu’ils aient été transportés par voies maritimes.
Le marché intérieur de la Gaule fut lui aussi pénétré par des productions étrangères, notamment par les amphores espagnoles contenant l’huile d’olive de Bétique, aujourd’hui l’Andalousie. Identifiable par leur panse sphérique et les marques imprimés sur leurs anses rondes, ces amphores importées, ajoutés à l’exportation de la céramique sigillée, témoignent de la vitalité des échanges commerciaux.
[1] La céramique sigillée est une céramique fine destinée au service à table caractéristique de l'Antiquité romaine. Elle se caractérise par un vernis rouge grésé cuit en atmosphère oxydante, plus ou moins clair et par des décors en relief, moulés, imprimés ou rapportés. Certaines pièces portent des estampilles d’où elle tire son nom, sigillée venant de sigillum, le sceau.
[2] La Graufesenque est un site archéologique situé sur la commune de Millau (Aveyron) à 2 kilomètres de la ville, dans une petite plaine alluviale formée à la jonction des rivières du Tarn et de la Dourbie, sur le territoire des Rutènes
Découverte d'une amphore espagnole : (vidéo)
Source : Les Gallo-romains- Gérard Coulon éd. A. Colin _