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6 avril 2013 6 06 /04 /avril /2013 08:58

ESSAI SUR LA CONDITION DES BARBARES ÉTABLIS DANS L'EMPIRE ROMAIN AU IVè SIÈCLE

 

Chapitre III. Les Fœderati.

 

Les Francs Saliens.

 

Dès le IIIe siècle de l’ère chrétienne, les Francs apparaissent, d’abord comme ennemis, puis comme alliés de l’Empire. On ne tarda pas à apprécier leur valeur égale à celle des Bataves et leurs qualités militaires non moins remarquables. Leur place se trouvait naturellement marquée parmi les nations que Rome cherchait à gagner pour s’en faire un rempart contre le flot des invasions. Les circonstances favorisèrent la politique romaine. Chassés de leurs demeures primitives par les Saxons, les Francs Saliens s’établirent d’abord dans l’île des Bataves dont la possession leur fut reconnue et qu’ils occupèrent à la condition de fournir des recrues à l’Empire et de protéger la frontière du Rhin contre les envahissements des autres peuples barbares. Ils conservèrent leurs rois, leurs institutions nationales, leur indépendance vis-à-vis de Rome, qui se contenta de leur imposer sa souveraineté comme aux Bataves. Ce fut sous le règne de Gallien, en 259, que les Francs conclurent une première alliance avec l’Empire et se mirent à sa solde[18].

Les Saliens, dont le nom apparaît pour la première fois dans un texte d’Ammien Marcellin[19], formaient une des principales branches de la grande confédération des peuples de même race désignés sous le nom générique de Francs[20]. Cette désignation particulière qui les distinguait des autres tribus franques remontait à une assez haute antiquité (quos consuetudo Salios adpellavit) ; elle était empruntée, selon toute apparence, non pas à leur séjour sur les bords d’une rivière appelée la Saale, mais à la266.jpeg condition même de la terre patrimoniale, appartenant aux chefs de famille (sala, saal, en tudesque, domus domini), et se transmettant de mâle en mâle, à l’exclusion des femmes. Cette disposition évidemment très ancienne et caractéristique chez les Francs de la même tribu s’est conservée dans la loi salique, recueil écrit des anciennes coutumes, des traditions nationales. On y retrouve l’expression de terre salique dans le même sens, et c’est en vertu d’une analogie avec cette vieille loi que les femmes furent exclues de la succession à la couronne de France[21].

Les Saliens occupèrent, avec l’agrément de Rome, le territoire voisin de la mer et s’y montrèrent les fidèles alliés de l’Empire. Plus tard, vers le milieu du Ier siècle, les Saxons envahirent de nouveau la frontière romaine. Les Francs, préposés à la garde de cette frontière, se mirent en devoir de la défendre et de repousser les envahisseurs, mais ne pouvant soutenir la lutte, ils se virent refoulés et obligés de chercher un nouvel asile sur le territoire romain, dans le pays des Toxandriens, entre l’Escaut et la Meuse, qui forme une partie des Pays-Bas actuels[22]. Julien considéra comme une atteinte portée à la puissance et à l’autorité de Rome cet établissement des Barbares que n’avait précédé aucune demande officielle et se prépara à marcher contre eux.

Aussitôt les Saliens envoyèrent une ambassade pour se justifier et implorer la paix, assurant que ce n’était pas comme ennemis qu’ils avaient franchi les limites assignées à leur nation, mais que la nécessité seule les y avait contraints, et que, si on les laissait tranquilles dans leur résidence actuelle, ils s’engageaient à remplir fidèlement les obligations qui leur seraient imposées. Rome était intéressée à accepter de semblables propositions, accompagnées d’un acte de réparation solennel. Julien n’hésita pas à recevoir comme auxiliaires ces nouveaux hôtes de l’Empire. Les Saliens continuèrent à fournir de précieuses recrues aux armées romaines ; ils devinrent, à partir de cette époque, les alliés perpétuels de Rome et furent spécialement chargés de la défense du Rhin depuis Mayence jusqu’à la mer[23]. Plusieurs corps auxiliaires de Saliens (seniores et juniores) et de peuples appartenant à la confédération des Francs, tels que les Bructères, les Ampsivariens, figurent dans la Notitia Dignitatum[24].

 

[18] Lehuërou, l. I, c. IX.

[19] Ammien, l. XVII, c. VIII.

[20] Zosime, l. III, c. VI.

[21] Ammien, l. XVII, c. VIII. Note de Valois. — Guérard, Polyptique d’Irminon, 1re part., p. 496. — Pardessus, Loi salique, tit. 62. — Montesquieu, Esprit des Lois, l. XVIII, c. XXII.

[22] Ammien, l. XVIII, c. VIII. — Zosime, l. III, c. VI.

[23] Dareste, Hist. de France, t. I, l. III, § 13. — Lehuërou, l. I, c. IX. — Zosime, l. III, c. VI-VIII.

Les Francs Ripuaires, tribu tout à fait différente et indépendante des Saliens, habitaient encore au IVe siècle la rive droite du Rhin. Ils doivent peut-être se confondre avec les Attuarii dont parle Ammien Marcellin et contre lesquels Julien fit plusieurs expéditions. Ils n’occupèrent la Deuxième Germanie que dans la première moitié du Ve siècle et devinrent à cette époque les alliés de l’Empire comme Fœderati. Jornandès les cite en énumérant les troupes auxiliaires qui combattaient dans l’armée d’Aétius contre Attila et les Huns. Leur nom de Ripuaires vient évidemment du pays où ils s’étaient établis entre le bas Rhin et la Meuse. Ils conservèrent leurs rois de la race marcomirienne jusqu’au temps de Clovis et s’incorporèrent alors à la monarchie franque. Leur loi se maintint à côté de la loi salique.

[24] Böcking, Notitia Dignitatum, 3 vol. in-8°, Bonn, 1739-1853. — Zosime, l. III, c. VIII.

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